[1. la Vie purgative]

La première, indiquée par l’Imitation de Jésus Christ, enseignée par saint François de Sales, par saint Bonaventure, par sainte Thérèse, et une foule d'autres auteurs catholiques, ou encore par les yoguis de l'Inde (représentés pour nous par la Lumière sur le sentier), comprend trois étapes principales : la Vie purgative, la Vie illuminative et la Vie unitive.

Dans la première il faut anéantir toute passion terrestre:

« Tue l'ambition, tue le désir de vivre, tue le désir de la sensation »,

dit la Lumière sur le sentier [p.5] : il faut ensuite éteindre ses propres facultés et, au prix [page 10] de mille angoisses, faire en soi un vide complet où les influences supérieures puissent descendre sans aucun mélange ;

« prépare-toi à recevoir le pèlerin ; cherche le guerrier et laisse-le combattre en toi »,

dit-on au disciple. Il doit faire en son âme la nuit obscure afin que rien de terrestre ne ternisse « la lumière divine » qui viendra l'illuminer ; il doit faire l'absolu silence pour qu'aucun écho d'en bas ne trouble « la voix d'en haut », « le chant de vie » qui doit se faire entendre au loin.
Après les longs et pénibles travaux de cette seconde période, la lumière jaillit enfin, l'incompréhensible fusion commence; « la fleur qui a grandi dans l'orage s'épanouit en silence aux rayons du soleil divin » ; la divine harmonie retentit admirable ; un ravissement céleste récompense amplement les souffrances du néophyte, et en même temps la Puissance divine à qui son âme a fait place vient opérer par lui avec une facilité croissante les prodiges de la clairvoyance, de la guérison, de la prophétie sacrée.
C'est la voie d'amour, où s'exercent les facultés féminines.

[2. la Vie illuminative]1893 papus magie pratique

L'autre, à l'inverse, exige du néophyte, avec la même pureté de cœur préliminaire, l'exercice incessant d'une volonté qui doit se faire intrépide et se doubler d'intelligence et de prudence:

« Savoir, vouloir, oser, se taire »

est ici la devise du disciple. Il est appelé à dompter par sa propre énergie les forces inconscientes de la nature, à conjurer les êtres invisibles, à les contraindre d'opérer pour lui, quand il le souhaite, les prodiges magiques : talismans, guérisons ou [page 11] révélations même. Tout le monde connaît ces opérations que Papus nous a détaillées dans son Traité de Magie pratique en leurs triples degrés d’aimantation, de concentration et d'évocation, ou opération capitale.
C'est la voie de Volonté où s'exercent les facultés masculines; c'est celle que les anciens nommaient la magia innaturalis.
Deux mots, correspondant à leur opération principale, caractérisent nettement ces deux œuvres occultes :

La première INVOQUE l'Esprit, la seconde l'ÉVOQUE (1).

[3. la Vie unitive.]

Elles ne sont pas les seules : il en est une troisième, moins connue, moins exclusive aussi, moins extrême, qui joint la puissance de la volonté magique à l'humble piété du mysticisme, mais en les appliquant à des objets différents. Sans abandonner l'exercice de sa propre initiative, l'initié y appelle à son secours la puissance divine dont il désire se faire l'agent actif.

Il invoque le divin ; il évoque, quand il le faut l'humain et l'infra-humain.

Cette troisième forme de l’Occultisme, qui est la plus pure, la plus puissante, mais la plus difficile aussi, est celle de la Théurgie.
C'est elle que définit comme voici le remarquable initié qui a écrit Art Magic.

« Les fonctions principales des prêtres anciens étaient de trois sortes: Trouver le point de contact [page 12] ou d'union entre l'homme et les êtres qui lui sont « supérieurs ;
« Découvrir les lois constitutives de l'être humain et lui apprendre à adapter ses actions à la volonté de ces êtres supérieurs ;
« Invoquer ou solliciter leur aide pour l'accomplissement de la mission terrestre de l'homme. »

1861 levi dogme t2Pour cette dernière fonction la Théurgie a recours aux élans du mysticisme et développe toutes les facultés occultes qu'il comporte. Le théurge collabore ensuite avec les puissances supérieures par la projection de sa propre volonté soit sur les éléments de la nature physique, soit sur les esprits inférieurs, soit sur ses semblables et à toute distance : la suggestion, la lecture dans la pensée, l'ubiquité même sont à sa disposition s'il le faut.

Apollonius de Tyane nous décrit dans le Nuctaméron les difficiles degrés de cette énorme initiation ; c'est celle des Mages antiques, des Egyptiens dont Moïse est le plus illustre disciple ; c'est encore l'initiation des alchimistes et des Rose-Croix du moyen âge ; c'est celle à laquelle se rapporte Martines, disciple de Bœhm, bien qu'il ne la poursuive pas dans toute son étendue.

1861 dogme levi p386Nous le voyons, en effet, par ses lettres, enseigner une certaine magie cérémonielle facile à reconnaître bien qu'elle n'y soit qu'indiquée. Le rituel s'en accomplit la nuit, en période lunaire convenable, principalement aux équinoxes, mais il est fort simple et exclusivement protecteur: ni épée ni bâton, aucune arme offensive, un simple cercle éclairé de quelques [page 13] bougies, renforcé d'un triangle et de trois ou quatre mots puissants. Dans ce cercle, l'initié, convenablement orienté, au lieu d'évoquer debout, impératif, énergique, comme le Magicien, se prosterne humblement pour invoquer. (C'est la seule expression que les lettres nous répètent avec insistance.) Il attend alors avec patience la vision qui commencera par de rapides éclairs et finira par une apparition complète. Willermoz attendit plus de vingt ans avant d'y réussir, mais les documents montrent que le succès était fréquent dans l'école.

Ce rituel s'accompagnait du reste des pratiques catholiques les plus exactes.

Le but poursuivi dans ces « communications » était simplement un enseignement théorique, une doctrine qui était répandue ensuite par les martinistes dans les loges maçonniques en vue d'une influence sociale.