1835 - Balzac – Le livre mystique 

1835 livre mystiqueLe livre mystique par M. [Honoré] de Balzac
Les Proscrits – Histoire intellectuelle de Louis Lambert (Extrait des Études Philosophiques)
Tome I – Paris - Werdet, libraire éditeur. 49, rue de Seine St Germain
1er décembre 1835 - http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k912358

Le livre mystique a été édité en 1836 à Bruxelles, chez J. P. Meline, libraire éditeur. Cette édition comporte, incorporé, les deux tomes. Toutefois, la pagination n’est pas la même puisque, dans le tome I, les Proscrits sont placés après Louis Lambert.
Ainsi, au tome I, les extraits de la Préface se trouvent pages XI et XIV ; de Louis Lambert, pages 16 ; ceux des Proscrits, page 231-232.
Au tome II, les extraits de Séraphita  page 114. http://books.google.fr/books?id=s5fSVRvz4tUC

1839 - Le lys dans la vallée
Une nouvelle édition paraît en 1839 à Paris, chez Charpentier, libraire éditeur. 6, rue des beaux-arts. - https://books.google.fr/books?id=z_sFAAAAQAAJ

Préface - Extrait, pages IV-VI

… L'auteur proteste ici de son respect pour les grands génies dont s'honore [p.V] la science humaine ; il adore la ligne droite, il aime encore malheureusement un peu trop la courbe ; mais s'il s'agenouille devant les gloires des mathématiques et devant les miracles de la chimie; il croit, si l'on admet l'existence des Mondes Spirituels , que les plus beaux théorèmes n'y sont d'aucune utilité, que tous les calculs du fini sont caducs dans l'infini, que l'infini devant être comme Dieu, semblable à lui-même en toutes ses parties, la question de l'égalité du rond et du carré doit s'y trouver résolue, et que cette possibilité devrait donner l'amour du ciel aux géomètres. Remarquez bien encore qu'il n'a pas l'impiété de contester l'influence des mathématiques sur le bonheur de l'humanité prise en masse ; thèse soutenue par Swedenborg et Saint-Martin. Mais trop de gens s'avanceront à la défense des Saintes Sciences de l'homme, trop peu prendront intérêt aux lointaines clartés du Mysticisme, pour que l'auteur ne soit pas ici du parti le plus faible, au risque de se voir l'objet de ces plaisanteries, espèce de timbre que la presse [p.VI] périodique met en France à toute idée nouvelle, et qui, heureusement, rencontrent en lui la plus dure de toutes les cuirasses humaines , le mépris.

Extrait, page VIII-IX

… Le mysticisme que vous trouvez là dominant la société, [p.IX] sans que la cour de Rome s'en inquiétât parce qu'alors la belle et sublime Rome du moyen âge était omnipotente, fut transmis à madame Guyon, à Fénelon et mademoiselle Bourignon par des auteurs allemands, entre lesquels le plus illustre est Jacob Bœhm. Puis, au dix-huitième siècle, il a eu dans Swedenborg un évangéliste et un prophète dont la figure s'élève aussi colossale peut-être que celles de saint Jean, de Pythagore et de Moïse. M. Saint-Martin, mort dernièrement, est le dernier grand écrivain mystique. Il a donné partout la palme à Jacob Bœhm sur Swedenborg ; mais l'auteur de Séraphita accorde à Swedenborg une supériorité sans contestation possible sur Jacob Bœhm aux œuvres duquel il avoue n'avoir rien pu comprendre encore.

Les proscrits - Extrait, page 39

Pour comprendre ce siècle extraordinaire, l’esprit qui en dicta les chefs-d’œuvre inconnus aujourd’hui, quoique immenses, enfin pour s’en expliquer tout jusqu’à la barbarie, il suffit d’étudier les constitutions de l’Université de Paris, et d’examiner l’enseignement bizarre alors en vigueur. La Théologie se divisait en deux Facultés, celle de THÉOLOGIE proprement dite, et celle de DÉCRET. La Faculté de Théologie avait trois sections : la Scolastique, la Canonique et la Mystique. Il serait fastidieux d’expliquer les attributions de ces diverses parties de la science, puisqu’une seule, la Mystique, est le sujet de cette étude. La THÉOLOGIE MYSTIQUE embrassait l’ensemble des révélations divines et l’explication des mystères. Cette branche de l’ancienne théologie est secrètement restée en honneur parmi nous. Jacob Bœhm, Swedenborg, Martinez Pasquallis, Saint-Martin, Molinos, mesdames [p.40] Guyon, Bourignon et Krudener, la grande secte des extatiques, celle des illuminés, ont, à diverses époques, dignement conservé les doctrines de cette science, dont le but a quelque chose d’effrayant et de gigantesque.

Louis Lambert - Extrait, pages 106-107

La baronne de Staël, bannie à quarante lieues de Paris, vint passer plusieurs mois de son exil dans une terre située près de Vendôme. Un jour, en se promenant, elle rencontra, sur la lisière de son parc, l'enfant du tanneur, presque en haillons, et absorbé par un livre. Ce livre était une traduction du Ciel et de l'Enfer. A cette époque, MM. Saint-Martin, de Gence et quelques autres écrivains français, moitié allemands, étaient à peu près les seules personnes qui dans l'empire français connussent le nom de Swedenborg. Étonnée, madame de Staël prit le livre avec cette brusquerie [p.107] dont ses interrogations, ses regards et ses gestes n’étaient pas toujours exempts, et lançant un coup d’œil à Lambert : — Est-ce que tu comprends cela ? lui dit-elle.

— Priez-vous Dieu? demanda l'enfant
— Mais… oui.
— Et le comprenez-vous ?

La baronne resta muette pendant un moment ; puis elle s’assit près de Lambert, et se mit à causer avec lui….

Tome II - Séraphita - Extrait, pages 156-157

Le livre mystique par M. [Honoré] de Balzac - Séraphita. (Extrait des Études Philosophiques)
Tome II  
Paris - Werdet, libraire éditeur. 49, rue de Seine St Germain
1er décembre 1835 - http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k91236m

… L’Agneau est la grande figure des Anges méconnus et persécutés ici-bas. Aussi Christ a-t-il dit : Heureux ceux qui souffrent !Heureux les simples !Heureux ceux qui aiment ! Tout Swedenborg est là : Souffrir, Croire, Aimer. Pour bien aimer, ne faut-il pas avoir souffert, et ne faut-il pas croire ? L’Amour engendre la Force, et la Force donne la Sagesse ; de là, l’Intelligence; car la Force et la Sagesse comportent la Volonté. Être intelligent, n’est-ce pas Savoir, Vouloir et Pouvoir, les trois attributs de l’Esprit Angélique ? — Si l’univers a un sens, voilà le plus digne de Dieu ! me disait monsieur Saint-Martin que je vis pendant le voyage qu’il fit en Suède. — Mais, monsieur, reprit monsieur Becker après une pause, que signifient ces lambeaux pris dans l’étendue d’une œuvre dont [p.157] on ne peut donner une idée qu’en la comparant à un fleuve de lumière, à des ondées de flammes ?