Dans son livre, Louis Moreau consacre le deuxième chapitre à la critique des deux articles de Louis Binaut dans la Revue des Deux-Mondes (1858-1861) : Joseph de Maistre Ce qu’il est, ce qu’il devient.

Nous insérons ici des extraits de ces deux articles qui ont trait à Louis-Claude de Saint-Martin.

1858 - Revue des Deux-Mondes (1er décembre 1858)

1858 revue 2mondesM. Binaut – Joseph de Maistre – Ce qu’il est et ce qu’il devient

Mémoires politiques et Correspondances diplomatique de Joseph de Maistre publiés par M. Albert Leblanc. Extrait, page 627

Les renseignements nous manquent pour remonter sûrement aux influences qui, dès avant la révolution, avaient dû préparer son esprit [il s’agit de Joseph de Maistre]à ces vues plus larges, si étrangères jusqu'alors aux lettres françaises. On sait qu'il avait été membre d'une loge maçonnique qui fut suspecte et dissoute quand les premiers troubles menacèrent son pays. Il est peu probable que ces loges fussent, au moins dans leur tendance, parfaitement exemptes de l'esprit novateur. Au moins avait-il une haute idée des disciples de Saint-Martin, qu'il appelle des « chrétiens exaltés, » dont le christianisme annonçait des « mystères ineffables, nullement inaccessibles à l'homme. » Il reconnaît leur piété, et il est, dit-il, si fort pénétré des livres et des discours de ces hommes-là, qu'il ne leur est pas possible de placer dans un écrit quelconque une syllabe qu'il ne reconnaisse. » Aussi n'est-il pas difficile de discerner en lui, à toutes les époques, plus d'une de leurs empreintes. Ce qu'il blâme surtout chez eux, c'est leur dédain pour la hiérarchie, le caractère individuel de leur doctrine, et cela se comprend; il était, lui, homme d'autorité, et conformément à la tradition universelle il voulait une doctrine instituée, un sacerdoce.

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1860 - Revue des Deux-Mondes (15 août 1860)

1860 revue 2mondesLouis Binaut, Lamennais et sa philosophie. Extrait page 806

Il fut donc du petit nombre de ceux qui, après la grande révolution française, comprirent d'une part qu'on n'en avait point fini avec la théologie, et d'autre part eurent l'intuition obscure, imparfaite, mais certaine, d'un nouvel état des âmes dans l'ordre religieux. Comme Saint-Martin, de Maistre, Bonald, ces hommes que la philosophie opposée n'avait pas compris, qu'elle avait même quelque peu persiflés. Lamennais avait pressenti un besoin d'élargissement de la pensée croyante; mais c'est de Joseph de Maistre qu'il relève le plus directement sur les points principaux. Froissés par les événements extérieurs de la révolution, Lamennais et de Maistre l'ont tous deux haïe, mais en même temps ils en ont reçu le contre-coup intellectuel à des profondeurs qu'ils ignoraient eux-mêmes.

 

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