1862 – Revue chrétienne

1862 revue chretienneRevue chrétienne

Recueil mensuel
Neuvième année

Paris
Bureau de la Revue
À la librairie de Ch. Meyrueis et Compagnie
174, rue de Rivoli

1862

Mélanges - F. Lichtenberger : Un apologète chrétien du dernier siècle
Mathias Claudius, Le messager de Wandsbeck.

Extrait, pages 31-32

1862 revue chretienne ClaudiusClaudius revint à Wandsbeck, guéri et moralement fortifié. Les épreuves avaient à la fois mûri et rasséréné son caractère. Il avait senti que [page 32] sa véritable vocation était de rester l'humble et fidèle messager de la foi, et d'annoncer par tout pays les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière. Quel plus grand bonheur pouvait-il y avoir pour lui que celui de montrer à ses contemporains la source des divines consolations et de la divine force qui jaillit d'une foi vivante au Sauveur. Il se remit donc avec courage à l'œuvre : il réunit et publia dans huit recueils successifs, de 1765 à 1812, ses anciens articles et y ajouta quelques nouveaux. Le nombre des souscripteurs, surtout au commencement, fut très considérable. De plus, Claudius obtint, grâce à des protecteurs bienveillants, une pension du roi de Danemark, Frédéric V, qui le chargea même dans la suite d'un emploi de contrôleur à la banque d'Altona, qui était une véritable sinécure. Enfin il prit chez lui quelques fils de famille dont on lui confia l'éducation.

Déchargé dès lors des poignants soucis de la vie matérielle, entouré de ses huit enfants et d'un cercle choisi d'hôtes et d'amis, Claudius reprit son existence paisible, égayée par les surprises et les fêtes que son génie inventif savait multiplier, et dans lesquelles le sentiment religieux occupait toujours la première place. Claudius s'abandonnait sans scrupule à l'enjouement qui lui était propre dans ce cercle intime du foyer domestique il y goûtait les joies les plus pures. Son intérieur nous offre le véritable type de la maison chrétienne en Allemagne, avec son caractère grave et respectueux, ses innocentes joies, son charme naïf.

Les travaux littéraires occupaient Claudius sans l'absorber; il produisait lentement et à ses heures ; jamais il n'écrivait pour satisfaire son amour-propre d'auteur, ni même pour subvenir aux besoins de la vie journalière ; il aurait cru déshonorer sa plume en en faisant un gagne-pain. C'est ainsi que dans les traductions qu'il a faites il n'a jamais consulté le goût du public, mais le sentiment de ce qu'il croyait être son devoir. Nous ne citerons, parmi ses ouvrages traduits du français, que les Œuvres spirituelles de Fénelon, et le livre Des erreurs et de la vérité de Saint-Martin.

bouton jaune Mathias Claudius, Le messager de Wandsbeck


1862 revue chretienne articleSaint-Martin et le mysticisme en France, vers 1800

Ce long article, écrit par Adolphe Schæffer (1826-1896) dans la Revue chrétienne, a paru en 3 fois :

- Dans le  numéro 9 du 15 décembre 1862 (pages 780-782) pour les 3 premières parties (I-III)
- Dans le numéro 10 du 15 janvier 1863 (pages 38-45) et comporte la partie IV en totalité et une partie de la partie V.
- Dans le numéro 10 du 15 février 1863 (pages 65-79) et comporte la suite de la 5e partie jusqu'à la fin (suite de V ; VI, VI, VIII).

L'auteur a repris l'ensemble de cet article dans son livre Mélanges d'histoire et de littérature en 1873 (pages 259-310). C'est cet ouvrage que nous suivons, mais nous mettrons, dans le texte, les références des articles de la Revue chrétienne.

Nous avons ajouté, [entre crochets], des titres et des sous-titres pour permettre une lecture agréable. Nous avons également mis entre crochets, les diverses références des textes cités de Louis-Claude de Saint-Martin, quand cela a été possible de les retrouver.

Le titre de cet article

SAINT- MARTIN ET LE MYSTICISME EN FRANCE VERS 1800

est un long commentaire du livre de Jacques Matter :

Saint-Martin, le philosophe inconnu, sa vie et ses écrits, son maître Martinez et leurs groupes, d'après des documents inédits par M. MATTER, conseiller honoraire de l'Université de France, etc. 1 vol. in-8° de XII-460 pages. Paris, chez Didier, 1862.

Le PHILOSOPHE INCONNU. C'est ainsi que s'intitulait volontiers le comte de Saint-Martin, un peu ironiquement, je m’imagine. Aujourd'hui, j'en demande pardon à Saint-Martin et je l'en félicite, aucun de ces deux termes ne saurait convenir pour le désigner.

Inconnu ? Saint-Martin ne l'est plus. Il eût souri d'aise, le tendre et un peu vaniteux rêveur d'Amboise, s'il eût pu voir à l'œuvre, en Allemagne et en France, des littérateurs tels que Chateaubriand et Madame de Staël, M. de Maistre et M. de Baader, Cousin et Sainte-Beuve étudiant ses œuvres, essayant d'initier le monde aux vaporeuses conceptions de son esprit, jetant son nom à tous les vents de la publicité. L'un de ces critiques l'appelle « un homme d'un grand mérite, d'un caractère noble et indépendant, dont les idées (quand elles étaient [page 260] explicables étaient élevées et d'une nature supérieure. » « L'estime, dit-il encore, s'attachera toujours à sa mémoire. » [Chateaubriand, Mémoire d’outre-tombe, p. 303] Il suffirait de moins que ces paroles de Chateaubriand pour tirer un auteur des rangs obscurs où la célébrité ne pénètre point.

Mais ce n'est point dire encore que Saint-Martin ait été philosophe. A vrai dire, je doute qu'il l'ait été. Il n'a point connu cette rigoureuse méthode des bons esprits qui, appuyés sur l'observation et l'induction, partent sagement de l'examen des faits, soit physiques, soit moraux, pour s'élever insensiblement à la connaissance des lois générales qui régissent le monde. Le mysticisme a été toute sa philosophie, et il n'est point sûr que les philosophes sérieux consentent jamais à tendre au mysticisme une main fraternelle.

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