Calendrier perpetuel 1862Année 1862

- Louis-Claude de Saint-Martin - La correspondance inédite de L.C. de Saint-Martin avec Kirchberger, baron de Liebistorf
- Annales de philosophie chrétienne : Littérature catholique : Lettres de Madame Swetchine
- Bulletin de la Société littéraire de Strasbourg : Le surnaturel et la critique du dix-huitième siècle
- Cantu - Histoire universelle – T 17 & 19
- Chassay – Conclusion des démonstrations évangéliques
- Hoefer – Didot –– Nouvelle biographie générale : Martines Pasqually
- Le Courrier du Bas-Rhin - Matter, Saint-Martin à Strasbourg (1788-1791)
- Le Normant - Coppet et Weimar NEW
- Matter – Saint Martin. Le philosophe inconnu
- Revue des Deux Mondes – T 40
- Saint-Albin – Les Francs-Maçons
- Sainte-Beuve - Portraits littéraires
- Veuillot - Historiettes et fantaisies
- Falloux – Lettres de Mme Swetchine
- Lemoine - L'âme et le corps
- Revue spiritualiste : Bibliographie — Saint-Martin, sa vie, ses écrits, son maître Martines et leurs groupes, par M. Matter
- Revue d’Alsace : Trois articles sur le livre de Matter
- Revue chrétienne :  - Mathias Claudius, Le messager de Wandsbeck - Ad. Schaeffer : Saint-Martin et le mysticisme en France, vers 1800

Article publié le 10 juillet 2021 - Mise à jour le 29 décembre 2022


1862 SM correspondance1862 La correspondance inédite de L.-C. de Saint Martin dit le philosophe inconnu, et Kirchberger, baron de Liebistorf, membre du Conseil souverain de la République de Berne

Du 22 mai 1792 jusqu'au 7 novembre 1797
Ouvrage recueilli et publié par
Louis Schauer [de Marckolsheim] et Alphonse Chuquet, éditeurs propriétaires des Nombres et de l’Éclair sur l’Association humaine
Amsterdam. Van Bakckenes et Cie, libraires-édit.
Leipzig. J.-A. Brockaus, libraire-éditeur
Saint-Pétersbourg. Dufour et Cie, libraires
La Haye. Belinfante frères, libraires-éditeurs
Paris
E. Dentu, libraire éditeur, Palais Royal, galerie d’Orléans, n° 13
1862

Lettre de Sainte-Beuve

Monsieur L. SCHAUER, homme de lettres, à Paris.

J'ai, Monsieur, à vous remercier beaucoup d'avoir pensé à moi pour me faire lire cet écrit de Saint-Martin. J'ai toujours eu pour lui beaucoup de vénération et ressenti de l'attrait, quoique je sois des plus profanes en ces matières.

Je vois que, grâce à vous et à M. Matter, je vais en apprendre sur lui davantage.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de ma considération la plus distinguée.

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1862 - Annales de philosophie chrétienne

1862 annales philo chretienneAnnales de philosophie chrétienne
Recueil périodique destiné à faire connaître tout ce que les sciences humaines renferment de preuves et de découvertes en faveur du Christianisme
Par une société de littérateurs et de savants, français et étrangers
Sous la direction de M. Augustin Bonnety
Trente troisième année
Cinquième série – Tome VI n° 31 – 1862. (65e vol. de la coll.)
Paris. Bureau des Annales de philosophie chrétienne, rue de Babylone, n° 10 (faubourg Saint Germain).
1862

Numéro 34 – Octobre 1862 – Littérature catholique : Lettres de Madame Swetchine - Extrait, pages 259-260

Il est un philosophe qui s'est fait quelque renom à la fin du siècle dernier par une espèce de spiritualité mystique qui a séduit plus d'un catholique; c'est celui que l'on a surnommé le philosophe inconnu, ayant nom Saint-Martin. Ses Pensées firent assez de bruit. Voici comment Mme Swetchine juge ce philosophe et ce mystique :

A M. Louis Moreau. — Chantilly, 8 octobre 1837.

« ... J'ai lu avec grand plaisir Les Pensées du philosophe inconnu, et comme il arrive toujours, j'ai fait mon choix dans votre choix. Plusieurs d'entre elles m'ont paru élevées, intérieures et profondes, vraies par conséquent; car on ne peut monter haut ni creuser fort avant, sans entamer une des deux régions de la vérité : les perfections de Dieu et la misère de l'homme. Néanmoins, en parcourant les Pensées, on croit quelquefois traverser comme des couches d'erreur, reconnaître quelque chose de son souffle, du goût de son terroir; on sent qu'elles n'ont pas été dictées par la piété pure et simple, mais par une théosophie toujours un peu glorieuse. Aussi c'est Saint-Martin qui a trouvé Dieu, et non pas Dieu qui a visité Saint-Martin. Son action sur les autres assume une puissance personnelle; l'orgueil perce jusque dans son effroi de la corruption, dans son éloignement pour ceux dont les ignorances, les faiblesses et les souillures le frappent. Tout ceci ressemble peu à la charité, qui ménage ceux-là mêmes dont elle se sépare; et lorsqu'on y voit si clair sur les autres, je craindrais fort qu'on ne réservât les ténèbres pour soi. Il n'est pas jusqu'aux mots recherchés ou techniques de son langage, quelquefois bizarre, qui, selon moi, n'arrêtent et ne refroidissent. Nulle part peut-être la simplicité des formes n'importe davantage [260] à la rectitude des idées que dans la piété ; il se fait sécheresse, aridité subite, là où l'esprit prévaut sur le cœur ; et si les prodiges de la charité chrétienne se concentrent presque exclusivement dans l'Eglise, il faut convenir que c'est aussi seulement dans son sein que l'amour chrétien a son expression vraie et persuasive (t. II, p. 83). »

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1862 - Bulletin de la Société littéraire de Strasbourg

1862 bulletin strasbourgBulletin de la Société littéraire de Strasbourg
Tome premier
Veuve Berger-Levrault et fils, libraires éditeurs
Paris, rue des Saints Pères, 8
Strasbourg, rue des Juifs, 26
1862

Le surnaturel et la critique du dix-huitième siècle.   Extrait, page 345

On a vu un jeune contemporain de Swedenborg, Claude de Saint-Martin, subir trois transformations essentielles: l'une au collège, l'autre à Bordeaux, la troisième à Strasbourg : la première sous l'influence d'Abbadie ; la seconde sous celle de Martinez Pasqualis ; la troisième sous celle de Jacques Bœhme. Chacune d'elles se borna à une nouvelle manière de voir, venue à la suite de nouvelles études. Ici [Il s’agit de Swedenborg ] il s'agit d'une transformation plus radicale : d'une influence plus puissante que celle d'un maître humain, j'entends une action divine. En effet il s'agit d'un autre maître qu'un homme, d'une autre mission et d'autres conséquences : d'un changement d'organisme dans toutes les facultés et d'une série de révélations prolongées pendant vingt-sept ans.

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Extrait, page 360

Sa mission [Jane Leade], non moins vaste que celle de mademoiselle Bourignon, celle de madame Guyon, celle de Swedenborg ou celle de Saint-Martin (voy. notre Vie de Saint-Martin, p. 425), était de faire luire, la lumière dont Dieu l'avait éclairée non-seulement sur cette centaine d'initiés qui se rattachait à elle et à son ami, mais sur «toutes les nations des quatre coins de la terre. »

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Extrait, page 362

Je n'ai pas parlé de John Wesley, qui chassa aussi les démons et rivalisa avec le comte de Zinsendorf dans le grand art d'enchaîner le sentiment mystique à des règles très méthodiques. Je n'ai pas même parlé du plus illustre des disciples de Jacques Bœhme, de ce singulier général Gichtel, qui, à genoux dans son cabinet, battait les armées de Louis XIV à Ramillies et à Hochstett, et dont j'ai parlé suffisamment dans la Vie de Claude de Saint-Martin.

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Extrait, pages 394-395

On sait les prétentions de Philon à l'illumination, et celles de Montanus à sa nature et à sa mission de paraclet. On connaît les légendes des disciples de Plotin sur l'intuition divine de celui-ci et sur le commerce auquel ils prétendaient avec les démons et les démonides ou les esprits féminins. J'ai fait ailleurs l'histoire des ambitions gnostiques, et chacun connaît les révélations ou les visions, les ravissements et les extases des saints de nos premiers siècles ou des saintes du moyen âge. Nous avons rappelé ci-dessus celles des mystiques et des théosophes de l'ère moderne, et raconté spécialement les hautes aspirations des Pasqualis, de Saint-Martin, du comte d'Hauterive, du conseiller d'Eckarthausen et de l'abbé Fournie, les uns cherchant le commerce avec les esprits, les autres jouissant de quelques apparitions. Mais tout cela, depuis les gnostiques jusqu'aux plus merveilleuses visions du jour, est peu de chose auprès de celles que Swedenborg nous fait connaître dans son Journal, et de ce qu'il écrit dans ses nombreux ouvrages sur ses entretiens célestes.

Aussi les résultats qu'il obtint et l'influence qu'il exerça sur son siècle dépassèrent-ils tout ce qu'ont fait les personnages que nous venons de nommer, et pour apprécier définitivement ce grand phénomène, il faut mettre le jugement de l'histoire à côté de celui de la philosophie. Le nombre des sectateurs d'une doctrine ne prouve rien, il est vrai, en faveur de sa vérité, et la philosophie ne reconnaît pas le vote par assis et levé. S'il en était autrement, si la vérité était du côté de la majorité, le bouddhisme serait le système de la raison, puisqu'il compte plus de partisans que tout autre.

Toutefois, le succès est quelque chose, et il est juste de dire, en terminant notre appréciation d'un personnage aussi exceptionnel, que Swedenborg, qui ne fit rien pour organiser un parti, eut peu d'années après sa mort une nombreuse postérité de partisans enthousiastes, de véritables [page 395] fidèles, en un mot qu'on vit surgir l'église dont il avait prédit l'avènement.

Si, en face d'un résultat pareil, le métaphysicien est encore embarrassé sur la solution de la question, à savoir si Swedenborg fut ou un rêveur somnambulique ou un halluciné extraordinaire ou un extatique dupe de ses visions, l'homme de simple bon sens répond sans hésiter, qu'aucune de ces hypothèses n'est une solution; que tout effet veut une cause proportionnée à sa grandeur; que c'est là une loi aussi impérieuse dans le monde moral que dans le monde physique; qu'une œuvre aussi extraordinaire accomplie en plein dix-huitième siècle, au sein de la critique la plus décidée, accuse des facultés ou une condition d'esprit hors ligne, de quelque nature qu'on dise celle-ci et quelque portée qu'on veuille assigner à celles-là.

Matter.

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1862 - Cantu - Histoire universelle – T 17

1862 Cantu t17Histoire universelle
Par César Cantu
traduite par Eugène Aroux, ancien député, et Piersilvestro Léopardi, revue par MM. Amédée Renée, Baudry, Chopin, Dehèque, Delatre, Lacombe et Noël des Vergers.
Troisième édition, entièrement refondue par l’auteur, revue et traduite d’après la huitième et dernière édition italienne par M. Lacombe sous les yeux de l’auteur
Tome dix-septième
Paris, chez Firmin Didot frères, fils et Cie, imprimeurs de l’Institut de France, rue Jacob, 56.
1862

Livre XVII. Dix-septième époque. Chapitre XX. Esprit et littérature en Allemagne - Illuminés westphaliens – Extrait, page 453

Martinez Pasqualis, juif portugais renégat, avait introduit en Allemagne une théosophie cabalistique, dont plusieurs loges s'étaient établies en France après l'année 1754 ; elles se répandirent au delà du Rhin ; les adeptes furent appelés martinistes, et le fameux Saint-Martin était du nombre. Les Rose-croix, qui considéraient ceux qui n'étaient pas affiliés comme; de « misérables esclaves du fanatisme et de la ténébreuse superstition, continuaient aussi d'exister. »

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Illuminés westphaliens – Extrait, page 455

… Mendelson soutint l'immortalité de l'âme, et popularisa Platon. Frédéric Jacobi réfuta le matérialisme et le scepticisme de Hume, et il montra dans son roman de Woldemer, l'incapacité des réformateurs de l'époque. Le poète Mathias Claudius déclara la guerre aux rationalistes, et fit connaître le mystique Saint-Martin. Stolberg, converti au catholicisme, donna une histoire de l'Église, qui devint le livre à la mode.

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Livre XVII. Dix-septième époque. Chapitre XXXVI. Louis XVI - Turgot – Necker. Extrait, page 746

Telle était la singularité de ce siècle qu'au moment où l'incrédulité était en vogue, où l'on regardait presque tous les liens comme des chaînes, où la philosophie traitait de préjugés toutes les anciennes croyances et toutes les vieilles coutumes, une grande partie de ces jeunes et nouveaux sages s'engouait, les uns de la manie des illuminés, des doctrines de Swedenborg, de Saint-Martin, de la communication possible entre les hommes et les esprits célestes, tandis que beaucoup d'autres, s'empressant autour du baquet de Mesmer, croyaient à l'efficacité universelle du magnétisme, à l'infaillibilité des oracles du somnambulisme. (1)

(1) Mém., t. I, p. 145.

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1862 - Cantu - Histoire universelle – T 19

1862 Cantu t19Histoire universelle
Par César Cantu

Traduite par Eugène Aroux, ancien député, et Piersilvestro Léopardi,
Revue par MM. Amédée Renée, Baudry, Chopin, Dehèque, Delatre, Lacombe et Noël des Vergers.
Troisième édition
Entièrement refondue par l’auteur, revue et traduite d’après la huitième et dernière édition italienne par M. Lacombe sous les yeux de l’auteur
Tome dix-neuvième
Paris
Chez Firmin Didot frères, fils et Cie
Imprimeurs de l’Institut de France, rue Jacob, 56.
1849

Chapitre XXXVII – Philosophie, Sciences sociales, Utopies. Philosophes anglais et français, extrait, page 349

Déjà, au milieu des saturnales de la révolution, c'est-à-dire dès 1795, Saint-Martin, le philosophe inconnu, avait jeté le gant aux doctrines matérialistes alors dominantes. De Bonald, le premier, enseigna que le langage est nécessaire pour inventer le langage ; avant Royer-Collard, il ébranla le trône de Condillac en proclamant qu'on ne peut connaître les choses suprasensibles que par une illumination d'en haut; il rappela la philosophie à l'étude de l'homme formé à l'image de Dieu, pur et innocent, et qui peut redevenir tel par la prière. Il soutint que les inégalités sociales sont le résultat de la chute originelle, et accepta la révolution avec le religieux effroi qu'inspire aux âmes méditatives la vue de la justice divine. De Maistre appelle Saint-Martin « le plus instruit, le plus sage et le plus élégant des théosophes modernes ». Les formules gnostiques dont s'enveloppait ce théosophe le firent considérer comme un visionnaire. En effet, il admettait dans le christianisme des doctrines exotériques ; il se crut sérieusement un voyant, un inspiré, dépositaire de vérités qui n'avaient point été communiquées à d'autres.

De Maistre explique le gouvernement temporel de la Providence, l'existence du mal, l'origine des idées et du langage, en un mot les problèmes fondamentaux de la philosophie en supposant une révélation primitive de la parole et des idées, obscurcie ensuite par la chute de l'homme. Il compare sans cesse les dogmes de la révélation avec les acquisitions de la simple raison naturelle, et réduit la science à la foi.

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1862 – Chassay – Conclusion des démonstrations évangéliques

1862 ChassayConclusion des démonstrations évangéliques suivi de neuf dissertations complémentaires, savoir : Pierre Bayle, sa doctrine et son influence ; madame de Staël ; un mot sur l’éclectisme avant 1848 ; de la philosophie de l’histoire ; le docteur Klee, sa vie et ses travaux ; de l’exégèse rationaliste et de ses dangers ; le fouriérisme devant le siècle.
Par M. l’abbé F.-É. Chassay, chanoine honoraire, professeur de philosophie au séminaire diocésain, membre de l’Académie de la religion catholique de Rome, de la Société littéraire de l’université catholique de Louvain, des académies de Bordeaux, de Reims, de Caen et de Dijon, des sociétés impériales académiques de la Loire inférieure et de Cherbourg.
Publié par M. l’abbé Migne, éditeur de la bibliothèque universelle du clergé ou des cours complets sur chaque planche de la science ecclésiastique.
S’imprime et se vend chez J.-P. Migne, éditeur, aux ateliers catholiques, rue d’Amboise, 20, au petit Montrouge, autrefois barrière d’enfer de Paris, maintenant dans Paris.
1862.

Sixième partie. L’hérésie et le schisme au XVIIIe siècle.

L’ensemble des chapitres I : L’illuminisme au XVIIIe siècle. Saint-Martin. - Les Illuminés avant Saint-Martin et II : Le philosophe inconnu, est une reprise partielle du texte de l’abbé Grégoire paru chez Migne en 1828 dans son « Histoire des sectes religieuses », pages 204-230.
Nous reproduisons ici l’ensemble de ces 2 chapitres en mettant entre crochets […] les éléments non publiés par l’abbé Chassay de l’Histoire des sectes religieuses.

Chapitre I. L'illuminisme au XVIIIe siècle. Saint-Martin. - Les Illuminés avant Saint-Martin, pages 667-671.

[Parmi les théosophes européens, jadis il en était qui rattachaient leurs rêveries à l’alchimie. Robert Flud, Cardan, Paracelse, étaient pour eux des génies sublimes. La théurgie est l’art de lier commerce avec les génies supérieurs : c’est la définition donnée par Jamblique. Les théosophes, soit anciens, soit modernes, prétendent dériver leurs connaissances de l’illumination divine, de la communication avec Dieu qui leur révèle ses mystères, de leur commerce avec les intelligences. En général, ils assurent que les êtres créés du monde visible et ses phénomènes, correspondent à ceux du monde invisible. La raison et la religion s’associent naturellement à cette opinion qui offre aux cœurs purs des sujets d’admiration, de méditation dans lesquels l’âme se complait et s’attendrit.]

Quel homme religieux et contemplateur n’a pas éprouvé maintes fois le plaisir de s’élever vers les régions célestes, de franchir par la pensée l’espace qui nous en sépare, de se figurer placé au milieu des purs esprits, au milieu d’amis, de parents que la mort nous a ravis et qu’on espère retrouver dans un monde nouveau !

Mais quand les Théosophes, quand Jacques Bœhm, Swedenborg et leurs disciples, s’élançant dans le monde invisible et roulant dans le vague, prétendent enrichir leurs itinéraires d’une carte exacte de ces régions inconnues, en rédiger une sorte de statistique, tracer le tableau de correspondance entre les objets sublunaires et le monde intellectuel, et dévoiler les secrets de la nature ; ici commencent les aberrations : la divergence de leurs systèmes en offre la preuve complète.

« Ces aberrations, surtout des philosophes modernes, anticipent sur la notice abrégée que sans doute le lecteur attend des théosophes, qui, dans les XVIe et XVIIe siècles, ont amené la filiation de leur secte dans le XVIIIe et jusqu’à l’époque actuelle.

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1862 - Hoefer – Didot –– Nouvelle biographie générale

1862 Hoeffer Didot t39

Nouvelle Biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours avec les renseignements bibliographiques et l’indication des sources à consulter
Publiée par MM. Firmin Didot Frères
Sous la direction de M. Le Dr [Jean Chrétien Ferdinand] Hoefer
Tome trente neuvième
Paris
Firmin Didot Frères, Fils et Cie, Éditeurs
Imprimeurs libraires de l’Institut de France
Rue Jacob 36
1862

Martines Pasqualis, pages 295-296

PASQUALIS (Martinez), chef de la secte d'illuminés dits martinistes, né vers 1715 en Portugal, mort en 1779, au Port-au-Prince (Haïti). D'origine juive, il s'annonça en 1754 par l'institution d'un rite cabalistique d'élus, dits cohens (en hébreu, prétres), rite qu'il parvint à introduire dans quelques loges maçonniques de France, à Marseille, à Toulouse, à Bordeaux. Dans cette dernière ville, il initia à ses opérations, qu'il appelait théurgiques, Louis-Claude de Saint-Martin, alors officier au régiment de Foix, avec lequel on l'a souvent confondu, par suite de l'analogie de leur nom. Martinez, qui présentait sa doctrine comme un enseignement biblique secret dont il avait reçu la tradition, l'apporta en 1768 à Paris, et fit un assez grand nombre d'adeptes qui, en 1775. prirent le nom de Martinistes. Dans leurs réunions, ils s'occupaient d'exercices qui annonçaient des vertus actives, pour nous servir du langage consacré. On y obtenait, par la voie sensible, des manifestations d'un ordre intellectuel, qui décelaient aux prosélytes une science des esprits comme les visions de Swedenborg, d'un ordre sentimental, décelaient une science des âmes. Au résumé, on peut conclure de ses écrits restés inédits et de ceux de ses disciples, que la doctrine de Martinez est cette tradition ou kabbale des juifs, doctrine ésotérique dont la partie pratique enseigne l'art de faire agir les puissances [page 296] supérieures sur le monde inférieur, et de produire par là des effets surnaturels ou des miracles. Martinez Pasqualis quitta Paris en 1778 pour se rendre à Saint-Domingue où l'appelait la succession d'un de ses parents, et mourut dans cette île, l'année suivante.
H. F.
Saint-Martin, Œuvres diverses, passim.

bouton jaune  Martinez Pasqualis


1862 - Le courrier du Bas-Rhin

1862 3juin courrier bas rhinLe Courrier du Bas-Rhin

Niederrheinischer Kurier

Strassburg

N°132 - Mardi 3 juin 1862 - Pages 1-2

FEUILLETON.

M. DE SAINT-MARTIN A STRASBOURG,
de 1788 à 1791.

Un illustre penseur, d’une catégorie qui n’est pas commune M. de Saint-Martin, a passé à Strasbourg les années les plus décisives de son développement philosophique, celle de 1788 à 1791. Notre compatriote, M. Matter, ayant recueilli sur cet intéressant personnage une série de documents inédits, va publier sa biographie à la librairie académique de MM. Didier, éditeurs des œuvres de M. Guizot, de M. Cousin et de M. Villemain. Nous sommes à même de faire part à nos lecteurs, dès aujourd’hui, d’un des plus importants chapitres de cet ouvrage : c’est celui qui est consacré au séjour de Saint-Martin à Strasbourg et à des relations avec les familles les plus notables de cette ville.

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1862 Le Lenormant1862 - Coppet et Weimar. Madame de Staël et la grande-duchesse Louise

Coppet et Weimar.

Madame de Staël et la grande-duchesse Louise

par l'auteur des Souvenirs de Mme Récamier

Amélie Lenormant, (1803-1893).

Paris

Michel-Lévy frères, libraires-éditeurs
2 bis, rue Vivienne

1862

Lettre d’Auguste-Guillaume de Schlegel à M. Mathieu de Montmorency. Berne... - Extraits, pages 201-202

« Si vous êtes convaincu qu'entre le médiateur universel du genre humain et ses interprètes, les écrivains de la nouvelle alliance, Dieu envoie de temps en temps sur la terre des personnes douées d' inspirations et de hautes lumières pour servir de guides dans les voies [page 202] spirituelles aux individus selon leurs besoins divers, vous admettrez aussi qu'il peut y avoir des choix différents et pourtant également bons ; que chacun doit chercher ce qui est le plus analogue à sa manière d'être et ce qu'il s'approprie le mieux. Mme de Staël, par exemple, se sent beaucoup d'attrait pour les œuvres de Fénelon et les lit constamment. Pour moi, j'ai trouvé des impulsions puissantes et un grand affermissement dans la foi dans les œuvres de Saint-Martin (Le Philosophe inconnu), à cause des besoins que j'ai de joindre la contemplation à la prière. D'autres pourront retirer le même fruit d'écrits beaucoup moins célèbres encore. Enfin si tous les livres qui traitent de la religion intérieure ne sont qu'un développement de la révélation, comme vous en convenez, on pourra, une fois remis sur la voie, retrouver dans les saintes Écritures mêmes tout ce que ces livres contiennent d'essentiel. »

bouton jaune Lettre d’Auguste-Guillaume de Schlegel à M. Mathieu de Montmorency.


1862 – Matter – Saint Martin. Le philosophe inconnu

1862 MatterSaint Martin. Le philosophe inconnu, sa vie et ses écrits.

Son maître Martinez et leurs groupes d’après des documents inédits

Par M. [Jacques] Matter,
Conseiller honoraire de l’Université de France,
Ancien inspecteur général des bibliothèques publiques, etc.
Paris
Librairie académique.
Didier et Cie, libraires éditeurs, 35, quai des Augustins.

1862

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1862 - Revue des Deux Mondes – T 40

1862 revue 2 mondes t40Revue des Deux Mondes
XXXIIe année – Seconde période
Tome quarantième
Juillet – Août 1862
Paris
Bureau de la Revue des Deux Mondes
Rue Saint Benoit, 20.
1862

Bulletin bibliographique. Extrait, page 777

Livraison du 1 août

Saint-Martin Le Philosophe Inconnu, Sa Vie Et Ses Écrits, D'après Des Documents Inédits, par M. Matter, 1 vol. in-8°; Didier.

La dernière moitié du XVIIIe siècle vit, on le sait, le mysticisme et la philosophie se développer avec une énergie imprévue à côté du matérialisme. La France a sa large part dans ces mouvements si contraires de la pensée humaine à une époque de crise et de déchirement social. Une figure sereine et sympathique, restée dans une sorte de clair-obscur, celle du doux penseur de la Touraine, Saint-Martin, appelle depuis quelque temps l'attention de la critique en Allemagne comme en France. A de nombreuses études, parmi lesquelles se détache un ingénieux portrait de M. Sainte-Beuve, vient s'ajouter aujourd'hui un livre où le caractère de l'homme et la doctrine du penseur sont éclairés par divers documents inédits. Nous ne savons si on peut adopter toutes les vues de l'auteur quant à l'intérêt tout spécial que pourraient offrir encore aujourd'hui les idées de Saint-Martin sur le gouvernement des choses divines et humaines. Nous recommandons seulement ce livre comme offrant d'abondantes et curieuses indications sur le mouvement de l'esprit humain dans la dernière moitié du 18e siècle.

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1862 – Saint-Albin – Les Francs-Maçons

1862 Saint AlbinLes Francs-Maçons
Par Alex. De Saint-Albin
Äris.
E. Dentu, libr.-éditeur. Palais Royak, Galerie d’Orléans, 15 et 17.
Amb. Bray, libr.-éditeurn rue des Saint Pères, 66
M DCCCLXII

Deuxième classe. Pages 202-210

[page 202] Deuxième Classe.

La deuxième classe est appelée le Conseil Des Élus. Ce conseil est composé des trois chambres (formant trois grades dans l'écossisme).

La 1ère chambre est celle des Élus Des Neuf (1).

[203] La 2e est celle des Élus Des Quinze (1).

La 3e est le sanctuaire ou le conseil des Chevaliers ÉLUS (2).

En 1786, le Grand Orient de France a substitué le seul élu secret aux élus ci-dessus du rite ancien, qui présentent, dans leur légende, une suite non interrompue d'événements. Mais nous devons avouer que la fusion [204] n'a pas toujours été heureuse. Par exemple, nous venons de voir, dans l’Elu français, que l'assassin d'Hiram s'étant poignardé lui-même, le cri nekum devient ridicule, puisque, par la mort d'Hiram, la vengeance se trouve accomplie. De même, on ne peut que sourire au vaillant exploit de Johaben, qui est censé couper bravement la tête à un homme mort. Ces inconvénients, et quelques autres, n'ont pas lieu, en divisant en trois scènes le mythe de la mort d'Hiram (1).

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1862 – Sainte-Beuve - Portraits littéraires

1862 sainte beuve portraits litterairesPortraits littéraires
Par C.-A. [Charles Augustin] Sainte-Beuve, de l’Académie française
Nouvelle édition revue et corrigée
Molière, Delille, Bernardin de Saint-Pierre, le Général Lafayette, Fontanes, Joubert, Léonard, Aloïsius Bertrand, Le comte de Ségur, Joseph de Maistre, Gabriel Naudé.
Paris.
Garnier frères, libraires éditeurs. 6, rue des Saints Pères et Palais Royal, 215
1862

Bernardin de Saint-Pierre.   Extrait, pages 128-134

… On pourrait dire de Bernardin qu'il entend la nature de la même manière qu'il entend Virgile, son poète favori, admirablement tant qu'il se tient aux couleurs, aux demi-teintes, à la mélodie et au sens moral ; le lacrymœ rerum est son triomphe ; mais il devient subtil, superstitieux et systématique quand il descend au menu détail et qu'il cherche, par exemple, dans le conjugis infusus gremio une convenance entre cette fusion (infusus) et le dieu des forges de Lemnos. Le bâton d'olivier, et non de houx ou de tout autre arbrisseau, que porte Damon dans la huitième églogue, lui paraît un symbole bien choisi de ses espérances. De même, en exagérant et subtilisant en mainte occasion au sujet des bienfaits et des prévenances de la nature, il lui arrive d'impatienter à bon droit celui qu'il vient de charmer ; à force d'apologie, il rappelle et provoque les objections. Quand on n'est plus dans la première innocence pastorale de l'enfance, il veut trop vous y ramener. Candide, si on a le malheur de l'avoir lu, ou le poème sur le Désastre de Lisbonne, vous apparaît au revers du feuillet en plus d'une page. Bernardin, si intime dans quelques parties du sentiment de la nature, est superficiel à l'article du mal. Il n'en tient pas compte, il ne l'explique en rien. Dans son vague déisme évangélique, il n'est pas plus chrétien que panthéiste en cela. Un contemporain de Bernardin de Saint-Pierre, spiritualiste comme lui, et protestant également contre les fausses sciences et leurs conclusions négatives, Saint-Martin, a bien autrement de profondeur.

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1862 – Veuillot - Historiettes et fantaisies

1862 Veuillot HistoriettesHistoriettes et fantaisies
Par Louis Veuillot
Paris
Gaume Frères et J. Duprey, éditeurs, rue Cassette, 4
1862

Article : Philosophie - Louis Moreau. Extrait, pages 486-488

Moreau (Louis) Considérations sur la vraie Doctrine. 2° édit., suivie de la 3e édition du Matérialisme phrénologique 1 vol. in-12 3 fr.

[487]. La Destinée de l'homme, ou du Mal, de l'Épreuve et de la Stabilité future. 1 vol. in-12 3 fr. 50

Traductions du même auteur.

L'Imitation de N.-S. Jésus-Christ, traduction nouvelle accompagnée d'extraits des ouvrages des Pères, des Docteurs et des Saints. 3e édit. 1 beau vol. imprimé en gros caractères sur papier glacé 3 fr. 50

Les Confessions de saint-Augustin. 6e édit. 1 vol. in-8 contenant le texte et la traduction 7 fr.

Le Même Ouvrage. 1 vol. in-12 contenant la traduction seule -. 3 fr. 50

Cette traduction a été couronnée par l'Académie française.

Le Monde (n° du 8 novembre 1860) a publié sur ces divers ouvrages l'appréciation suivante :

« Les œuvres de M. Louis Moreau peuvent se diviser en deux séries : les traductions et les écrits originaux. Ceux-ci embrassent dans leur ensemble toute la philosophie chrétienne. Les Considérations sur la vraie doctrine en exposent !es principes; le livre de la Destinée de l'homme, appliquant ces principes à la question fondamentale de toute philosophie, réfute radicalement toutes les écoles hétérodoxes, matérialistes ou spiritualistes, dont il nous fait connaître à fond les doctrines, telles que les ont formulées dans leurs écrits les plus célèbres les sophistes contemporains. L'opuscule sur le Matérialisme phrénologique et l'étude sur Saint-Martin, le philosophe inconnu, complètent cette réfutation, en dévoilant les erreurs et les dangers de la phrénologie et de l'illuminisme. '

« M. L. Moreau s'était préparé à ces travaux par ses belles traductions des Confessions de saint Augustin, de la Cité de Dieu et de l'Imitation. La traduction des Confessions est presque devenue classique ; c'est vraiment la seule de ce chef-d'œuvre immortel que la langue française puisse avouer... Je veux dire deux mots de sa traduction de l'Imitation.

« Les comparaisons sont toujours odieuses, et je n'eu veux faire aucune. Il me sera bien permis cependant d'avouer qu'entre toutes les traductions de l'Imitation que j'ai pu étudier, je préfère celle de M. Moreau ; je ne puis ici qu'indiquer la principale raison de celte préférence. La plupart de ces traductions paraphrasent plutôt qu'elles ne traduisent le latin de l'Imitation. M. Moreau s'attache, au contraire, à rendre le sens précis du texte, sans l'amplifier ni le restreindre…

« Depuis qu'on traduit l'Imitation, on a coutume de faire suivre chaque chapitre de réflexions du traducteur. Je n'ai jamais pu comprendre pourquoi. Rien ne m'est désagréable comme ces petits morceaux, d'un tissu souvent assez grossier, cousus dans cette pourpre. M. Moreau, sans doute, est dans le même sentiment; car, s'il a craint que le lecteur ne lui sût mauvais gré de ne pas se conformera l'usage, il l'a du moins très-heureusement corrigé en ne mettant que des réflexions et des prières empruntées aux saints, aux docteurs et aux grands auteurs ecclésiastiques. Cela nous vaut d'admirables prières admirablement traduites de saint Augustin, de saint Anselme, de saint Benoit, de saint Bernard, de saint Bonaventure, de sainte Catherine, de [488] sainte Thérèse, de saint Eucher, de saint Ephrem, de saint Grégoire le Grand, de saint Grégoire de Naziance, de Louis de Blois, d'Hugues de Saint-Victor, du cardinal Bona, etc., etc., à côté de celles qui sont prises à saint François de Sales, à saint Vincent de Paul, à Bossuet, à Fénelon, etc.

Les premières éditions avaient l'inconvénient d'être en caractères menus et serrés ; l'édition nouvelle est en beaux et forts caractères.

« Ajoutons que cette édition, ainsi que l'édition, nouvelle de la traduction des Confessions, a été soigneusement revue et corrigée. M. L. Moreau est de ceux qui ne sont jamais pleinement satisfaits de leur œuvre, et qui ne voudraient pas l'offrir de nouveau au public sans en avoir fait disparaître les taches et les imperfections que la réflexion ou des conseils amis leur ont fait remarquer.

Du Lac.

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1862 – Falloux – Lettres de Mme Swetchine

1862 FallouxLettres de Madame Swetchine
Par Anne-Sophie Swetchine
Publiées par le comte [Alfred-Frédéric-Pierre] de Falloux du Coudray, de l’Académie française
Tomme II
Paris
A la librairie académique Didier et Cie,
Libraires éditeurs, 35, quai des Augustins
Auguste Vaton, libraire éditeur, rue du Bac, 50
1862

À monsieur Louis Moreau (1). Chantilly, 8 octobre 1837. Pages 83-85

J'ai une foule de restitutions à vous faire, monsieur, et vraiment mon inexactitude avec vous a le caractère grave du larcin. Je passerais sous silence encore les deux numéros de l’Européen ; mais c'est l'extrait des pensées de Saint-Martin (2), depuis si longtemps entre mes mains, qui m'accuse tout à fait. Vous ne voudrez plus rien me prêter, et j'en serais trop punie ; car ce que vous me faites connaître est presque toujours la continuation de nos entretiens, et c'est à cette part que je ne veux pas renoncer. Il m'a suffi de franchir la banlieue pour sentir se réveiller ma conscience et commencer l'exploitation des richesses qu'à Paris on se contente d'amasser. J'ai lu avec grand plaisir Les Pensées du philosophe inconnu, [page 84] et comme il arrive toujours, j'ai fait mon choix dans votre choix. Plusieurs d'entre elles m'ont paru élevées, intérieures et profondes, vraies par conséquent ; car on ne peut monter haut ni creuser fort avant, sans entamer une des deux régions de la vérité : les perfections de Dieu et la misère de l'homme. Néanmoins, en parcourant les Pensées, on croit quelquefois traverser comme des couches d'erreur, reconnaître quelque chose de son souffle, du goût de son terroir ; on sent qu'elles n'ont pas été dictées par la piété pure et simple, mais par une théosophie toujours un peu glorieuse. Aussi c'est Saint-Martin qui a trouvé Dieu, et non pas Dieu qui a visité Saint-Martin. Son action sur les autres assume une puissance personnelle ; l'orgueil perce jusque dans son effroi de la corruption, dans son éloignement pour ceux dont les ignorances, les faiblesses et les souillures le frappent. Tout ceci ressemble peu à la charité, qui ménage ceux-là mêmes dont elle se sépare ; et lorsqu'on y voit si clair sur les autres, je craindrais fort qu'on ne réservât les ténèbres pour soi. Il n'est pas jusqu'aux mots recherchés ou techniques de son langage, quelquefois bizarre, qui, selon moi, n'arrêtent et ne refroidissent. Nulle part peut-être la simplicité des formes n'importe davantage à la rectitude des idées que dans la piété ; il se fait sécheresse, aridité subite, là où l'esprit prévaut sur le cœur ; et si les prodiges de la charité chrétienne se concentrent presque exclusivement dans l'Église, il faut convenir que c'est aussi seulement dans son sein que l'amour chrétien a son expression vraie et persuasive. Adieu, monsieur; soyez assez bon pour me [page 85] pardonner et recevoir avec confiance les sentiments sincères et affectueux que je vous offre. Veuillez dire à M. d'Esgrigny que je reçois à l'instant son aimable lettre et que j'y répondrai très incessamment.

Notes
1. M. Louis Moreau, conservateur à la bibliothèque Mazarine, traducteur des Confessions de saint Augustin et de la Cité de Dieu, auteur des Considérations sur la vraie Doctrine, de La Destinée de l'homme, et d'une Etude sur le Matérialisme phrénologique et l’Animisme.
2. II s'agit ici, comme on le verra quelques lignes plus bas, du théosophe Saint-Martin, le philosophe inconnu.

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Vichy, 7 juin 1851. Pages 105-106

Vous voudrez bien, n'est-ce pas, me recevoir à résipiscence et laisser ma misère et ma pauvre vie de Paris intercéder pour moi ? Je remonte la nuit des temps pour vous dire que votre souvenir n'avait nullement précédé le mien et que, restée quelque temps sans vous voir, j'ai envoyé chez vous, où il m'a été dit que vous étiez allé vous établir à la campagne. Je tiens à constater ces deux jalons qui montrent moins déserte cette route que j'aurais abrégée, si tout dans ces derniers temps ne m'avait manqué, le loisir et les forces. J'ai demandé plusieurs fois de vos nouvelles à des amis communs, mais ils se plaignaient de ne pas vous voir, et nous en étions réduits à l'unique plaisir de parler de vous. J'en ai eu un autre pourtant dans l'intervalle, c'est celui de vous faire connaître et dûment apprécier par quelqu'un qui en était digne. Le prince Albert de Broglie n'avait jamais rien lu de Saint-Martin ; je lui ai prêté votre petit volume ; son suffrage a été très prompt et très vif, mais au lieu d'aller au théosophe, il s'est uniquement arrêté sur vous, et s'est exprimé en des termes qui n'empruntent jamais rien à la banalité. J'ai promis à M. de Broglie, pour sa récompense, vos Considérations, et au préalable je les ai emportées pour les relire. Je ne puis admirer comme je le fais votre pensée si haute en elle-même, si soutenue, si dévouée aux vérités de [page 106] l'ordre le plus élevé, sans me demander ce qu'elle peut avoir à redouter comme gêne et entrave des vicissitudes actuelles ? Certes je n'émettrais pas ce doute, si vous élaboriez une constitution, chemin court du bonheur des peuples. Cependant je me rassure, car ce que vous défendez, ce n'est pas même la portion de vérités qui se laisse modifier par le temps, c'est au contraire, celle qui lui résiste toujours. Quant à la contradiction, rien n'en affranchit ; à notre époque, il me semble qu'il y a encore plus d'ignorance, de préoccupations absorbantes que d'incompréhensions volontaires, et dès lors l'enseignement peut s'adresser avec succès à des gens qui ne savent pas même qu'il leur manque. Vous me trouverez sans doute trop optimiste, mais c'est encore la plus douce manière de se tromper dans ces choses humaines où personne n'est assez sûr d'avoir raison. Du reste l'atmosphère où je suis me servirait d'excuse ; je n'entends parler que de succursales à établir, d'agrandissements d'églises, nécessités par une assiduité et une ferveur toujours croissante des populations. Si on prie si bien sur un point de la France, il y a de quoi la sauver sur tous les autres.

Je ne vous dis rien de moi : le temps court, les lieux changent, sans rien changer aux tristesses destinées à durer autant que nous. Soyez bien mon interprète auprès de Mme Moreau. Je compte retourner à Paris dans le courant de juillet, et elle me permettra de réclamer alors, je l'espère, la visite qu'elle me destinait. Recevez tous deux, en attendant, la bien sincère assurance de mon affectueux intérêt.

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À monsieur le vicomte Armand de Melun. Paris, 26 juin 1838. Extrait, pages 184-186

Depuis votre départ, un miracle s'est fait dans le cœur de ce jeune de Serre que vous avez vu avec intérêt (1) : la grâce s'est emparée de lui sans lui laisser de relâche; tout y a concouru, et en dernier lieu, huit ou dix jours avant son départ, M. Lacordaire y [page 185] a mis la dernière main. «Je suis plus catholique que vous;» disait ce bon jeune homme à sa tante, qui l'est fort. Les objections qui lui restent, il les laisse venir encore pour avoir le plaisir d'en triompher ; sa piété, sa joie, la paix qui l'inonde sont bien aussi des arguments; et c'est une sœur de la Charité qui a commencé tout cela, qui a mis en mouvement toute cette puissance de l'esprit que très probablement eussent laissée inerte de savants docteurs ! Je vous confie tout cela, en vous priant de n'en point encore parler. Ce jeune homme est plein d'élévation et de générosité, il ne voudrait point de secret; mais avant qu'une chose soit accomplie, il est inutile de l'ébruiter, et je suis fort d'avis, même en lui donnant la publicité convenable, d'éviter tout ce qui pourrait ressembler à un triomphe. « Le bruit ne fait pas de bien, disait le théosophe Saint-Martin, et le bien ne fait pas de bruit. »

Vous avez sûrement rencontré chez moi un de mes plus anciens amis, le comte de Divonne, dont la santé depuis plusieurs années était déplorable; nous venons de le perdre, et ce chagrin en est un pour moi bien grand. Cette amitié comptait près de trente années ; elle ne s'est jamais démentie, et ma pensée ne se reportait jamais vers lui sans éprouver une sorte de repos que porte en elle-même la vraie bienveillance. C'est par sa belle-fille (2) que j'ai su tous les [page 186] détails, qui sont consolants ; ses souffrances ont été abrégées, et tous les secours sont venus à temps.

Parmi vos in-folio avez-vous les Mémoires du cardinal Pool ? C'est M. d'Eckstein qui vous adresse cette question à la suite de votre panégyrique fait con amore, et qui vous place, quant aux exigences qui rendent le baron si difficile, dans la position du monde la plus exceptionnelle. Adieu ; mille amitiés à votre frère ; quant à vous, je ne compte pas.

Notes
1. Arthur-Hercule, vicomte de Serre, fils du frère de l'illustre orateur de la Restauration. Remarquable par des facultés et une instruction profondes, il avait été élevé en Angleterre, patrie de sa mère, et nourri des idées des sectes évangéliques qui n'admettent l'existence d'aucune Église visible. Il s'éleva rapidement dans la carrière diplomatique, et fut nommé, en 1859, ministre de France en Grèce. Il avait épousé une princesse Cantacuzène et la détermina à entrer comme lui dans le sein de l'Église catholique. Il mourut à Athènes à la fin de l'automne de 1859, dans les sentiments d'une admirable ferveur.
2. Angélique de Villeneuve de Vence, comtesse de Divonne.

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1862 – Lemoine - L'âme et le corps

1862 LemoineL'âme et le corps
Études de philosophie morale et naturelle
Par [Jacques] Albert [Félix] Lemoine
Professeur de philosophie au Lycée Bonaparte.
Paris
Librairie académique.
Didier et Cie, libraires éditeurs,
35, quai des Augustins
1862

Le génie, la folie et l'idiotisme. Extrait, pages 216 -219

… Vous observez, dans les asiles des aliénés .de toutes sortes, des délires qui portent sur toute espèce de sujets, qui troublent certaines facultés déterminées de l'intelligence en respectant les autres, des folies [page 217] qui pervertissent les sentiments sans altérer le jugement, qui exaltent certaines passions, poussent les malades à des actes particuliers et criminels, le meurtre, le vol, irrésistiblement et sans motif. Quand vous trouvez dans la parenté d'un homme des fous de ce genre, dans l'histoire de leur folie des faits semblables, et quand vous voyez, en examinant la propre conduite de cet homme, l'image, même pâle et effacée, de ce délire universel dans une exaltation générale des idées, de ces folles hallucinations dans une rêverie habituelle, de cette incurable monomanie dans la poursuite opiniâtre d'une idée fausse ou l'accomplissement d'un objet irréalisable, de ces fureurs hystériques dans une débauche effrénée, de ces penchants irrésistibles au meurtre ou au vol dans la perversion de tous les bons sentiments, dans un homicide accompli sans raison suffisante, dans l'absurde larcin d'un objet aussi vil qu'inutile fait par un homme riche, vous ne dites pas catégoriquement que cet homme est fou, qu'il est décidément malade, vous ne croyez pas cependant qu'il jouisse d'une santé parfaite et de l'intégrité de sa raison; vous vous rendez compte de cet état intermédiaire par un vice caché de la constitution organique qu'il a reçu en héritage, vous expliquez ce qui lui reste de bon sens par l'heureuse influence d'un de ses parents qui a pu balancer et affaiblir l'influence funeste de l'autre. Soyez donc juste aussi quand vous observerez dans un autre homme ce même état mixte, ce même mélange de [page 218] folie et de raison; vous ne connaissez point sa famille, ou vous ne trouvez parmi les membres qui la composent ni aliénés, ni paralytiques, ni malades de cette catégorie; eh bien, soyez sûr cependant que quelqu'un de ses ascendants inconnus lui a légué le principe affaibli ou exagéré de son mal, ou expliquez les bizarreries de son esprit et de sa conduite par la constitution vicieuse que la nature lui a faite en vertu de la loi d'innéité.

Ce principe admis, élargissez les rangs, ouvrez des catégories intermédiaires entre la maladie intense et la santé parfaite, entre la folie déclarée et la raison intègre; placez-y toutes les intelligences boiteuses, toutes les natures équivoques, plus loin ou plus près des deux pôles : les rêveurs, les utopistes, les faiseurs de projets, les gens à système, les raisonneurs entichés d'une idée fausse, les visionnaires, les mystiques, les théosophes, eussent-ils de brillants éclairs de raison et des échappées de génie ; placez là pêle-mêle ou hiérarchiquement les Platon, les Swedenborg, les Fourier, les Saint-Martin, les Newton commentant l’Apocalypse et voyant l'Antéchrist dans le pape, les Paracelse, les Lavater, ajoutez des cadres supplémentaires pour les enfants mal nés, réfractaires aux bons sentiments, pour les meurtriers de quinze ans, pour tous les petits monstres d'immoralité qui font le scandale des bourgeois ignorants mais honnêtes, pour les âmes hermaphrodites, les fanatiques, les prostituées, les Caligula, les Héliogabale, les Brinvilliers, les [page 219] Jacques Clément, les Condamine suivant la guillotine à chacune de ses haltes, les assassins qui ont égorgé trente-quatre victimes pour l'amour de l'art sans en voler une seule. Ce n'est pas tout : à côté des crimes incompréhensibles il faut une place parallèle pour les dévouements inouïs, pour les vertus surhumaines ; quoique rares et admirables autant que les autres sont épouvantables et fréquents, les actions sublimes ont, comme les crimes atroces, leur origine et leur cause dans une prédisposition organique ; ce sont des âmes de même trempe qui seules sont capables des unes et des autres. Rangeons donc dans cette catégorie nouvelle les Régulus et les Décius, les martyrs qui défient les tourments, les anges de l'assassinat, les Judith et les Charlotte Corday, car ces héros que l'on admire ne sont, quoi qu'il en coûte de l'avouer, que « des individus qui, doués de passions fortes, de sentiments élevés, se sentent dominés par l'insurmontable besoin de faire au bonheur de leurs semblables le sacrifice de leur vie. »

Entre les fous et les gens sensés, entre les sains et les malades, parmi tous ces êtres irréguliers qui portent dans leur organisation un vice congénital, maladifs plutôt que malades, et se portant bien plutôt que sains, vivant, en un mot, sous l'influence d'un principe morbide qui ne se développe pas au grand jour ou n'envahit pas tout le système, qui excite la vitalité du cerveau au lieu de briser l'organe, il reste encore une place à prendre : c'est le génie qui l'occupera.

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Extrait, pages 222-224

… C'est donc une erreur, si vieille et si accréditée qu'elle soit, que l'aphorisme du poète, mens sana in corpore sano. Au contraire, la force et la grandeur de l'intelligence ne peuvent exister qu'au prix de la maladie du corps. Une organisation saine et fonctionnant régulièrement communique à l'esprit sa [page 223] régularité, mais ne l'élève jamais au-dèssus de la médiocrité. Un homme sain de tous points « pourra être doué d'un sens droit, d'un jugement plus ou moins sûr, d'une certaine imagination; ses passions seront modérées; toujours maître de lui-même, il pratiquera mieux que personne la doctrine de l'intérêt bien entendu ; ce ne sera jamais un grand criminel, mais il ne sera jamais non plus un grand homme de bien, il ne sera jamais atteint de cette maladie mentale qu'on nomme génie. » Ne soyez donc pas étonné désormais si vous voyez la folie se marier au génie dans les pensées, les actes, les œuvres des hommes les plus illustres; si l'on vous dit que la plupart d'entre eux ont la même constitution, le même crâne que les idiots; s'ils comptent parmi leurs ascendants, leurs descendants ou leurs collatéraux des aliénés de toute sorte ; s'ils meurent eux-mêmes fous, déments, apoplectiques, paralytiques. La folie sous toutes ses formes est toujours suspendue sur leur tête; il n'a tenu le plus souvent qu'à bien peu de chose qu'ils naquissent idiots, il s'en est fallu d'aussi peu que tels idiots devinssent des hommes de génie. Les êtres régulièrement organisés ne sont point exposés à ces fortunes extrêmes. Aristote vous le disait bien, il y a plus de deux mille ans, que tous les grands hommes sont mélancoliques, c'est-à-dire, en grec, véritablement fous. Voyez un homme de génie dans son cabinet, à sa table de travail; vous croiriez être aussi bien dans la cellule d'un maniaque, tant ses habitudes sont bizarres et [page 224] extravagantes; il n'y a pas jusqu'aux caractères de son écriture 'qui ne rappellent souvent le griffonnage d'un fou. Le génie n'est qu'une névrose.

Voilà la théorie, voici les faits et les exemples. Malgré le silence des biographes qui ne soupçonnent pas l'importance de certains détails, malgré la dissimulation des familles qui cachent comme une honte les maladies qui affligent ou ont affligé quelqu'un des leurs, on peut dans un grand nombre de cas reconstituer à chaque homme de génie et son diagnostic personnel et sa généalogie ou sa descendance au point de vue médical. Examinez individuellement la vie des hommes illustres, sans rechercher d'où ils viennent, sans tenir compte de leur parenté ; ils vous offriront toutes les variétés des maladies nerveuses. Les aliénés sont nombreux dans leurs rangs : Lucrèce était maniaque, Lucullus est mort en démence, le cardinal de Richelieu s'imaginait être cheval, galopait autour d'un billard, hennissant et lançant des ruades à ses domestiques; O'Connell, Donizetti ont succombé à la paralysie générale ; Zimmermann, Haller, Rousseau, Aug. Comte, le Tasse, Swift vécurent ou moururent fous. Les hallucinés se comptent par centaines : Socrate, Brutus, Charlemagne, Napoléon Ier, Bernadette, Descartes, Pascal, Malebranche, Bossuet, presque tous les saints, saint Dominique, saint François Xavier, saint François de Sales, saint François d'Assise, Ignace de Loyola, Mahomet, Savonarole, Luther, Swedenborg, Cardan, Van Helmont, Saint-Martin, Fourier…

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1862 - Revue spiritualiste

1862 revue spiritualiste t5Revue spiritualiste
Journal mensuel principalement consacré à l’étude des facultés de l’âme, à la démonstration de son immortalité et à la preuve de la série non interrompue des révélations et de l’intervention constante de la Providence dans les destinées de l’humanité, par l’examen raisonné de tous les genres de manifestations médianimiques et de phénomènes psychiques présents ou passés et des diverses doctrines de la philosophie de l’histoire envisagée au point de vue du progrès continu.
Rédigé par une société de spiritualistes et publié par
Z. J. Piérart, ex-rédacteur en chef du Journal du magnétisme, membre de diverses Sociétés savantes.
Tome V. 1re livraison
Paris, bureaux, rue du Bouloi, 21
1862

Page 339 ; 342-345

Bibliographie [page 339] — Saint-Martin, sa vie, ses écrits, son maître Martines et leurs groupes, par M. Matter.

[page 342] C’est aussi pourquoi nous recommandons également à nos lecteurs le beau livre que vient de publier M. Matter sur un théosophe remarquable, homme vertueux s’il en fut, trop longtemps désigné sous le nom de philosophe inconnu, qu’on pourrait à bon droit appeler aussi le philosophe méconnu, et qui, grâce à M. Matter, sera désormais connu comme il mérite de l’être. Saint-Martin, sa vie, ses écrits, son maître Martines et leurs groupes, d’après des documents inédits, l gros volume in-8, chez Didier (prix 7 fr.) : tel est le livre que vient de mettre au jour M. Matter, après de nombreuses recherches.

Tout homme lettré en France et à l’étranger connaît M. Matter, conseiller honoraire de l’université de France, ancien inspecteur des bibliothèques publiques, auteur d’un grand nombre d’ouvrages sur l’enseignement. M. Matter, on le sait, indépendamment de tant d’ouvrages utiles, a publié une histoire de l’école d’Alexandrie, des histoires du gnosticisme, du christianisme, de la philosophie, des doctrines morales, etc., etc.

Ses nombreux travaux lui ont fait toucher partout et de tout près les vérités spiritualistes telles que nous les enseignons. Il les a confessées ouvertement dans un de ses plus récents ouvrages, la Philosophie de la religion (1. Voyez le compte rendu que nous faisons de cet ouvrage dans la Revue spiritualiste, t. II, p. 221). Il lui appartenait plus [page 343] qu’à tout autre d’élever à la mémoire de Saint-Martin le beau monument que nous signalons ici. C’est une gloire pour l’humble philosophe d’avoir trouvé un tel biographe. Mais hâtons-nous de dire qu’il la méritait de tout point. En effet, qu’est-ce que Saint-Martin ? C’est le type moral le plus accompli qui ait existé dans la France sceptique et corrompue du XVIIIe siècle. Né à Amboise, cette ancienne colonie des Gaulois Carnutes, et peut-être descendant de quelques-uns de ces enfants du principal foyer druidique, Saint-Martin sembla en avoir hérité l’esprit mystique, les fortes croyances spiritualistes. — De plus, gentilhomme, élevé pour la magistrature, puis officier de cavalerie, il garda de ces trois phases de sa carrière l’urbanité exquise d’un homme du monde, la gravité d’un homme de loi, l’âme chevaleresque d’un soldat français, ce qui ne contribua pas peu à lui créer de nombreuses et belles relations avec la plus haute société de son temps. La révolution l’appauvrit, l’inquiéta; il sut lui rendre justice, et, tout en s’affligeant des hommes, il demeura inébranlablement attaché aux principes. Il devint philosophe spiritualiste à une époque où tous se faisaient athées, sceptiques, matérialistes ; il se maintint intact et vertueux au milieu de tous les genres de corruption. C’est à tant de qualités qu’il dut de faire respecter ses croyances au sein d’une société voltairienne que les malheurs du temps ne purent même modifier.

Saint-Martin connut les spiritualistes de son époque, et le nombre en fut plus grand qu’on ne pense, surtout à l’étranger. Le juif Martinez Pasqualis fut son initiateur; c’est à Bordeaux et sous les ailes de ce maître cabaliste que Saint-Martin entra dans le temple. Depuis il s’en détacha et se fraya par lui-même une route plus élevée. Il sut entrer en commerce avec les Esprits supérieurs en s’affranchissant des formules compliquées, des opérations théurgiques de son maître. De plus, dans ses exercices spirituels, une chose qu’il rechercha avant tout, ce fut son avancement moral. Plus tard, il connut l’abbé Fournié, l’un des médiums les plus étonnants du XVIIIe siècle, et [page 344] dont M. Matter fait connaître les visions, les écrits remarquables.

Saint-Martin fut en relation à Paris, à Lyon, à Londres, à Strasbourg, avec une foule d’autres spiritualistes, entre autres avec Cazotte, le Calchas de la révolution ; avec la marquise de Lacroix, qui eut des manifestations médianimiques pleine d’intérêt; avec le comte d’Hauterive, dont M. Matter fait connaître les extases ; avec les savants mystiques Oberlin, Salzmann et leurs amies mesdames d’Oberkirch, de Franck, de Rozemberg, la comtesse Potoka, qui l’initièrent aux doctrines de Jacob Bœhme. Il connut le fameux philosophe Schelling, le général Gichtel, autre mystique célèbre, Lavater, le baron Liebisdorf, le prince de Hesse, le comte de Bernstorf, le baron de Gleichen, disciple du comte de Saint Germain ; les savants mystiques Eckartshausen, Jung-Stilling, le comte de Divonne, la baronne de Krüdener, etc., etc.; enfin la duchesse de Bourbon, pour laquelle il écrivit un livre intitulé Ecce homo, titre semblable à celui de Lavater dont nous avons parlé (2. Voy. Tome III de la Revue spiritualiste, p. 142). M. Matter, en parlant des relations que Saint-Martin eut avec beaucoup de grands personnages du Nord, fait connaître l’école mystique à laquelle ils appartenaient et les manifestations physiques auxquelles ils s’adonnaient. Il nous montre ensuite le philosophe inconnu portant le spiritualisme à l’école normale, et luttant avec succès contre Garat. Il acquiert alors l’estime et plus tard l’amitié du baron de Gérando, de Maine de Biran et de Châteaubriand, qui, après l’avoir d'abord méconnu, parle de lui avec les plus grands éloges. M. Matter ne nous laisse ignorer aucun des détails de la vie de cet homme de bien. Il fait connaître ses écrits divers, toujours de plus en plus clairs comme style et comme idées : le Livre des erreurs et des vertus [sic], le Tableau naturel, d’abord ; ensuite l’Homme de désir, le Nouvel homme, la Théorie mystique des nombres, une théorie sur les médiums, ébauchée en 1795; l’Eclair sur l’association humaine, Le Crocodile ; enfin, l’Esprit des choses et le Ministère de l’homme Esprit. [page 345]

A la suite des chapitres intéressants où la vie et les œuvres de Saint-Martin sont envisagées, l’auteur en consacre plusieurs qui sont un retour sur le théosophe. Il fait connaître sa vie intérieure, la lutte entre la philosophie critique et la spéculation mystique, il s’étend en considérations générales sur les grandes ambitions du mysticisme et de la théosophie, les lumières et les révélations extraordinaires, les communications avec les Esprits supérieurs ; sur la théurgie, les manifestations, les apparitions et les visions ; sur l’école de Copenhague et l’école de Bordeaux ; sur le mysticisme chrétien comparé à celui de Saint-Martin ; sur les faveurs permanentes et les faveurs exceptionnelles, les états extraordinaires, les extases, les ravissements, les dons extraordinaires, la clairvoyance, la seconde vue, les oracles et les prophéties ; sur le somnambulisme, l'illumination et les clartés, le développement extraordinaire des facultés organiques ou physiques ; la puissance magique de certains noms, l’invocation et l’évocation du grand nom ; sur le développement merveilleux des facultés ; enfin, sur la couronne, le grand problème de la science des mœurs, les trois règles de Descartes et les cinq règles de Saint-Martin, les idéalités ambitieuses, c’est-à-dire l’union avec Dieu et la participation à la puissance divine, etc.

Tel est l’aperçu du programme que développe M. Matter d’une plume exercée, la plus compétente et la plus expérimentée peut-être qui soit en Europe sur ces graves matières. En le lisant, on reconnaît le philosophe érudit auquel aucune école, aucune doctrine n’est étrangère; qui les juge et les compare sainement, et sait vous montrer la haute raison d’être, les fondements inéluctables de celle qui est l’objet de sa prédilection. Il nous fait aimer Saint-Martin, et vous montre de combien cet homme juste et simple dépassa en grandeur morale, en idéalité, en philosophie religieuse, tant de célébrités retentissantes. Mais nous reviendrons plus amplement sur le beau travail de M. Matter, et le ferons connaître par des extraits.

bouton jaune   Saint-Martin, sa vie, ses écrits, son maître Martines et leurs groupes, par M. Matter.


1862 – Revue d’Alsace

1862 revue alsaceRevue d’Alsace
Deuxième série.
Troisième année
Colmar
Au bureau, rue des Marchands, n° 8
1862

 La Revue d'Alsace publie pendant l'année 1862 divers articles sur Louis-Claude de Saint-Martin :

- Un extrait du livre de Jacques Matter sur Saint-Martin : Saint-Martin à Strasbourg (pages 278-288)
- Une présentation du livre de Matter (page 541)
- Un compte-rendu du livre de Matter, par Ad. Schaeffer, pasteur (pages 580-586).

Ad. Schaeffer fera une analyse détaillée (VIII parties et 3 articles) dans la Revue chrétienne de 1862-1863 (voir par ailleurs)

C'est cet ensemble que nous présentons ici.

Saint-Martin à Strasbourg, par Jacques Matter. Pages 278-288

SAINT-MARTIN A STRASBOURG. *

Sa rencontre avec Madame la duchesse de Bourbon. — Ses relations avec les savants et les mystiques : Oberlin, Madame de Bœcklin, R. Salzmann, Mesdames d'Oberkirch, de Frank, de Rosemberg, la comtesse Potoka. — Ses nouvelles études. — Sa conversion au mysticisme de Bœhme. — Le paradis, l'enfer et le purgatoire terrestres de Saint-Martin.

* Les pages que nous publions feront l'objet d'un chapitre dans le livre que M. Matter prépare sur la vie et les écrits de Saint-Martin.

Les trois années que Saint-Martin alla passer à Strasbourg ont été à la fois les plus décisives pour sa doctrine et pour ses idéalités. Je ne veux pas dire pour ses affections, ce qui d'ailleurs se confond tout naturellement dans une âme mystique.

Il s'écoula bien peu de temps entre son voyage d'Italie et son arrivée à Strasbourg, dont il est facile de déterminer la date. Saint-Martin nous apprend lui-même qu'il fut arraché de cette ville par un ordre de son père, après un séjour de trois ans, au mois de juin 1791, à l'époque de la fuite de Varenne. Prises à la lettre, ces deux indications fixent son arrivée au mois de juin 1788. Or, en la rapprochant de sa visite à Étupes, il en résulte qu'il ne se trouve pas d'intervalle pour un voyage en Allemagne, qui aurait eu lieu à cette époque et qu'il me parait difficile d'admettre, ainsi que je l'ai déjà dit.

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1862 - Revue d’Alsace - Compte-rendu du livre de Matter. Page 541

Saint-martin, le philosophe inconnu, sa vie, ses écrits, son maître, Martinez et leurs groupes, d'après des documents inédits par M. Matter, conseiller honoraire de l'université de France, ancien inspecteur général des bibliothèques publiques. — Paris, librairie académique, Didier et Cie, in-8° de XI-460 pages.

Les lecteurs de la Revue ont déjà fait connaissance avec St-Martin, « le philosophe inconnu. » Un homme de lettre, M. L. Schauer, de Schlestadt et habitant Paris, lui a consacré un volume en tête duquel il a placé une préface due à l'obligeance de M. Matter. Nous avons annoncé cette publication dans son temps. Nous l'avons alors considéré, avec raison, pensons-nous, comme les prolégomènes d'un ouvrage que M. Matter préparait depuis longtemps sur la philosophie de Saint-Martin. Cet ouvrage vient de paraitre sous le titre que nous inscrivons en tête de cette annonce.

Quel que soit le sentiment de notre époque sur des matières de cette nature, nous avons la certitude que le livre de M. Matter intéressera le public alsacien, car il renferme de belles pages sur le philosophe inconnu et incompris et surtout sur son séjour en Alsace, à Strasbourg même où des affections de cœur et d'esprit rappelaient Saint-Martin comme au berceau de sa vie morale et intellectuelle. La nouveauté et l'importance des documents que M. Matter a eus à sa disposition et l'intérêt qu'ils présentent aux lecteurs de la Revue nous engagent à consacrer prochainement un examen spécial au livre de notre éminent compatriote.

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1862 revue alsaceBibliographie. Compte-rendu du livre de Matter, par Ad. Schaeffer, pasteur. Pages 580-586

SAINT-MARTIN, le philosophe inconnu, sa vie et ses écrits, etc., d'après des documents inédits par M. Matter, conseiller honoraire de l'Université de France, etc., Paris, chez Didier, 1862, 1 vol. in-8° XII-460 pages.

Un savant dont les nombreux ouvrages ont conquis, depuis longtemps, les suffrages du monde lettré, qui n'est point d'ailleurs un inconnu pour les lecteurs de cette Revue, M. Matter, conseiller honoraire de l'université de France et professeur au séminaire protestant de Strasbourg vient de publier un volume sur lequel nous nous proposons d'appeler, dans ces pages-ci, l'attention du public sérieux de l'Alsace.

Saint-Martin, le philosophe inconnu, tel est le sujet du volume que nous annonçons.

Bien des littérateurs distingués se sont occupés de Saint-Martin : Chateaubriand, Cousin, de Maistre, Sainte-Beuve ; nous ne nommons que les plus illustres. Et presque tous ceux qui en ont fait l'objet d'une étude attentive, sont arrivés à voir en lui un écrivain, un penseur, un homme enfin digne d'une sérieuse sympathie. Le dernier des écrivains que nous venons de nommer estime que Saint-Martin mérite une étude ou du moins une première connaissance, même de la part des profanes qui n'aspirent point à pénétrer dans ce qu'il a d'obscur, d'occulte, de réservé aux seuls initiés. C'est tout au moins une noble nature, une belle et douce âme qui a de sublimes perspectives dans le vague, des éclairs d'illumination dans le nuage, qui excelle à pressentir sans jamais rien préciser, et sait atteindre en ses bons moments à des aperçus d'élévation et de sagesse.

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1862 – Revue chrétienne

1862 revue chretienneRevue chrétienne

Recueil mensuel
Neuvième année

Paris
Bureau de la Revue
À la librairie de Ch. Meyrueis et Compagnie
174, rue de Rivoli

1862

Mélanges - F. Lichtenberger : Un apologète chrétien du dernier siècle
Mathias Claudius, Le messager de Wandsbeck.

Extrait, pages 31-32

1862 revue chretienne ClaudiusClaudius revint à Wandsbeck, guéri et moralement fortifié. Les épreuves avaient à la fois mûri et rasséréné son caractère. Il avait senti que [page 32] sa véritable vocation était de rester l'humble et fidèle messager de la foi, et d'annoncer par tout pays les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière. Quel plus grand bonheur pouvait-il y avoir pour lui que celui de montrer à ses contemporains la source des divines consolations et de la divine force qui jaillit d'une foi vivante au Sauveur. Il se remit donc avec courage à l'œuvre : il réunit et publia dans huit recueils successifs, de 1765 à 1812, ses anciens articles et y ajouta quelques nouveaux. Le nombre des souscripteurs, surtout au commencement, fut très considérable. De plus, Claudius obtint, grâce à des protecteurs bienveillants, une pension du roi de Danemark, Frédéric V, qui le chargea même dans la suite d'un emploi de contrôleur à la banque d'Altona, qui était une véritable sinécure. Enfin il prit chez lui quelques fils de famille dont on lui confia l'éducation.

Déchargé dès lors des poignants soucis de la vie matérielle, entouré de ses huit enfants et d'un cercle choisi d'hôtes et d'amis, Claudius reprit son existence paisible, égayée par les surprises et les fêtes que son génie inventif savait multiplier, et dans lesquelles le sentiment religieux occupait toujours la première place. Claudius s'abandonnait sans scrupule à l'enjouement qui lui était propre dans ce cercle intime du foyer domestique il y goûtait les joies les plus pures. Son intérieur nous offre le véritable type de la maison chrétienne en Allemagne, avec son caractère grave et respectueux, ses innocentes joies, son charme naïf.

Les travaux littéraires occupaient Claudius sans l'absorber; il produisait lentement et à ses heures ; jamais il n'écrivait pour satisfaire son amour-propre d'auteur, ni même pour subvenir aux besoins de la vie journalière ; il aurait cru déshonorer sa plume en en faisant un gagne-pain. C'est ainsi que dans les traductions qu'il a faites il n'a jamais consulté le goût du public, mais le sentiment de ce qu'il croyait être son devoir. Nous ne citerons, parmi ses ouvrages traduits du français, que les Œuvres spirituelles de Fénelon, et le livre Des erreurs et de la vérité de Saint-Martin.

bouton jaune Mathias Claudius, Le messager de Wandsbeck


1862 revue chretienne articleSaint-Martin et le mysticisme en France, vers 1800

Ce long article, écrit par Adolphe Schæffer (1826-1896) dans la Revue chrétienne, a paru en 3 fois :

- Dans le  numéro 9 du 15 décembre 1862 (pages 780-782) pour les 3 premières parties (I-III)
- Dans le numéro 10 du 15 janvier 1863 (pages 38-45) et comporte la partie IV en totalité et une partie de la partie V.
- Dans le numéro 10 du 15 février 1863 (pages 65-79) et comporte la suite de la 5e partie jusqu'à la fin (suite de V ; VI, VI, VIII).

L'auteur a repris l'ensemble de cet article dans son livre Mélanges d'histoire et de littérature en 1873 (pages 259-310). C'est cet ouvrage que nous suivons, mais nous mettrons, dans le texte, les références des articles de la Revue chrétienne.

Nous avons ajouté, [entre crochets], des titres et des sous-titres pour permettre une lecture agréable. Nous avons également mis entre crochets, les diverses références des textes cités de Louis-Claude de Saint-Martin, quand cela a été possible de les retrouver.

Le titre de cet article

SAINT- MARTIN ET LE MYSTICISME EN FRANCE VERS 1800

est un long commentaire du livre de Jacques Matter :

Saint-Martin, le philosophe inconnu, sa vie et ses écrits, son maître Martinez et leurs groupes, d'après des documents inédits par M. MATTER, conseiller honoraire de l'Université de France, etc. 1 vol. in-8° de XII-460 pages. Paris, chez Didier, 1862.

Le PHILOSOPHE INCONNU. C'est ainsi que s'intitulait volontiers le comte de Saint-Martin, un peu ironiquement, je m’imagine. Aujourd'hui, j'en demande pardon à Saint-Martin et je l'en félicite, aucun de ces deux termes ne saurait convenir pour le désigner.

Inconnu ? Saint-Martin ne l'est plus. Il eût souri d'aise, le tendre et un peu vaniteux rêveur d'Amboise, s'il eût pu voir à l'œuvre, en Allemagne et en France, des littérateurs tels que Chateaubriand et Madame de Staël, M. de Maistre et M. de Baader, Cousin et Sainte-Beuve étudiant ses œuvres, essayant d'initier le monde aux vaporeuses conceptions de son esprit, jetant son nom à tous les vents de la publicité. L'un de ces critiques l'appelle « un homme d'un grand mérite, d'un caractère noble et indépendant, dont les idées (quand elles étaient [page 260] explicables étaient élevées et d'une nature supérieure. » « L'estime, dit-il encore, s'attachera toujours à sa mémoire. » [Chateaubriand, Mémoire d’outre-tombe, p. 303] Il suffirait de moins que ces paroles de Chateaubriand pour tirer un auteur des rangs obscurs où la célébrité ne pénètre point.

Mais ce n'est point dire encore que Saint-Martin ait été philosophe. A vrai dire, je doute qu'il l'ait été. Il n'a point connu cette rigoureuse méthode des bons esprits qui, appuyés sur l'observation et l'induction, partent sagement de l'examen des faits, soit physiques, soit moraux, pour s'élever insensiblement à la connaissance des lois générales qui régissent le monde. Le mysticisme a été toute sa philosophie, et il n'est point sûr que les philosophes sérieux consentent jamais à tendre au mysticisme une main fraternelle.

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