2e article : De l'état des Sociétés secrètes à l’époque de la Révolution (suite)
L’Avant-Garde, n°51, 16 décembre 1893, p.8.
» Lacorne et ses adhérents mirent ce repos à profit et obtinrent l'appui du duc de Luxembourg (16 juin t 1731) (1. : Amiable et Colfavru, op. cit.). Forts de cet appui, ils réussirent à rentrer dans la Grande Loge d'où ils avaient été bannis, firent nommer une commission de contrôle dont les membres leur étaient acquis d'avance. En même temps, les frères du rite Templier (Conseil des Empereurs) s'associent en secret aux menées des commissaires et, le 24 décembre 1772, un véritable coup d'État maçonnique est accompli par la suppression de l'inamovibilité des présidents des Loges et par l'établissement du régime représentatif. Des révoltes victorieuses fondèrent ainsi le Grand Orient de France. Aussi un maçon contemporain a-t-il pu écrire : « Il n'est pas excessif de dire que la révolution maçonnique de 1773 fut le prodrome et l'avant-coureur de la Révolution de 1789 (2. : Ragon. Orthodoxie Mac., p. 56). »
» Ce qu'il faut bien remarquer, c'est l'action secrète des frères du rite Templier. Ce sont eux les vrais fomentateurs des révolutions, les autres ne sont que de dociles agents.
» Ainsi, le lecteur peut maintenant comprendre notre assertion : le Grand Orient est issu d'une insurrection.
Nous avons dit que les faits auxquels s'attachent surtout les historiens n'étaient, le plus souvent, que des conséquences d'actions occultes. Or, nous pensons que la Révolution n'eût pas été possible si des efforts considérables n'avaient été prudemment faits pour orienter dans une nouvelle voie l'intellectualité de la France. C'est en agissant sur les esprits cultivés, créateurs de l'opinion, qu'on prépare l'évolution sociale, et nous allons trouver maintenant une preuve péremptoire de ce fait.
Le 24 juin 1740, le duc d'Antin, grand maître de la Franc-Maçonnerie pour la France, prononçait un important discours dans lequel était annoncé le grand projet en cours ; témoin l'extrait suivant :
« Tous les grands maîtres en Allemagne, en Angleterre, en Italie et ailleurs, exhortent tous les savants et tous les artisans de la confraternité de s'unir pour fournir les matériaux d'un dictionnaire universel des arts libéraux et des sciences utiles, la théologie et la politique seules exceptées. On a déjà commencé l'ouvrage à Londres ; et, par la réunion de nos confrères, on pourra le porter à sa perfection dans peu d'années.