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Dans la série Les précurseurs du spiritisme : Saint-Martin - 5e article

 

La Vérité - Journal du Spiritisme, paraissant tous les dimanches - Bureaux à Lyon, rue de la Charité, 48 - Troisième année –  n° 15, Dimanche 4 juin 1865 - Pages 58-59.


Rappelons qu'il nous manque le 7e article. La Vérité - Journal du Spiritisme

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Avertissement

L'auteur de cet article cite la lettre CX  (19 juin 1797, p. 321 et suiv.) de Louis-Claude de Saint-Martin à Nicolas-Antoine Kirchberger, baron de Liebistorf (1739-1799) que l'on trouve dans la Correspondance inédite entre Saint-Martin et Kirchberger.

Comme dans toutes ses citations, André Pezzani change parfois le texte et le transforme à sa manière pour faire dire aux différents auteurs cités ce qu'il veut démontrer, et notamment pour Saint-Martin, qu'il est un "adepte" du spiritisme, ou du moins un de ses précurseurs. Or Saint-Martin, dans cette lettre, précise justement sa position :

« La seule initiation que je prêche et que je cherche de toute l'ardeur de mon âme, est celle par où nous pouvons entrer dans le cœur de Dieu, et faire entrer le cœur de Dieu en nous, pour y faire un mariage indissoluble, qui nous rend l'ami, le frère et l'épouse de notre divin Réparateur. Il n'y a d'autre mystère pour arriver à cette sainte initiation, que de nous enfoncer de plus en plus jusque dans les profondeurs de notre être, et de ne pas lâcher prise, que nous ne soyons parvenus à en sortir, la vivante et vivifiante racine ; parce qu'alors tous les fruits que nous devrons porter, selon notre espèce, se produiront naturellement en nous et hors de nous, comme nous voyons que cela arrive à nos arbres terrestres, parce qu'ils sont adhérents à leur racine particulière, et qu'ils ne cessent pas d'en pomper le suc ».

Nous avons laissé l'article de Pezzani tel qu'il a paru dans le journal La Vérité. Nous avons mis les mots ajoutés ou modifiés par l'auteur en italique,  et entre crochets [...] les termes originaux de Saint-Martin.


5e article.  Pages 58-59

Ceux qui se plaisent dans l'état où l'âme est tombée, dit-il, et qui ne savent pas le chemin de la sphère supérieure à laquelle nous appartenons de droit primitif, acceptent l'empire des intelligences astrales, et se mettent en rapport avec elles. C'est la grande aberration de ceux qui pratiquent la magie, la théurgie, la nécromancie et le magnétisme artificiel. Tout n'est pas erreur ou mensonge dans ces pratiques ; mais il faut se défier de tout, car tout se passe dans une région où le bien et le mal sont mêlés et confondus.

Écoutons à ce sujet une belle lettre, écrite en 1797, au retour de Saint-Martin d'une excursion à Petit-Bourg et à Champlâtreux, et attestant des modifications profondes qui ont eu lieu dans les croyances du théosophe. Son peu discret adepte, l'ayant de nouveau assailli de toute une série de questions brûlantes, il lui dit:

« Je vous répondrai sur les différents points que vous m'engagez à éclaircir dans mes nouvelles entreprises. La plupart de ces points tiennent précisément à ces initiations par où j'ai passé dans ma première école, et que j'ai laissées depuis longtemps pour me livrer à la seule initiation qui soit vraiment selon mon cœur.

« Si j'ai parlé de ces points[-là] dans mes anciens écrits, ça été dans la verdeur [l’ardeur] de ma [cette] jeunesse et par l'empire qu'avait pris sur moi l'habitude journalière de les voir traiter et préconiser par mes maîtres et mes compagnons ; mais je pourrai, moins que jamais, pousser loin aujourd'hui quelqu'un sur cet [un] article ; vu que je m'en détourne de plus en plus. En outre, il serait de la dernière inutilité pour le public, qui, en effet, dans de simples écrits, ne pourrait recevoir là-dessus des lumières suffisantes... [p.322].

« Ces sortes de clartés doivent appartenir à ceux qui sont appelés directement à en faire usage, par l'ordre de Dieu et pour la manifestation de sa gloire. Et quand ils y sont appelés de cette manière, il n'y a pas à s'inquiéter de [sur] leur instruction, car ils reçoivent alors, sans aucune [difficulté et sans aucune] obscurité, mille fois plus de notions, et des notions mille fois plus sûres que celles qu'un simple amateur comme moi pourrait leur donner sur toutes ces bases. (Saint-Martin entend parler ici des fondateurs de religions, des prophètes et des apôtres).

« En vouloir parler à d'autres, et surtout au public, c'est vouloir en pure perte stimuler une vaine curiosité et [vouloir] travailler plutôt pour la gloriole [gloire] de l'écrivain que pour l'utilité du lecteur. Or, si j'ai eu des torts en ce genre dans mes (anciens) écrits, j'en saurais [aurais] davantage si je voulais persister à marcher de ce même pied. Ainsi, mes nouveaux écrits parleront beaucoup de cette initiation centrale qui, par notre union avec Dieu, peut nous [59] apprendre tout ce que nous devons savoir, et fort peu de l'anatomie descriptive de ces points délicats sur lesquels vous désireriez que je portasse ma vue. […]

« Sur le moyen de la plus prompte union de notre volonté avec Dieu, je vous dirai que cette union est une œuvre qui ne [se] peut se faire que par la ferme et constante résolution de ceux qui la désirent ; qu'il n'y a [nul] autre moyen sur cela que l'usage persévérant d'une volonté pure, nourrie [moins] par les œuvres et la pratique de toutes les vertus, engraissée (sic) par la [les] prière[s], pour que la grâce divine vienne aider notre faiblesse et nous amener [amène] au terme de notre régénération. […]

« Sur cet article, [Ainsi] vous voyez que ce que je pourrais dire [sur cet article] ou publier [au public] n'aurait sûrement [infailliblement] pas plus de crédit que n'en a eu la Parole divine. […].

« Sur l'union du modèle à la copie, je vous dirai que dans les opérations [générations] spirituelles de tout genre, cet effet doit vous paraître naturel et possible, puisque les images ayant des rapports avec leurs modèles, doivent toujours tendre à s'en approcher. C'est par cette voie que marchent toutes les opérations théurgiques [ou] s'emploient les noms des Esprits, leurs signes, leurs caractères ; toutes choses qui peuvent [pouvant] être données par eux, peuvent avoir des rapports entre [avec] eux. »

On voit encore une fois, parce qui précède et par ce qui suit, que Saint-Martin ne condamne pas la théurgie en général, qu'il a la sienne, et qu'il ne condamne que celle qui s'attache aux puissances de la région astrale.

« Quant à votre question sur l'aspect de la lumière ou de la flamme élémentaire pour obtenir les vertus qui lui servent de modèle, vous devez voir qu'elle entre absolument dans la théurgie, surtout dans la théurgie qui emploie la nature élémentaire, et comme telle je la crois inutile et étrangère à notre véritable théurgisme, où il ne faut d'autre flamme que celle de notre désir, d'autre lumière que celle de notre pureté.

« Cela n'interdit pas néanmoins les connaissances très profondes que vous pouvez puiser dans le Bœhme, sur le feu et ses correspondances. Il y a (là) de quoi vous payer de vos spéculations. »

A. P.

(La suite au prochain numéro].