§ 2 - Un dernier avertissement en 1789, p.72-74 (Martinistes)

Au moment où la Révolution allait éclater, quelques hommes courageux signalèrent la source du mal. On connaît les vigoureux écrits de l'abbé Lefranc, supérieur des Eudistes, qui périt [page 73] dans les massacres de septembre. Avant lui, dès les premiers mois de 1789, un homme de lettres, d'un tout autre caractère, le marquis de Luchet, publiait un Essai sur la secte des Illuminés, dans lequel, à travers une grande emphase et un certain vague voulu pour ne pas trop se compromettre, il signalait l'existence de la secte des Illuminés, ayant son siège principal en Allemagne, et l'accusait de travailler à la destruction de tous les trônes et de la religion pour établir l'anarchie sur ses ruines. Luchet a grand soin de ne citer aucun nom propre, mais il désigne clairement les Illuminés de Weishaupt et les Martinistes. En terminant, il adjure tous les honnêtes gens d'ouvrir les yeux pour sauver la monarchie française.

[page 74] Luchet, qui affirme que « le contenu de ces horribles serments lui a été révélé par des personnes égarées dans les ténèbres des Illuminés et à qui la proposition d'entrer dans une pareille conspiration a rendu la raison et le courage, » Luchet est parfaitement au courant des projets de la secte et de ses centres d'action. Ses indications sur l'Allemagne sont d'une rigoureuse exactitude, et il mentionne fort exactement la tenue du convent de Willemsbad. Quant à la France, il ne veut, évidemment à dessein, entrer dans aucun détail précis, pour ménager les personnes ; mais il indique très clairement, dans l'Avertissement placé en tète du livre, qu'elle est menacée d'un effroyable bouleversement.
Quoique l'Allemagne soit le foyer de ces erreurs funestes, quoiqu'elles y jouissent d'une haute protection, elles ne sont pas tout à fait étrangères aux autres nations. La France n'est pas entièrement pure ; et si, dans la crise qui nous tourmente, les Martinistes n'osent ou peut-être ne peuvent se faire entendre, ils reparaitront avec plus de danger lors. que le calme' sera revenu.

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§ 2 - La société des Philadelphes et les premières origines du parti constitutionnel, Extrait, p.95

On a vu dans l'ouvrage du père Deschamps comment en 1789 un groupe important des Sociétés secrètes, recruté principalement parmi les Martinistes (liv. II, ch. VI 9, 5), avait essayé vainement de faire prévaloir, dès cette époque, les théories du gouvernement constitutionnel.
Ce parti, longtemps réduit au silence, devait naturellement reprendre vie après la destruction des Jacobins et au milieu de l'imbécillité du Directoire. Il prit corps dans une société secrète particulière qui s'intitula la Société des Philadelphes et avait son principal centre d'action dans la Franche-Comté. Elle réunissait des éléments de haute valeur et s'était recrutée principalement parmi les militaires. Le général Oudet, le général Guillaume, Moreau, Malet comptaient parmi ses principaux membres. L'historien anglais des Sociétés secrètes, M. Thomas Frost, constate que tous étaient francs-maçons (1. The Secret Societies of the European Revolution, tome I, chap. III.).

Déconcertés un moment par le coup d’État du 18 brumaire, dans lequel Bonaparte avait eu pour principaux instruments d'anciens Jacobins, les Philadelphes reprirent bientôt leur action avec une ténacité, qui prouvait chez leurs membres une grande conviction. S'il faut en croire Nodier (2. Nodier, Histoire des Sociétés secrètes dans l'armée.) et M. Ernest Hamel, ils auraient été mêlés aux conspirations d’Aréna. Le gouvernement consulaire à cette date connaissait parfaitement leur action et le grand rôle qu'y jouait Moreau.

Nota bene : Il est évident qu'ici, les Philadelphes n'ont rien à voir avec avec la loge Les amis réunis, fondée par Savalette de Langes, garde général du Trésor Royal, loge plus connu sous le nom de Collèges des Philalèthes.

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