1849 – Willm - Histoire de la philosophie allemande depuis Kant jusqu'à Hegel - T 4

18849 Willm t4Histoire de la philosophie allemande depuis Kant jusqu'à Hegel
Joseph Willm, inspecteur de l’Académie de Strasbourg, correspondant de l’Institut
Ouvrage couronné par l’Institut (Académie des sciences morales et politiques)
Tome quatrième
Paris. Librairie philosophique de Ladrange, quai des Grands Augustins, 19
Strasbourg, chez Treutel et Würte, libraires, grand’rue, 13
1849 - T 4 - Philosophie dissidente et indépendante - Chapitre II – Solger de François Baader

Philosophie dissidente et indépendante - Chapitre II – Solger de François Baader

Extrait, page 408

Tandis que Solger semble tout rapporter à l'idée du beau, François Bander est surtout remarquable comme philosophe religieux. Il fut en Allemagne, avec Gœrres et Windischmann, un des principaux représentants de ce qu'on est convenu en France d'appeler l'École catholique; il appartient plus spécialement à l'école mystique de Jean Scot Érigène, de Jacob Bœhme, de Saint-Martin, de Ballanche. Il est a la fois plein de zèle et de tolérance, ami de la lumière et du mystère, croyant et rationaliste. Il rebute d'abord le lecteur par un langage souvent obscur et embarrassé, mêlé de mots étrangers et de provincialismes ; mais il gagne à être connu, et intéresse par une instruction très variée et par une foule d'aperçus neufs et spirituels. Nous devons nous contenter de le caractériser d'une manière générale, principalement comme théologien philosophe.

Extrait, page 413

François Baader cite à cette occasion ce passage presque hégélien de Saint-Martin : «C'est sur la terre que se prépare la substance qui sert de base et de premier degré à la régénération ou a la renaissance de tous les êtres de l'univers. »

Extrait, page 415-416

François Baader cite, sur les traditions bibliques, avec trop de complaisance, les interprétations ingénieuses, mais trop souvent hasardées de Saint-Martin et de Jacob Bœhme. Il admet avec eux partout, à côté du sens littéral, un sens allégorique. Il appelle l'attention des théologiens sur la doctrine exposée par Saint-Martin dans les écrits intitulés : L’Esprit des choses et le Ministère de l’homme-esprit, touchant les prophètes, sur sa théorie des sacrifices et du culte. Il est parfaitement d'accord avec ce théosophe sur l'idée de la solidarité de tous les hommes pour le salut commun et le rétablissement universel, ou, comme il l'appelle, la restauration du genre humain par la religion: idée grande et généreuse, indiquée dans le Zend-Avesta et qui n'est point étrangère au christianisme.

Selon François Baader, un défaut capital de l'interprétation ordinaire de l'Écriture, c'est de ne pas saisir l'histoire sainte de l'humanité dans son ensemble, comme une évolution successive tendant à une même fin. L'histoire de l'univers, considérée du point de vue de Saint-Martin et de Baader, forme trois grandes périodes, celle de la création de l'homme, celle de sa chute et de sa rédemption, et celle du rétablissement universel. « Quand le chaos de la nature se débrouilla, dit Saint-Martin, l'homme parut comme étant l'organe de la vérité pour l'administration de l'univers; quand le chaos spirituel où l'homme coupable s'était plongé, fut dissipé, le réparateur se montra comme étant la vie de l'esprit et le suprême agent de notre délivrance et de notre régénération. » [Le nouvel homme, 1796, Volume 1, p.155] Les six jours de la création, ajoute Baader, la création tout entière n'a eu d'autre but que de rendre possible l'avènement de l'homme. Ensuite tout le mouvement universel, ainsi que [p.416] l'histoire de l'humanité, a eu pour unique fin la venue du Sauveur. Enfin, depuis sa résurrection, la création tout entière et les hommes travaillent a préparer la seconde venue du Christ et l'aurore du sabbat éternel.

Extrait, page 630

Les idées spéculatives de Fr. Baader comptent un bon nombre d'amis, assez dévoués pour entreprendre, à l'exemple des disciples de Hegel et de ceux de Krause, la publication de ses œuvres. Elle se composera de quatorze volumes, dont dix doivent reproduire les ouvrages déjà imprimés, et quatre renfermer des écrits inédits, avec la correspondance et la biographie de l'auteur. Les premiers seront classés sous les rubriques suivantes : Théorie de la connaissance, Philosophie fondamentale, Philosophie de la nature, Philosophie de l'esprit, Philosophie sociale, Philosophie religieuse et Aphorismes. Dans la seconde division on trouvera des observations sur Jacob Bœhme, sur Saint-Martin, sur saint Thomas d'Aquin, etc.

XVIII. François Baader

(Addition à la page 408.) p.630

François Baader, qui mourut en 1841, professeur de théologie spéculative à l'université de Munich, où il avait vu le jour en 1765, était le frère cadet du célèbre mécanicien Joseph Baader, mort en 1835. A l'âge de sept ans, il eut des accès de somnambulisme, et à la suite d'une fièvre cérébrale il perdit toute envie d'apprendre et se montra longtemps d'un esprit très borné. Après quelques années cependant, étant tombé par hasard sur les Éléments d'Euclide, il se fit en lui un changement inespéré ; il sembla se réveiller d'une sorte de songe; il s'était retrouvé lui-même. Il étudia et pratiqua quelque temps la médecine; mais il la quitta bientôt pour se vouer à la métallurgie. Il alla passer trois ans à l'école des mines de Freiberg, où il se lia beaucoup avec le célèbre minéralogiste Werner. Il visita ensuite les mines de la Grande-Bretagne. A son retour en Bavière, il fut placé à la tête de l'exploitation des mines de ce pays, et nommé membre de l'Académie des sciences de Munich. Lors de la création d'une université dans cette capitale, Fr. Baader y prit sa place comme professeur de dogmatique spéculative, chaire créée exprès pour lui et en quelque sorte par lui-même. Les idées spéculatives de Fr. Baader comptent un bon nombre d'amis, assez dévoués pour entreprendre, à l'exemple des disciples de Hegel et de ceux de Krause, la publication de ses œuvres. Elle se composera de quatorze volumes, dont dix doivent reproduire les ouvrages déjà imprimés, et quatre renfermer des écrits inédits, avec la correspondance et la biographie de l'auteur. Les premiers seront classés sous les rubriques suivantes : Théorie de la connaissance, Philosophie fondamentale, Philosophie de la nature, Philosophie de l'esprit, Philosophie sociale, Philosophie religieuse et Aphorismes. Dans la seconde division on trouvera des observations sur Jacob Bœhme, sur Saint-Martin, sur saint Thomas d'Aquin, etc.