Calendrier perpetuel 1845Année 1845

- Barré - Nouvelle biographie classique - Saint-Martin

- Cazotte-Nerval - Le diable amoureux

- Franck – Dictionnaire des Sciences Philosophiques - Article Dieu

- Lalanne – Curiosités littéraires - De quelques idées bizarres et singulières

- Le magasin pittoresque - Saint-Martin, le Philosophe inconnu  & Pensées de Saint-Martin

- Stanislas Bellanger - La Touraine, ancienne et moderne

 

Article publié le 9 novembre 2020, mis à jour le 2 janvier 2025


1845 – Barré - Nouvelle biographie classique

Nouvelle biographie classique, contenant jusqu’à l’année 1840, la liste des principaux personnages de tous les pays, ainsi que leurs actions et leurs ouvrages les plus remarquables,
Par M. Louis Barré, professeur de philosophie.
Troisième édition
Paris, librairie de Firmin Didot frères, imprimeurs de l’Institut, rue Jacob, 56.
1845.

Saint-Martin (p.17)

SAINT-MARTIN (Louis-Claude de), dit le Philosophe inconnu, né à Amboise en 1743, étudia le droit, puis obtint une lieutenance dans le régiment de Foix. Mais, entraîné vers le mysticisme par la lecture d’un livre d’Abbadie, il donna sa démission, et se fit initier à la secte des Martinistes, fondée par Martinès Pasqualis. Il a publié un grand nombre d’ouvrages, dont le spiritualisme touche aux doctrines des prétendus illuminés. Le premier fut le plus célèbre est intitulé Des erreurs et de la vérité. Il meurt en 1804 [sic].

 Source :  Nouvelle biographie classique - Article Saint-Martin


1845 – Franck – Dictionnaire des Sciences Philosophiques

Dictionnaire des Sciences Philosophiques
Par une Société de professeurs et de savants
Tome deuxième
Paris
Chez L. Hachette et Cie, libraires de l’université royale de France, rue Pierre Sarrazin, 12
1845

 Article Dieu, extrait p.122

Cependant ce n'est pas la raison seule qui nous révèle l'existence de Dieu: le sentiment en est une autre preuve, mais beaucoup plus variable et plus obscure. En effet, n'est-il pas vrai, quand des passions basses ou des besoins grossiers n'arrêtent pas l'essor de nos facultés, que nous éprouvons un besoin d'aimer et d'admirer, un amour du bien et du beau que rien d'imparfait ni de fini ne peut satisfaire? D'où nous viendrait un pareil sentiment, sinon de celui qui est lui-même le beau et le bien dans leur essence, ou la source inépuisable de toute admiration et de tout amour ? Cette preuve est précisément celle que le mystique saint Martin, dans son livre de l'Esprit des choses, et plusieurs autres philosophes de son école, par exemple François Baader, ont recommandée comme la plus simple à la fois, et la plus inattaquable. Mais elle remonte beaucoup plus haut : déjà Platon en a consacré l'usage dans sa théorie de l'amour, en nous représentant l'amour et la dialectique comme les deux ailes sur lesquelles notre âme s'élève à la contemplation de l'absolu. Ce que nous disons du beau et du bien s'applique aussi à l'infini ; en d'autres termes, nous avons le sentiment de l'infini comme nous en avons l'idée. Quel autre sens donnerions-nous à ces émotions mystérieuses, à ce respect indéfinissable que la vue de la nature nous fait éprouver au milieu de la solitude et du silence? Comment expliquer autrement cette terreur en quelque sorte innée de l'invisible et de l'inconnu qui poursuit tous les hommes, qui a pesé d'un si horrible poids sur les premiers peuples, et que la voix de la raison parvient si difficilement à maîtriser? C'est un fait remarquable, que dans l'antiquité païenne tant de riches et de bizarres fictions n'aient pas pu suffire à ce sentiment, et qu'on ait imaginé, au-dessus de toutes les divinités de l'Olympe et de l'enfer, une puissance inconnue, indéfinissable, inaccessible aux dieux comme aux hommes, le Destin (Voyez ce mot).

 Source : Dictionnaire des Sciences Philosophiques, Article Dieu


1845 – Lalanne – Curiosités littéraires

Curiosités littéraires
Bibliothèque de poche par une société de gens de lettres et d’érudits
Par Ludovic Lalanne
Paris. Paulin, libraire éditeur, rue Richelieu, 60
1845

De quelques idées bizarres et singulières - Extrait, p.219

[…]

Le célèbre visionnaire Saint-Martin, surnommé le Philosophe inconnu, avait sur les premiers hommes des idées tout à fait différentes de celles de la Bible. Suivant lui, « l'homme avait autrefois une armure impénétrable ; il était muni d'une lame composée de quatre métaux, et qui frappait toujours en deux endroits à la fois; il devait combattre dans une forêt formée de sept arbres, dont chacun avait seize racines et quatre cent quatre-vingt-dix branches ; il devait occuper le centre de ce pays ; mais s'en étant éloigné, il perdit sa bonne armure pour une autre qui ne valait rien ; il s'était égaré en allant de quatre à neuf, et il ne pouvait se retrouver qu'en revenant de neuf à quatre. » [Des Erreurs et de la Vérité, Edimbourg, 1775, p.35]

Citons encore quelques exemples des explications et interprétations extravagantes auxquelles ont donné lieu l'Ancien et le Nouveau Testament.

 Source : Curiosités littéraires : De quelques idées bizarres et singulières


1845 – Cazotte - Nerval

Le diable amoureux : roman fantastique
Par Jacques Cazotte
Précédé de sa vie, de son procès et de ses prophéties et révélations par Gérard de Nerval
Illustré de 200 dessins par Édouard de Beaumont
Paris. Léon Ganivet, éditeur, 12, rue des Cordiers Sorbonne
1845 - 192 pages - Le diable amoureux

Le diable amoureux, extrait p. XXIII-XXVI

… Cazotte dut être d'autant plus porté à réparer la faute qui lui était signalée, que ce n'était pas peu de chose alors que d'encourir la haine des illuminés, nombreux, puissants, et divisés en une foule de sectes, sociétés et loges maçonniques, qui se correspondaient d'un bout à l'autre du royaume. Cazotte, accusé d'avoir révélé aux profanes les mystères de l'initiation, s'exposait au même sort qu'avait subi l'abbé de Villars, qui, dans le Comte de Gabalis, s'était permis de livrer à la curiosité publique, sous une forme à demi sérieuse, toute la doctrine des rose-croix sur le monde des esprits. Cet ecclésiastique fut trouvé un jour assassiné sur la route [XXIV] de Lyon, et l'on ne put accuser que les sylphes ou les gnomes de cette expédition. Cazotte opposa d'ailleurs d'autant moins de résistance aux conseils de l'initié qu'il était naturellement très porté à ces sortes d'idées. Le vague que des études faites sans méthode répandaient dans sa pensée, le fatiguait lui-même, et il avait besoin de se rattacher à une doctrine complète. Celle des martinistes, au nombre desquels il se fit recevoir, avait été introduite en France par Martinez Pasqualis, et renouvelait simplement l'institution des rites cabalistiques du onzième siècle, dernier écho de la formule des gnostiques, où quelque chose de la métaphysique juive se mêle aux théories obscures des philosophes alexandrins. [XXV]

L'école de Lyon, à laquelle appartenait dès lors Cazotte, professait, d'après Martinez, que l'intelligence et la volonté sont les seules forces actives de la nature, d'où il suit que, pour en modifier les phénomènes, il suffit de commander fortement et de vouloir. Elle ajoutait que, par la contemplation de ses propres idées et l'abstraction de tout ce qui tient au monde extérieur et au corps, l'homme pouvait s'élever à la notion parfaite de l'essence universelle et à cette domination des esprits dont le secret était contenu dans la Triple contrainte de l'enfer, conjuration toute puissante à l'usage des cabalistes du moyen âge.

Martinez, qui avait couvert la France de loges maçonniques selon son rite, était allé mourir à Saint-Domingue ; la doctrine ne put se conserver pure, et se modifia bientôt en admettant les idées de Swedemborg et de Jacob Boehm, qu'on eut de la peine à réunir dans le même symbole. Le célèbre Saint-Martin, l'un des néophytes les plus ardents et les plus jeunes, se rattacha particulièrement aux principes de ce dernier. [XXVI] A cette époque l'école de Lyon s'était fondue déjà dans la Société des Philalèthes, où Saint-Martin refusa d'entrer, disant qu'ils s'occupaient plus de la science des âmes, d'après Swedemborg, que de celle des esprits, d'après Martinez.

Plus tard, parlant de son séjour parmi les illuminés de Lyon, cet illustre théosophe disait : « Dans l'école où j'ai passé il y a vingt-cinq ans, les communications de tout genre étaient fréquentes; j'en ai eu ma part comme beaucoup d'autres. Les manifestations du signe du Réparateur y étaient visibles : j'y avais été préparé par des initiations. Mais, ajoute-t-il, le danger de ces initiations est de livrer l'homme à des esprits violents; et je ne puis répondre que les formes qui se communiquaient à moi ne fussent pas des formes d'emprunt. »

Le danger que redoutait Saint Martin fut précisément celui où se livra Cazotte, et qui causa peut-être les plus grands malheurs de sa vie. Longtemps encore ses croyances furent douces et tolérantes, ses visions riantes et claires; ce fut dans ces quelques années qu'il composa de nouveaux contes arabes qui, longtemps confondus avec les Mille et une Nuits, dont ils formaient la suite, n'ont pas valu à leur auteur toute la gloire qu'il en devait retirer.

Extrait, page LII

Saint-Martin, le plus illustre d'entre eux, est un spiritualiste chrétien à la manière de Malebranche. Nous avons dit plus haut qu'il avait déploré l'intervention d'esprits violents dans le sein de la secte lyonnaise. De quelque manière qu'il faille entendre cette expression, il est évident que la société prit dès lors une tendance politique qui éloigna d'elle plusieurs de ses membres. Peut-être a-t-on exagéré l'influence des illuminés tant en Allemagne qu'en France, mais on ne peut nier qu'ils n'aient eu une grande action sur la révolution française et dans le sens de son mouvement. Les sympathies monarchiques de Cazotte l'écartèrent de cette direction et l'empêchèrent de soutenir de son talent une doctrine qui tournait autrement qu'il n'avait pensé.

Extrait, page LIV-LV

Une femme âgée, grande et majestueuse, la marquise de la Croix, veuve d'un grand seigneur espagnol, faisait partie de la famille et y exerçait une influence due au rapport de ses idées et de ses convictions avec celles de Cazotte. C'était depuis longues années l'une des adeptes [LV] de Saint-Martin, et l'illuminisme l'unissait aussi à Cazotte de ces liens tout intellectuels que la doctrine regardait comme une sorte d'anticipation de la vie future. Ce second mariage mystique, dont l'âge de ces deux personnes écartait toute idée d'inconvenance, était moins pour madame Cazotte un sujet de chagrin, que d'inquiétude conçue au point de vue d'une raison tout humaine touchant l'agitation de ces nobles esprits. Les trois enfants, au contraire, partageaient sincèrement les idées de leur père et de sa vieille amie.

  Source : - Cazotte - Nerval : Le diable amoureux


1845 - Le magasin pittoresque

Le magasin pittoresque, rédigé, depuis sa fondation, sous la direction de
M. Édouard Charton
Treizième année
1845
Paris, aux bureaux d’abonnement et de vente, 29, quai des Grands Augustins
M DCCC XLV

Tome XII, n° 23, p.178

« Les faiblesses retardent, les passions égarent, les vices exterminent. »

Saint-Martin
[Portrait historique et philosophique de Mr de Saint-Martin, fait par lui-même, dans Œuvres posthumes, T. I. Tours, 1807, p.101, §780].

  SourceLe magasin pittoresque, Tome XII, n°23


1845 - Le magasin pittoresque, Tome XII, n° 42 p.330-332

Le magasin pittoresque, rédigé, depuis sa fondation, sous la direction de M. Édouard Charton
Treizième année - 1845
Paris, aux bureaux d’abonnement et de vente, 29, quai des Grands Augustins - M DCCC XLV

Saint-Martin, le Philosophe inconnu

Louis-Claude de Saint-Martin est né le 18 janvier 1743 à Amboise. On a peu de détails sur sa famille. Il a écrit : « J'ai une belle-mère, à qui je dois peut-être tout mon bonheur, puisque c'est elle qui m'a donné les premiers éléments de cette éducation douce, attentive et pieuse, qui m'a fait aimer de Dieu et des hommes. » Il fut envoyé, vers l'âge de dix ans, au collège de Pont-le-Voy. De toutes ses lectures pendant son cours d'humanités, une seule eut sur lui une sérieuse influence : L'Art de se connaître soi-même, par d'Abbadie. Ses études terminées, après avoir passé quelques années dans sa famille, il se fit d'abord recevoir, suivant le vœu de son père, avocat du roi au siège présidial de Tours. Mais ces fonctions l'attristèrent ; elles exigeaient d'ailleurs une application et une activité soutenues qui lui laissaient à son gré trop peu de temps pour l'étude de la philosophie : il les abandonna. Toutefois, son père désirant le voir engagé dans une profession positive, il choisit la carrière militaire. À l'âge de vingt-deux ans, il entra comme lieutenant au régiment de Foix qui était en garnison à Bordeaux. Plusieurs officiers de ce régiment étaient affiliés à une association théosophique, dirigée par Martinez Pasqualis. Saint-Martin ne tarda pas à se faire initier aux formules et aux pratiques de cette secte, qui avait son origine en Allemagne. Dès ce moment, sa vocation fut décidée ; et tout en s'appliquant avec ardeur à l'étude des mathématiques et à celle des langues anciennes et modernes, il fixa pour but principal de ses travaux la recherche de la vérité dans la voie mystique où il s'était engagé. Il considéra l'enseignement de ce qu'il croyait être la seule science véritablement utile, comme la seule affaire importante de sa vie. « Excepté mon premier éducateur Martinez Pasqualis, a-t-il dit plus tard, et mon second éducateur Jacob Bœhm, mort il y a cent cinquante ans, je n'ai vu sur la terre que des gens qui voulaient être maîtres et qui n'étaient pas même en état d'être disciples. » Il dit ailleurs : « Il y a plusieurs probabilités que ma destinée a été de me faire des rentes en âmes ; si Dieu permet que cette destinée-là s'accomplisse, je ne me plaindrai pas de ma fortune : cette richesse-là en vaut bien d'autres. » Après la mort de Pasqualis, l'école fut transportée à Lyon. Saint-Martin, qui demeura quelques années dans cette ville, y professa ses principes à la loge de la Bienfaisance. Il y composa son premier ouvrage. « C'est à Lyon, dit-il, que j'ai écrit le livre des Erreurs et de la Vérité. Je l'ai écrit par désœuvrement et par colère contre les philosophes (sous ce nom, Saint-Martin comprend les philosophes qui nient la divinité et qui appartiennent particulièrement à l'école sensualiste). Je fus indigné de lire dans Boulanger que les religions n'avaient pris naissance que dans la frayeur occasionnée par les catastrophes de la nature. Je composai cet ouvrage vers l'an 1774, en quatre mois de temps et auprès du feu de la cuisine, n'ayant pas de chambre où je pusse me chauffer. » En 1778, l'école de Pasqualis vint se perdre à Paris dans la franc-maçonnerie, et Saint-Martin cessa d'être au nombre de ses disciples.

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1845 - Le magasin pittoresque - Tome XII, n° 45 p.357-359

Le magasin pittoresque, rédigé, depuis sa fondation, sous la direction de M. Édouard Charton
Treizième année - 1845
Paris, aux bureaux d’abonnement et de vente, 29, quai des Grands Augustins - M DCCC XLV

Pensées de Saint-Martin, extraites de ses Œuvres posthumes

(Voy., sur la vie et les œuvres  de Saint-Martin, le Philosophe inconnu, p. 330 [article précédent])

Je me disais dans ma jeunesse : Fais en sorte d'être assez heureux pour n'être jamais content que de ce qui est vrai.

Dans une circonstance critique de ma vie, où j'avais des torts, je me dis avec assurance : La vraie manière d'expier ses fautes, c'est de les réparer, et pour celles qui sont irréparables, de n'en être point découragé.

[358] Si, en présence d'un homme honnête, des hommes absents sont outragés, l'honnête homme devient de droit leur représentant.

Avant de nous livrer à des actes importants, nous aurions trois conseils à consulter : 1° si nous pouvons ; 2° si nous voulons ; 3° si nous devons. Malheureusement, presque toujours, ce sont les circonstances qui nous tiennent lieu de volonté ou de désirs, et ce sont nos volontés ou nos désirs qui nous tiennent lieu de devoirs.

Le monde frivole passe sa vie dans une chaîne de néants qui se succèdent et qui lui ôtent jusqu'aux moyens de s'apercevoir qu'il y ait une vérité, de même que la capacité de la saisir. Le plus grand nombre des femmes et des hommes qui leur ressemblent sont comme des enfants qui regardent tout, qui crient à la moindre contradiction, mais qui n'ont d'autre force que celle de crier, et qu'il faut défendre de tout, parce que la peur et l'impuissance sont leurs éléments constitutifs.

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1845.Bellanger1845 - Stanislas Bellanger - La Touraine, ancienne et moderne

La Touraine, ancienne et moderne,

Stanislas Bellanger

L. Mercier, 1845 - 614 pages

Saint-Martin

SAINT-MARTIN (Louis-Claude de), né à Amboise, le 18 janvier 1743. Sorti du collège de Pont-le-Voy, où il avait fait de brillantes études, il entra dans la magistrature, el fut reçu avocat du roi au présidial de Tours ; mais il quitta bientôt la robe pour suivre le métier des armes. A 22 ans, il faisait partie du régiment de Foret [sic pour Foix Infanterie] en qualité d'officier. Sa passion pour l'étude se développant chaque jour, il aspira à voyager pour agrandir ses connaissances, et ayant obtenu sa retraite, après cinq années de service, il parcourut les principales parties de l'Europe dont il avait appris les langues ; il visita l'Angleterre, l'Italie, l'Allemagne et la Suisse. Il avait déjà publié son premier et son meilleur ouvrage, celui qui a pour titre des Erreurs et de la Vérité, et quoique la métaphysique n'en paraisse pas très-simple et très-claire, ce livre, par cela même peut-être, lui fit un grand nombre de partisans. Saint-Martin mourut le 14 octobre 1804.

  Source : 1845 - La Touraine, ancienne et moderne : Saint-Martin