1822 Bernard opuscules1822 - Opuscules théosophiques

auxquels on a joint une défense des Soirées de S.-Pétersbourg

par un ami de la sagesse et de la vérité [Jean-Jacques Bernard]

Paris
Migneret, imprimeur-libraire
20, rue du Dragon
1822

Ce livre cite trois fois Louis-Claude de Saint-Martin et publie un acrostiche ainsi que divers extraits des ouvrages de cet auteur :
- Extrait, page 11-12
- Acrostiche, page 12
- Extraits des ouvrages de Saint-Martin, page 12-18
- Extrait, p.128

Extrait, page 11-12

Nous croyons pouvoir citer à l'appui de ces allégations , quelques fragments tirés des ouvrages d'un Théosophe que la France doit s'honorer d'avoir vu naitre et qu'elle appréciera mieux dans un temps qui n'est pas éloigné; je veux parler de M. Saint-Martin: il mourut en 1805 [sic pour 1803], à la maison de campagne du sénateur Lenoir-Laroche. Ses principaux ouvrages ont été traduits en allemand, en anglais et en russe : au-dessus de toute influence, amant, passionné de la vérité, il vécut pour elle et semble en avoir été toujours l'organe et le digne interprète.

L'étonnante Mme de Staël-Holstein , dans son intéressant ouvrage sur l'Allemagne, où elle jette un coup d’œil approbateur sur la doctrine théosophique, prouve qu'elle sut l'apprécier.

M. le comte de Maistre lui rend une justice plus éclatante dans l'ouvrage si important qui a couronné ses travaux : on peut assurer même sans crainte de se tromper, que la solution de toutes les questions importantes traitées dans les Soirées de Saint-Pétersbourg ou Entretiens sur le Gouvernement temporel de la Providence est puisée dans les principes ou les écrits de M. Saint-Martin. On est loin de penser au surplus par cette assertion, porter atteinte à la réputation méritée de M. le comte de Maistre, dont l'ouvrage a excité une si vive sensation parmi les philosophes, les savants, les gens du monde et les journalistes ; sans doute il s'élèvera de la foule, des amis de la vraie science, qui, [page 12] l'aideront à faire triompher la cause sacrée qu'il défend avec une éloquence égale à son immense érudition.

Acrostiche, page 12

« Voici un acrostiche qui fut fait à l'époque de la mort de Saint-Martin , et qui caractérise assez bien ce vrai sage :

Sa profonde sagesse excitera les hommes1807 sm acrostiche
A suivre les sentiers de l'aimable vertu,
Il se plut à prouver dans l'exil où nous sommes
Notre haute origine.... et tant qu'il a vécu
Terrassa les erreurs de la philosophie.
Maître doux et modeste, il consacra ses soins
A ranimer pour Dieu le zèle des humains :
Respectons sa mémoire en imitant sa vie.
Tes œuvres, ô grand homme ! en ces jours ignorés,
Illustreront ton nom et feront mieux connaître
Notre religion et ses livres sacrés. »

L. G. G.

Cet acrostiche a été publié dans le 1er tome des Œuvres posthumes de L.-Cl. de Saint-Martin (1808), page XXXII

Extraits des ouvrages de Saint-Martin, page 12-18

[Nous avons mis entre crochets et en italique les quelques modifications rencontrées par rapport aux œuvres originales de Saint-Martin, ainsi que les pages d'où sont extraites ces citations.]

Les paragraphes suivants, extraits de divers ouvrages de Saint-Martin , et qui signalent d'une manière assez précise les abus et l'insuffisance de la fausse philosophie, m'ont semblé pouvoir appuyer mon texte.

« Les savants du siècle [Les ignorants de ce monde] dans qui les sciences humaines ont effacé toute idée de nos rapports avec Dieu, croient remplir toute la tâche qui nous est imposée en s'occupant de l'étude et de l'observation de ses ouvrages dans l'anatomie, dans la physique dans la chimie, dans l'histoire naturelle, et dans tous les autres objets de nos spéculations. Ils ne voient pas combien ils se trompent sur le mot ; ils croient étudier [page 13] les œuvres de Dieu en se livrant à tant de recherches sur ces objets ; mais ils ne savent pas que ce ne sont pas les corps qui sont véritablement les œuvres de Dieu, ils ne sont que les œuvres de sa toute-puissance [les œuvres de ses puissances]. Ce sont les âmes, qui étant directement les œuvres de la divinité, sont en effet le principal objet de notre réflexion, et c'est en les étudiant soigneusement que nous pourrons [croire] remplir les intentions du Créateur sur nous, parce que nous trouvons, dans cette étude, à [nous] éclairer sur notre origine, sur notre nature et sur nos semblables ; tandis que l'étude des corps ne nous apprend rien de tout cela. Aussi que devient le moral de ceux qui se concentrent dans cette étroite carrière ! » [Œuvres posthumes, 1807, t. 1 [pages 240-241]

« Tout l'enseignement des maîtres en littérature, ne me parait pas nous avancer davantage dans le véritable esprit des belles-lettres, que l'enseignement des docteurs en histoire naturelle ne nous avance dans la connaissance de la nature. La science des uns et des autres se borne à des nomenclatures et à nous apprendre, les uns, dans quelle classe on doit ranger telle ou telle production de la pensée des écrivains ; les autres, dans quelle classe on doit ranger telle plante, et telle ou telle production minérale, animale, etc. Ce n'est pas de savoir les noms factices des êtres, ni la place que nous devons leur donner qui est important, mais c'est de savoir d'où ils viennent, où ils vont, et ce qu'ils viennent faire en se montrant à nos yeux. » (Œuvres posthumes, t. 1 [pages 198-199])

« Dieu est tout. L'esprit est la langue de Dieu : la science est la langue de l'esprit; les doctes ne [page 14] devraient être que la langue de la science, mais les savants vulgaires ne me paraissent en être que comme les écriteaux ; encore malheureusement dans ces écriteaux-là y a-t-il nombre de fautes d'orthographe. » (Même Ouv. [p.199-200])

« Si Dieu est un être moral et spirituel, ne doit-il pas  avoir dans toutes ses œuvres un but spirituel et moral ?
» Pouvons-nous donc, sans être insensés, avoir un autre objet dans la recherche et dans l'étude de ses ouvrages, qu’un objet sage, moral et spirituel ; et, y chercher autre chose, ne serait-ce pas y chercher ce qui n'y serait point et ce que nous n'y pourrions pas trouver ?
» Savants du siècle, que deviennent donc ces destinations vagues et bornées qui vous semblent avoir présidé à l'origine de la nature, puisque vous les poursuivez si ardemment dans son cours ? Quels fruits votre sagesse, votre moralité, votre spiritualité retirent-elles de toutes ces causes secondaires et mortes, que vous étudiez dans les corps ? Si Dieu a eu un but moral dans ses ouvrages, demandez-le donc à la cause finale de ces mêmes ouvrages, et non à leur structure qui ne les connaît pas et qui ne saurait vous l'apprendre.
» Ne niez pas Dieu, ne niez pas le principe [nombre] de votre âme, et ne dites pas qu'un but moral dans les œuvres de Dieu vous soit inutile à connaître : c'est au contraire le seul qu'il vous soit possible de découvrir, et dont la connaissance vous soit profitable ; pourquoi contraindre votre intelligence de vous conduire par des mensonges à des blasphèmes? [page 15]
» Pour vous, âmes de désir, apprenez ici à vous estimer. Si le terme final de tous les êtres est un but moral, des nuages [épais] peuvent couvrir [aujourd’hui] encore les plans de la destination universelle ; mais nous n'en devons pas moins avoir un but moral dans tout le cours immortel de notre être. » (L'Homme de désir. Paris, 1820 [chant 111])

« Ne sais-tu pas que la nature avait été accordée à l'homme pour lui servir de miroir où il pourrait voir la vérité ? Ne sais-tu pas que les philosophes et les savants se sont emparés de ce miroir, et que, le frappant à grands coups, ils l'ont brisé ? puis, ils vous disent : Venez-y lire.... mais qu'y pourrons-nous lire ? les objets de tout genre que nous regarderons ne paraîtront-ils pas remplis de brisures et de difformités qui nous les rendent [rendront] méconnaissables ?
» Préserve-toi de ces instructions mensongères, elles te conduiraient à briser aussi dans toi un miroir plus précieux encore, et tu ne reconnaitrais plus le soleil sacré qui darde ses rayons jusque dans ton sein pour que tu répandes autour de toi la lumière et la douce chaleur de ton Dieu.» (L'Homme de désir. [chant 69])

 Début de l'ouvrage intitulé : Des Erreurs et de la Vérité.

« L'ouvrage que j'offre aux hommes n'est point un recueil de conjectures, ce n'est point un système que je leur présente, je crois leur faire un don plus utile. Ce n'est pas néanmoins la science même que je viens leur apporter : je sais trop que ce n'est pas de l'homme que l'homme doit l'attendre : c'est seulement un rayon de leur propre flambeau que je [page 16] ranime devant eux, afin qu'il les éclaire sur les idées fausses qu'on leur a données de la vérité, de même que sur les armes faibles et dangereuses que des mains mal sûres ont employées pour la défendre.
» J'ai été vivement affecté, je l'avoue, en jetant les yeux sur l'état actuel de la science ; j'ai vu combien les méprises l'ont défigurée, j'ai vu le voile hideux dont on l'a couverte, et pour l'intérêt de mes semblables, j'ai cru qu'il était de mon devoir de l'arracher.
» Sans doute que pour une telle entreprise il me faut plus que des ressources ordinaires ; mais sans m'expliquer sur celles que j'emploie, il suffira de dire qu'elles tiennent à la nature même des hommes, qu'elles ont toujours été connues de quelques-uns d'entre eux depuis l'origine des choses, et qu'elles ne seront jamais retirées totalement de dessus la terre tant qu'il y aura des êtres pensants.
» C'est là où j'ai puisé l'évidence et la conviction des vérités dont la recherche occupe tout l'univers.
» Après cet aveu, si l'on m'accusait d'enseigner une doctrine inconnue, on ne pourrait pas au moins me soupçonner d'en être l'inventeur, puisque, si elle tient à la nature des hommes, non-seulement elle ne vient pas de moi, mais même il m'eût été impossible d'en établir solidement aucune autre.» [pages I-II]

« Sciences divines, intellectuelles et physiques, devoirs civils et naturels de l'homme, arts, législation, établissements et institutions quelconques, tout rentre dans l'objet dont je m'occupe. Je ne crains point même de dire que je regarde cet examen comme une [page 17] obligation pour moi; parce que si l'ignorance et l'obscurité où nous sommes sur ces points importants ne sont pas de l'essence de l'homme, mais l'effet naturel de ses premiers écarts et de tous ceux qui en sont provenus, il est de son devoir de chercher à retourner vers la lumière qu'il a abandonnée ; et si ces connaissances étaient autrefois son apanage, elles ne sont point entièrement perdues pour lui, puisqu'elles découlent sans cesse de cette source inépuisable où il a pris naissance. En un mot, 'si malgré l'état d'obscurité où il languit, l'homme peut toujours espérer d'apercevoir la vérité, s'il ne lui faut pour cela que des efforts et du courage, ce serait la mépriser que de ne pas faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous en rapprocher. » [page 69]

« Heureux néanmoins si sa faiblesse était l'unique cause de ses méprises ! [...] Mais ses erreurs prennent encore leur source dans sa volonté déréglée ; on voit que, loin d'employer à son avantage les forces qui lui restent, il les dirige trop fréquemment contre la loi de son être. [...] C'est de sa propre main qu'il se met le bandeau sur les yeux ; alors, n'entrevoyant plus la moindre clarté, le désespoir ou la frayeur l'entraînent, et il se jette lui-même dans des sentiers dangereux qui l'éloignent à jamais de sa véritable route. [...] En sorte que, consumant ses jours dans des efforts inutiles et vains, on doit peu s'étonner que ses travaux ne produisent aucuns fruits ou ne laissent après eux qu'amertume. [page 18]
» Toutefois, lorsque je rappelle ici les écarts et la marche inconsidérée de mes semblables, je suis bien éloigné de vouloir les avilir à leurs propres yeux ; le plus ardent de mes vœux au contraire serait qu'ils ne perdissent jamais de vue la grandeur dont ils sont susceptibles : puissé-je au moins y contribuer en essayant de faire évanouir devant eux les difficultés qui les arrêtent, en excitant leur courage et leur montrant la voie qui mène au but de leurs désirs ! » [pages 2-3]

(Des Erreurs et de la Vérité, ou les hommes rappelés au principe universel de la Science, etc. Par le Philosophe inconnu.) [Saint-Martin]

Il existe un autre ouvrage du même théosophe, moins profond peut-être et non moins intéressant, intitulé : Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l'homme et l'univers. Celui de l'Esprit des choses ne se trouve plus ; il sera réimprimé ainsi que la Lettre à un ami sur la révolution française, qui s'est trouvée prophétique.

Extrait, p.128

La prière , dit Saint Martin, est la "respiration de l'ame". Cette expression n'est sublime que parce qu'elle est vraie. La vie est incréée, et Dieu seul la possède ; formées, organisées pour la recevoir de lui, toutes les créatures la respirent par différents modes suivant la classe où elles sont placées. La vie animale s'alimente, à chaque seconde, du feu vital ; l'amour, ce feu spirituel qui est l'essence de l'ame, a besoin de se nourrir aussi , et de puiser à la source qui ne tarit point le complément de la vie... [...] La prière n'est pas, il me semble, présentée par M. de Maistre comme le moyen unique de réhabilitation

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