1816Année 1816

Biographie moderne ou galerie historique 

   Article : Saint-Martin

Le spectateur belge

   Compte-rendu des livres de l'Abbé Le Franc

Lefranc, Le voile levé pour les curieux  suivi de la Conjuration contre la religion catholique

   Article : Des Martinistes

Picot - Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique pendant le dix-huitième siècle  

   Article : Saint-Martin


1816 - Biographie moderne ou galerie historique

Biographie moderne ou galerie historique, civile, militaire, politique, littéraire et judiciaire contenant les portraits politiques des Français de l’un et de l’autre sexe, morts ou vivants, qui se sont rendus plus ou moins célèbres depuis le commencement de la révolution jusqu’à nos jours, par leurs talents, leurs emplois, leurs malheurs, leur courage, leurs vertus ou leurs crimes.

Deuxième édition, revue, corrigée, considérablement augmentée, et ornée de cent cinquante portraits en taille-douce, à laquelle on a ajouté un Précis historique de tous les évènements qui se sont succédés depuis la convocation des Notables jusqu’au rétablissement de Sa Majesté Louis XVIII sur le trône de France

Tome troisième

Paris, chez Alexis Eymery, libraire, rue Mazarine, n° 30 ; 
Delaunay, Palais Royal, galerie de Bois ; 
Et à Mons, chez Leroux, libraire.

1816

Article Saint-Martin – page 226

SAINT-MARTIN (Louis-Claude de), chef de la secte des martinistes.

Il naquit à Amboise le 18 janvier 1743 d’une famille distinguée par ses services militaires, et devint lui-même lieutenant dans le régiment de Foix ; mais son amour pour le calme ne put s’accorder avec le tumulte des armes, et il obtint sa retraite après six ans de service. Il se mit alors à voyager, et vint à Lyon, où il resta trois ans solitaire et presque inconnu. Il se retira ensuite Paris, où sa vie paisible et obscure le mit à l’abri des fureurs de la révolution, qui le trouva impassible. Sans crainte comme sans passion, n’approuvant ni ne blâmant rien avec excès, son âme repliée: sur elle-même ne parut jamais oublier un moment les idées philosophiques qui lui étaient chères. Il mourut à Aunai, dans la maison du sénateur Lenoir la Roche, près de Sceaux, le 15 octobre 1803, à l’âge de soixante deux ans. Saint-Martin doit sa réputation au livre intitulé : Des Erreurs et de la Vérité, ou les Hommes rappelés au principe universel de la science: il parut en 1775, et a eu un grand nombre d’éditions. « C’est pour avoir oublié, dit l’auteur, les principes dont je traite, que toutes les erreurs dévorent la terre, et que les hommes ont embrassé une variété universelle de dogmes et de systèmes… Cependant, quoique la lumière soit faite pour tous les yeux, il est encore plus certain que tous les yeux ne sont pas faits pour la voir dans son éclat, et le petit nombre de ceux qui sont dépositaires des vérités que j’annonce, est voué à la prudence et à la discrétion, par les engagements les plus formels. Aussi me suis-je permis d’user de beaucoup de réserve dans cet écrit, et de m’y envelopper souvent d’un voile que les yeux les moins ordinaires ne pourront pas toujours percer, d’autant que j’y parle quelquefois de toute autre chose que de ce dont je parais traiter. » On sent qu’avec une pareille explication, on peut être obscur et inintelligible tout à son aise, et l’auteur, à cet égard, tient tout ce qu’il promet. Ses raisonnements, pour des lecteurs vulgaires, paraissent ceux d’un fou ; mais ses disciples, appelés martinistes du nom de leur maître, les révèrent comme ceux d’un sage. On a imprimé à Londres en anglais un ouvrage en deux volumes, comme une suite de celui de Saint-Martin ; mais celui-ci n'a eu aucune part, et cette prétendue suite, dit-on, n’a aucun rapport avec la base du système et les opinions de l’auteur. Saint-Martin a encore publié un volume, sous le titre : Tableau de l’ordre naturel, un peu moins obscur que le précédent, et qui a obtenu peu de succès.

  Biographie moderne ou galerie historique


1816 – Le spectateur belge 

Le spectateur belge

Ouvrage historique, littéraire, critique et moral

Par Léon De Foere

Tome sixième

Bruges
chez la Veuve De Moor et fils,
imprimeurs libraires,
rue Philip Stock, n° 18

M D CCC XVI (1816)

Compte-rendu de livres – Pages 271-274

Nous rangeons ces trois ouvrages à la suite de Louis XVI détrôné avant d'être roi, parce qu'ils appartiennent à la même classification. Le premier renferme des recherches fort curieuses sur l'origine de la Franc-maçonnerie, des détails sur les loges ou les assemblées maçonniques, sur leur régime et sur leurs cérémonies prodigieusement ridicules, sur le but de ces réunions et sur les engagements que l'on contracte en y entrant. L'auteur examine la funeste influence qu'a exercée la Franc-maçonnerie sur la révolution morale et politique de la France. En tout il faut un but, et il n'est point à supposer que l'ordre de la Franc-maçonnerie ait couvert les deux mondes de ses loges pour courir des chances aveugles. Il serait ridicule et téméraire de croire que tant d'êtres qui se réunissent et dont les réunions s'embranchent jusqu'aux antipodes, ne sont que des machines mues par les caprices d'une aveugle fatalité. Il faut leur supposer au moins quelqu'intelligence. L'auteur soutient [page 272] que les Francs-maçons se sont proposé un double but. Le premier consisterait à détruire la religion chrétienne (Chap, V), et à établir sur ses ruines la religion naturelle (Chap. VI). Dans un autre chapitre, il dévoile les efforts qu'ils ont faits pour abolir la hiérarchie ecclésiastique dans l'Église catholique. L'autre but consisterait à renverser le trône.

Nos petits maîtres-maçons, éléments de loges ou bâtardes ou insignifiantes, qui n'ont jamais été témoins que de quelques simagrées aussi vaines que ridicules, et qui n'ont jamais reçu dans leurs loges que des leçons de gastronomie, seront peut-être étonnés de ces effrayants projets. Cependant les raisonnements de l'auteur sont appuyés sur des preuves de fait dont la plupart né peuvent être désavouées par les Francs-maçons eux-mêmes, puisqu'elles sont tirées des instructions qu'on leur donne.

Dans le deuxième ouvrage : la Conjuration contre la religion catholique et les souverains, l'auteur montre cette religion aux prises avec tous les ennemis et avec tous les partis. Il y rapporte les extravagances et les convulsions dans lesquelles les hérétiques, les Francs-maçons, les Illuminés, les Jacobins et les Philosophes se sont agités de concert pour déclamer contre cette religion et pour la détruire. Il y examine l'astrologie de Dupuis et de La Lande, ou les doctrines de religion et de morale qu'au moyen de leurs télescopes ils crurent découvrir dans la voûte du ciel. Il passe en revue les visions de Zwédenbourg [sic], de St. Martin et de Mesmer, célèbres alchimistes en religion et en morale. Dans leur zèle cosmopolite et à l'aide de Mlle Labrousse, ils s'étaient proposé d'endoctriner le monde avec leur alchimie et leur magnétisme. Ils [page 273] trouvèrent des prosélites parmi les philosophes même, mais d'autres plaisantèrent beaucoup sur leur compte. Cela fît diversion dans le christianisme, et toutes les armes furent bonnes pourvu qu'on combattit sous les mêmes bannières.

L'auteur montre encore que ces divers perturbateurs de l'ordre social enveloppèrent dans leurs proscriptions tous les souverains. Dans leurs abstractions théoriques, ou en ne considérant le monde que d'un côté, ils virent toutes les choses ici-bas au niveau, et les rois ne pouvaient plus être que des tyrans.

J'ignore absolument ce que sont devenus aujourd'hui dans la considération publique tous ces pauvres diables d'Illuminés et de Francs-maçons, et jusqu'à quel point ils se moquent eux-mêmes de leurs momeries ; seulement j'ai observé dans les journaux que presque dans toute l'Allemagne on s'est vu obligé de suivre l'exemple qu'a donné le duc de Bavière il y a environ trente ans. On a réprimé leur turbulence en défendant, sous quelque dénomination que ce fût, toute réunion secrète. Ces messieurs étaient près de prendre les rênes des divers gouvernements de l'empire germanique ; et quelle punition en effet, quel fléau pour un peuple, selon l'opinion de Fréderic II lui-même, que d'être gouverné, comme aujourd'hui dans la Belgique, par des philosophes !1816 Baisse

On en est donc parvenus en l'Allemagne à exécuter envers ces assemblées secrètes et nocturnes, les mesures dont on a depuis longtemps démontré la nécessité. L'auteur consacre un chapitre entier à instruire les souverains sur ce sujet et à leur faire voir qu'il n'y aura jamais ni repos, ni bonheur dans les États tant qu'on les souffrira et encore moins quand on les protégera. L’ouvrage renferme des révélations curieuses sur [page 274] l’esprit, les principes et le but de tous ces conventicules anti-chrétiens. Il sera lu avec intérêt.

Le troisième ouvrage, l'Esprit de la Franc-maçonnerie, peut être regardé comme l'épilogue et le complément des deux autres. Il dévoile les dangers de la franc-maçonnerie et apprend quelles sont les devoirs religieux et civils de ceux qui sont Francs-maçons et de ceux qui ne le sont pas. L'auteur s'attache à prouver que la Franc-maçonnerie est contraire à la loi de Dieu, aux lois de l'Église et à celles de l'état. Nous croyons que cette dernière partie ne peut pas être établie d'une manière générale, et qu'elle ne peut concerner que les états où les assemblées des Francs-maçons sont défendues, à moins qu'on ne veuille insinuer que ce qui est contraire à la loi divine et aux lois de l'Église, devrait l'être aussi à celles de l'état.

bouton jaune   Compte-rendu de livres 


 1816 - Lefranc – Le voile levé pour les curieux

Le voile levé pour les curieux, ou Le secret de la révolution de France révélé à l'aide de la Franc-Maçonnerie ;

suivi de la Conjuration contre la religion catholique et les souverains dont le projet fut conçu en France pour être exécuté dans l’univers.

Ouvrage qui achève de démasquer les Francs-Maçons, et de confondre les Philosophes et les Sectaires de tous les genres, par l’Auteur du Voile levé par les curieux

Par Mr l’abbé François Lefranc, Supérieur des Eudistes de Caen, tombé sous la hache des assassins, à Paris, le 2 septembre 1792

Nouvelle édition

Paris, et se trouve à Liège, chez Duvivier, imprimeur libraire,
rue Vinâve d’île, n° 603
1816

Chapitre VIII – Des Martinistes – Pages 212-222

[p. 212] Cette secte, qui a pris son nom de Mr. de Saint-Martin, qu'elle reconnaît pour chef, n'a été pendant longtemps connue qu'à Avignon. C'était dans cette ville qu'elle tenait ses assemblées, et qu'on allait s'y faire recevoir. Les Parisiens y allaient en foule, et après s'être fait initier dans les secrets de cette secte, ils ont formé à leur tour des assemblées, premièrement [p. 213] hors de Paris, et ensuite dans le sein de cette capitale, où Mr. de Saint-Martin est venu enseigner sa doctrine. Plusieurs de ses prosélytes avaient déjà acquis une grande réputation par leurs talents, et ont beaucoup contribué à lui attirer des disciples. On distingue parmi eux, les Bert..., les d'Esp..., les év…, de B , la d.... de B des prêtres, des religieux, des philosophes, des célibataires, des femmes de tout rang. Son ton modeste, ses explications mystiques, ses visions, ses mœurs pures à l'extérieur, lui ont donné un grand crédit aux yeux de ceux qui se laissent prendre par les apparences.

On peut juger, par les ouvrages de Mr. de Saint-Martin, qu'il tient aux mystiques et aux illuminés. Le premier est intitulé : Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieul'homme et l'univers ; à Edimbourg, 1782. Le second a pour titre : Des erreurs et de la vérité, ou les hommes rappelés aux principes universels de la science ; Edimbourg, 1782.

 Lire l'article sur le site :  Chapitre VIII – Des Martinistes 


1816 - Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique pendant le dix-huitième siècle

Michel Pierre Joseph Picot

Seconde édition, considérablement augmentée

Tome quatrième

À Paris,
de l’imprimerie d’Adrien Le Clerc, 

1816

Saint-Martin, Page 609

12 octobre [1803]. — Louis-Claude de Saint-Martin, théosophe et chef d’école, naquit à Amboise en 1743, et mourut à Aulnay, près Châtillon. Ses partisans le célèbrent comme auteur de je ne sais quel système de spiritualité et de métaphysique inintelligible. Il l’a consigné dans plusieurs écrits, dont le plus fameux est intitulé : Des erreurs et de la vérité, par un philosophe inconnu, 1776, 3 volumes. C’est à l’occasion de ce livre que Voltaire écrivait à d’Alembert, le 22 octobre 1776 : Je ne crois pas qu’on ait jamais rien imprimé de plus absurde, de plus obscur, de plus fou et de plus sot. C’est ainsi que Voltaire qualifiait ce galimatias, où il est difficile de rien comprendre. L’auteur admet deux principes des choses, un bon et un méchant. Selon, lui, l’homme était autrefois sans corps et dans un état de délices ; il a perdu ces avantages en allant de quatre à neuf; il les retrouvera en revenant de neuf à quatre. A travers les calculs et les abstractions, l’obscurité et les bizarreries du philosophe inconnu et très digne de l’être, perce le dessein de refaire le monde, de ramener l’homme vers son état primitif, de le rendre à la nature, et de réaliser des rêves qui seraient trop dangereux, s’ils n’étaient souverainement absurdes. Saint-Martin est encore auteur de l’Eclair sur l’association humaine, 1797; de l’Esprit des choses, 1800 ; de l’Homme de désir, 1802 ; de la Lettre sur la révolution, I795, du Nouvel homme, 1796, du Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l’homme et l’univers, 1782; de l’Aurore naissante, traduite de Jacques Boehm, 1800 ; et du Ministère de l’homme esprit, 1802. Il y a beaucoup d’affinité entre les rêveries de Saint-Martin et celles de Swedemborg [sic], et l’on ne saurait s’étonner que les auteurs de systèmes si absurdes aient trouvé des disciples.

  Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique pendant le dix-huitième siècle