Calendrier perpetuel 1829Année 1829

- Biographie universelle classique
- Reghellini - La maçonnerie – T 1, T 2 & T 3
- Victor Cousin - Cours de l’histoire de la philosophie
- Bibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts
- Abbé Grégoire - Histoire des sectes religieuses
- Quérard - La France littéraire : Notice sur Gence et ses œuvres
- Revue française – T VII - Bibliographie française
- Revue de Paris - Souvenirs et portraits de la révolution française
- Tennemann, trad. V. Cousin - Manuel de l’histoire de la philosophie
- Bésuchet - Précis historique de l’ordre de la Franc-Maçonnerie
- Réflexions sur la philosophie de M. Cousin en 1828 et 1829.
- Schlegel - Histoire de la littérature ancienne et moderne

 Biographie universelle classique

1829 biographie portatifOu Dictionnaire historique portatif, par une société de gens de lettres - Deuxième partie H – R
Paris. Charles Gosselin, libraire éditeur - MD CCC XXIX, http://books.google.fr/books?id=8gQEAAAAYAAJ

MARTINÈZ PASQUALIS, chef de la secte dite des martinistes, a été souvent confondu avec son disciple principal, St-Martin. On n'a jamais su précisément quelle était sa patrie ; seulement, d'après son langage, on a présumé qu’il était Portugais, et même Juif. Il s’annonça, en 1754, par l’institution d’un rite cabalistique d’élus, dits cohens (en hébreu, prêtres), qu’il introduisit dans quelques loges maçonniques de France, notamment à Marseille, à Toulouse et à Bordeaux. Après avoir prêché aussi sa doctrine à Paris, il quitta soudain cette ville, s’embarqua vers 1778 pour St-Domingue, et termina au Port-au-Prince, en 1779, sa carrière théurgique. Ses écrits et ceux de ses élèves donnent lieu de croire que sa doctrine est cette cabale des Juifs, qui n’est autre que leur métaphysique ou la science de l'être,  comprenant les notions de Dieu, des esprits, de l'homme dans ses divers états.

1829 – Reghellini - La maçonnerie – T 1, T 2 & T 3

1842 maconnerie t1La maçonnerie: considérée comme le résultat des religions égyptienne, juive et chrétienne

Par le F.·.M.·.R.·.Reghellini.·.de Schio
Tome deuxième
Bruxelles, H. Tarlier, libraire-éditeur

1829 – E.·. V.·. 5829. V.·. L.·.

Chapitre 1er, extrait, page 1

Si un grand nombre d'écrivains ont donné des Mémoires sur l'origine de la Maçonnerie, plusieurs ont extravagué dans leurs narrations; Mr de St.-Martin prétend que cette institution et sa science ont été créées avec l'Univers.

Chapitre IV. Extrait, pages 63-64

Moïse prit aussi des prêtres égyptiens l'ornement du (2) Rational, qui était composé de douze pierres fines toutes différentes, sur chacune desquelles était gravé un des douze grands noms de Dieu ; elles étaient disposées, trois par trois, en quatre compartiments : cet [64] ornement relatif au Soleil, indiquait les douze mois et les quatre saisons de l'année. L'Astronomie était le vrai sens caché du Nombre. Cet ornement et ce nom se conservent dans un grade du rite du Chr. de St.-Martin.

Note : 2. Planche 1re, n° 5.

 => Lire la suite de ce texte et d'autres extraits :


Victor Cousin - Cours de l’histoire de la philosophie 

1829 Cousin coursVictor Cousin (1792-1867), professeur de philosophie à la faculté des lettres de Paris 

[Ministre de l’Instruction publique (6 septembre 1840 - 29 octobre 1840). Succède à Villemain et sera remplacé également par Villemain  - Membre de l’Institut : Académie des sciences morales et politiques (27 octobre 1832). Élu à l’Académie française, le 18 novembre 1830. Voir : www.textesrares.com/philo19/noticeAuteur.php?nom_aut=Cousin&prenom_aut=Victor ]

Histoire de la philosophie du XVIIIe siècle - Tome II  – École sensualiste – Locke

Paris. Pichon et Didier, éditeurs, libraires commissionnaires, successeurs de Béchet Aîné, quai des Augustins, n° 47 - 1829

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Bibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts

1829 bibliotheque geneveBibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts faisant suite à la Bibliothèque britannique, rédigée à Genève. - XIVme année – Tome XLme. - Littérature. Genève, imprimerie de la bibliothèque universelle. - Paris, Bossange Père, libraire de son altesse royale Monseigneur le duc d’Orléans, rue de Richelieu, n° 60. - 1829, https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=pst.000052859229&view=2up&seq=6

Notice sur la vie et les ouvrages de F. Bacon. Extrait, page 136 (Victor Cousin ?)

Ce qu’il dit sur la force de l’imagination et sur la manière de l’exalter, montre bien que les folies des hommes ne font que changer de nom pour se reproduire. On peut les comparer à un charlatan qui, après avoir usé son crédit sous un déguisement, en prend un autre et trompe à nouveaux frais. Les mesméristes, les swedenborgiens, les martinistes, les lavatériens, les illuminés ne sont que les successeurs, les héritiers en ligne directe des astrologues, des magiciens, des nécromanciens, des alchimistes. Le règne de cette illustre famille d’imposteurs n’est pas prêt à finir ; mais on lui enlève tous les jours quelques districts ou quelques provinces. La gloire de Bacon est d’avoir le premier porté la lumière dans ce palais ténébreux des ombres et des songes…

Abbé Grégoire - Histoire des sectes religieuses 

1829 gregoire hre sectesHistoire des sectes religieuses qui sont nées, se sont modifiées se sont éteintes dans les différentes contrées du globe, depuis le commencement du siècle dernier jusqu’à l’époque actuelle. [6 tomes] Par M [l’abbé Henri] Grégoire, ancien évêque de Blois [1750-1831]
Nouvelle édition, corrigée et considérablement augmentée - Tome quatrième - Paris. Baudouin frères, éditeurs, rue de Vaugirard, n° 17. 1929, https://books.google.fr/books?id=BQAnRrS-XHYC

Chapitre XVII. Martinistes russes, pages 191-192

Cette secte, née dans l’université de Moscou, vers la fin du règne de Catherine II, eut pour chef le professeur Schwarts. La conformité de leurs dogmes avec ceux des Martinistes français, leur en fit donner le nom. Ils étaient nombreux à la fin du dix-huitième siècle. Mais ayant traduit en russe quelques-uns de leurs écrits, et cherché à répandre leur doctrine, plusieurs furent emprisonnés, puis élargis, quand Paul monta sur le trône. Actuellement, ils sont réduits à un petit nombre.

Ils admirent Swedenborg, Bœhm, Ekartshausen, et d’autres écrivains mystiques. Ils recueillent les livres magiques et cabalistiques, les peintures hiéroglyphiques, emblèmes des vertus et des vices, et tout ce qui tient aux sciences occultes. Ils professent un grand respect pour la parole divine, qui révèle non seulement l’histoire de la chute et de la délivrance de l'homme, mais qui, selon eux, contient encore les secrets de la nature ; aussi cherchent-ils partout dans la Bible des sens mys [192] tiques. Tel est à peu près le récit que faisait Pinkerton de cette secte en 1817 (1).

Un fait nouveau, sur cet objet, se trouve dans l’Histoire de Napoléon et de la grande armée, par le comte de Ségur. A l’affaire de Moscou, le fils d’un marchand russe avait été incarcéré, parce qu’on l’avait surpris provoquant le peuple à la révolte. On le dénonce comme adepte d’une secte d’illuminés allemands, nommés Martinistes, association d’indépendants superstitieux. Échappé du cachot où son audace ne s’était pas démentie, il est traîné devant le gouverneur Rostopchine. Le père accourt, et, loin d’intercéder pour son fils, il demande sa mort. Le gouverneur lui accorde quelques instants pour parler encore à son fils et le bénir. Moi, dit le père, bénir un traître ! et à l’instant il se tourne en fureur vers son fils et le maudit ; ce fut le signal de l’exécution. On abattit d’un coup de sabre mal assuré la tête de ce malheureux (2).

1. Voyez l’Intellectual repository of the New-Church, n°. 25, p. 34 et suiv.
2. Histoire de Napoléon, etc., par M. le général comte de Ségur , 3°. édit., in-8°., Paris, 1825, t. II, liv. 8, ch. 3, p. 30 et 31. 

Quérard - La France littéraire

La France littéraire ou dictionnaire bibliographique des savants, historiens et gens de lettres de la France ainsi que des littérateurs étrangers qui ont écrit en français, plus particulièrement pendant les XVIIIe et XIXe siècles.
Ouvrage dans lequel on a inséré, afin d’en former une Bibliographie nationale complète, l’indication 1° des réimpressions des ouvrages français de tous les âges ; 2° des diverses traductions en notre langue de tous les auteurs étrangers, anciens et modernes ; 3° celle des réimpressions faites en France des ouvrages originaux de ces mêmes auteurs étrangers, pendant cette époque.
Par M. J.-M. Quérard - Tome troisième, Paris, chez Firmin Didot frères, libraires, rue Jacob, n° 24. M DCCC XXIX [1829] https://books.google.fr/books?id=0iNJAAAAcAAJ

Notice sur Gence et ses œuvres (pages 302-303)

1829 querard france litteraireGENCE (Jean -Baptiste -Modeste), archiviste au dépôt des chartes, anc. réviseur en chef à l’imprimerie royale; ancien membre de la Société des Antiquaires de France, et de la Société de la morale chrétienne, né à Amiens, le 15 juin 1755. [303]

— Dieu, l’être infini, ou le principe vers lequel tend l’intelligence humaine ; ode accompagnée de notes où l’on développe les relations qui, en démontrant la tendance de l’homme à un principe supérieur, manifestent en lui des facultés actives, distinctes des forces organiques, bornées aux affections sensibles. Édition à laquelle on a ajouté le texte revu de la même ode, avec les citations de l’Écriture qui s’y rapportent. Paris, Migneret, 1825, in-8, 2 fr. 50 c.
— Imitation de Jésus-Christ, traduction nouvelle (1820). Voy. KEMPIS.
— Livre de prières et de méditations religieuses, à l’usage, etc.; traduit de l’allemand sur la douzième édition (1821). Voyez BRUNNER.
— Notice biographique sur Cl.-Louis de Saint-Martin, ou le Philosophe inconnu. Paris, imp. de Migneret, 1824, in-8 de 28 pages
— Odes philosophiques et sacrées : la première intitulée : Dieu, ou l’être infini, ou le principe vers lequel tend l’intelligence humaine. Paris, 1801, in-8.
— Phanorama [sic] de la nature et de la création. Paris, impr. de Decourchant, 1828, in-8 de 4 pages.
— Tableau méthodique des connaissances humaines, avec une explication. Paris, 1816, in-fol.

On doit encore à M. Gence : 1° une Notice sur le caractère des éditions ou traductions françaises les plus remarquables de l’Imitation de .J.-C., insérée dans le Journal des curés, sept. 1810; 2° une Notice biographique des pères et auteurs cités par Bourdaloue, annexée à la table de l’édition des Œuvres complètes de ce prédicateur, Versailles, 1812; 3° Considérations sur la question relative à l’auteur de l’Imitation de J.-C., impr. à la suite de la Dissertation de M. Barbier sur les traductions françaises de ce livre (Paris, 1812 ) : M. Gence soutient dans cet écrit que l’auteur de l’Imitation de J.-C. n’est point Thomas a Kempis, ni Gersen, mais bien Jean Gerson, célèbre chancelier de l’église et de l’université de Paris ; 4° des Notices dans la Biographie universelle, entre autres, celles sur Gerson, Massillon, Montaigne, Poussin, Cl. Saint-Martin, etc. 5° les Tables analytiques de l’Histoire des monuments de l’art, par Séroux d’Agincourt.
M. Gence a participé à la traduction française de l’ouvrage de M. Micali, intitulé : l’Italie avant la domination des Romains (1824), en traduisant sur la seconde édition italienne les additions et changements considérables qu’il a refondus dans la version faite par MM. Joly et Fauriel sur la première édition.

Revue française – T VII - Bibliographie française – Sciences morales et historiques 

Revue française - N° VII - Paris. Alexandre Mesnier, libraire, place de la Bourse. - Janvier 1829, http://books.google.fr/books?id=Tno3AAAAMAAJ

Bibliographie française – Sciences morales et historiques – Livre de Damiron, pages 278-279

1829 revue francaiseEssai sur l’histoire de la philosophie en France, au dix-neuvième siècle, par M. Ph. Damiron, élève de l'ancienne École Normale, professeur de philosophie de l'Académie de Paris; — seconde édition, revue et augmentée; 2 vol. in-8°. — Schubart et Heideloff libraires, quai Malaquais n° 1 ; — Paris 1828.

Le succès de cet ouvrage est d'un bon augure. Il n'est donc pas vrai que la philosophie, qui cherche ailleurs que dans la sensation les sources de nos connaissances, soit si opposée à l’esprit du siècle. Il n'est donc pas nécessaire pour se faire lire et approuver de professer que le mot des énigmes de l'être moral est dans l'être physique, que l'intelligence de l'homme vivant ne peut s'expliquer que par l'anatomie de l'homme mort, et que l'étude de l'entendement humain doit faire place à la dissection du cerveau. Voici un livre où l'éclectisme psychologique met à l'épreuve tous les systèmes et tous les philosophes du temps, où la critique prend pour base l'examen et la réalité des faits de conscience ; et en moins de six mois une seconde édition en est devenue nécessaire, et le reproche le plus grave que l'auteur ait encouru, ne lui a point imposé d'autre devoir que celui d'étendre et de compléter son ouvrage. En effet, la nouvelle édition est double de la première. Depuis la publication de celle-ci, le livre de M. Broussais a paru ; il méritait un examen étendu auquel M. Damiron s'est livré; il y a joint quelques articles moins importons sur MM. Lancelin, Saint-Martin, Ballanche, un aperçu général sur l'état de la philosophie en France depuis la révolution jusqu'à nos jours, travail entièrement neuf et d'un véritable intérêt, qui sert à lier les divers articles consacrés à chacun des maîtres des écoles contemporaines, et qui rapproche à la fois historiquement et systématiquement les vues [279] éparses dans le cours de l'ouvrage. Enfin, dans les réflexions qui le terminent, M. Damiron a exposé avec plus de détail que la première fois ses idées sur le but, la marche et l'avenir de la philosophie. On peut dire que le cadre de l'ouvrage est maintenant rempli ; il contient tout ce qu'il devait contenir pour répondre pleinement à son titre. Un de ses plus grands mérites est de pouvoir être lu avec plaisir par les gens du monde comme avec profit par les étudiants. La forme n'en a rien qui effraie ni rebute, et le style, exempt de toute obscurité scientifique, est toujours animé et souvent brillant. Nous regardons cet ouvrage comme un des plus utiles à l'étude de la philosophie qui aient été depuis longtemps publiés.

Revue de Paris 

1829 revue de parisRevue de Paris - Deuxième édition – Tome second - Bruxelles. Demengeot et Goodman, libraires éditeurs, rue de la Chancellerie, n° 195 - 1829, http://books.google.fr/books?id=w3QPAAAAQAAJ

Article : Souvenirs et portraits de la révolution française, par M. Charles Nodier - Extrait, page 220-221

J'avais été introduit deux ans auparavant chez Bonneville par un docteur Seyffert que le monde a oublié, et c'est ingratitude s'il en fut jamais, car le docteur Seyffert n'avait de pensées que pour le bonheur du monde. Il est vrai que cela ne regardait ni vous ni moi, ni personne en particulier, mais un monde éventuel qui doit exister un jour, et une société de bâtisseurs occultes qui apportent depuis une centaine d'années des matériaux à la Babel [221] intellectuelle de Weisshaupt. Il était si facile alors de me faire monter sur les ailes mystiques des anges de Swedenborg, ou de m'enterrer tout vivant dans les antéléchies massives de Saint-Martin, que je fus néophyte au premier appel, comme saint Paul. Le docteur Seyffert qui savait tout (c'était un des privilèges de notre initiation), ne savait presque pas le français, et je ne l'en trouvais que plus imposant. Cela me faisait comprendre au moins pourquoi je ne le comprenais pas.

Tennemann, trad. V. Cousin - Manuel de l’histoire de la philosophie

1829 tennemann

Tome second, traduit de l’allemand de Wilhelm Gottlieb TENNEMANN par Victor Cousin, professeur à la faculté des lettres de l’Académie de Paris. Paris, Pichon et Didier, libraires commissionnaires, successeurs de Béchet aîné, quai des Augustins, n° 14. Sautelet et Cie, rue de Richelieu, n° 14.

https://books.google.fr/books?id=M2PQ4scLiuoC

§ 418. Page 351

France. Louis Claude Saint-Martin, (né à Amboise en 1743, mort en 1804) [pour 1803]: Des erreurs et de la vérité. Lyon, 1775, in-8. Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l’homme et l’univers. 1782, II vol. in-8. De l’esprit des choses, 1800, II vol. in-8, etc. (Tous ces ouvrages ont été trad. en allem.)

 


Bésuchet - Précis historique de l’ordre de la Franc-Maçonnerie

Précis historique de l’ordre de la Franc-Maçonnerie, depuis son introduction en France jusqu’en 1829, suivi d’une biographie des membres de l’ordre, les plus célèbres par leurs travaux, leurs écrits, ou par leur rang dans le monde, depuis son origine jusqu’à nos jours ; et d’un choix de discours et de poésies. Par J[ean]-C[laude] B[ésuchet] (1790-1867) - Paris, Rapilly, libraire, passage des Panoramas, 1829, 
http://books.google.fr/books?id=e5cqAAAAMAAJ

Tome 1er Année 1754 - Page 37

1829 Besuchet FM t1

Une déclaration de MM. de Sorbonne, rendue publique, porte qu'on ne doit entrer ni rester dans la société des francs-maçons. Cet acte donna lieu à de nouvelles persécutions locales, mais n'exerça aucune influence sur les esprits. Les bulles des papes Benoît XIV et Clément XII avaient familiarisé les maçons avec les censures ecclésiastiques.
L'état fâcheux où se trouve l'institution par l'admission d'une foule d'individus sans mérite à nos différents grades, détermine le chevalier de Bonneville à instituer un chapitre de hauts grades, sous le titre de Chapitre de Clermont; bientôt un grand nombre de maçons distingués s'y réunissent. Le système templier créé par les maçons lyonnais (voy. 1743) devient le régime du nouveau chapitre. Le célèbre baron de Hund y prend les hauts grades, et avec eux l'idée du régime de la stricte observance, qu'il établit dans sa patrie peu de temps après.
Martinez Paschalis crée le rite des élus Coëns qu'adoptèrent les loges de Marseille, de Toulouse et de Bordeaux.

Tome 1er Année 1768 - Page 44

Martinez Paschalis (voy. 1754) introduit dans plusieurs loges de Paris le régime des Élus-Coëns. Ce régime, complètement organisé en 1775, fait donner aux ateliers qui le professent le nom de Loges Martinistes, par allusion au nom du fondateur.

Tome 1er  Année 1785 – Extrait, page 77

L’année 1785 acquit de la célébrité dans nos fastes par l’ouverture du premier couvent philosophique, qui avait pour chefs les frères Savalette de Langes, de Gebelin, etc., fondateurs de ce régime. Tous les maçons instruits, à quelque rite qu’ils appartinssent, y furent seulement appelés : la convocation était généralement pour la France et l’étranger.
Joseph Balsamo, comte de Cagliostro, créateur d’une maçonnerie égyptienne, est invité comme les autres frères, tels que Mesmer, Saint-Martin, etc., à prendre part au couvent et à y développer ses principes.

Tome deuxième - Martinez, pages 193-195

http://books.google.fr/books?id=9pcqAAAAMAAJ

1829 Besuchet FM t1

MARTINEZ - PASQUALIS, présumé Portugais, et même juif, est un de ces hommes dont [194] le nom n'est révélé que par des causes accidentelles ou par une célébrité qu'on leur donne quelquefois à leur insu. C'est ce qui' arriva à Martinez-Pasqualis, par le zèle de Louis-Claude de Saint-Martin (voy. ce nom), avec lequel il a été confondu. Martinez-Pasqualis, chef de la secte des Martinistes, institua le rite cabalistique des Élus Cohens (en hébreu, prêtres) dans les loges de Bordeaux, Marseille et Toulouse. C'est à Bordeaux qu'il reçut maçon, et dans sa secte, Saint-Martin, officier au régiment dé Foix. Il apporta son rite à Paris, en 1768, et, aidé du célèbre peintre Van Loo, il le fit connaître dans la capitale en 1775. Mais l'inventeur disparut brusquement, sous prétexte d'aller recueillir une succession, et partit pour Saint-Domingue vers 1778. Il mourut au Port-au-Prince n 1779. Bacon de la Chevalerie (voy. ce nom) fut aussi son disciple et son correspondant. La doctrine de Martinez Pasqualis est la cabale des juifs, qui n'est autre que leur métaphysique, ou science de l'être comprenant les notions de Dieu, des esprits, de l'homme dans ses divers états : système mal expliqué par l'auteur et dénaturé par ses disciples. Il avait composé pour eux un Traité de la réintégration, où il expose sa doctrine; mais [195] cet ouvrage est resté dans les mains de l'auteur  et n'a jamais été imprimé:

Tome deuxième - Saint-Martin, pages 255-257

SAINT-MARTIN (Louis-Claude de), officier au régiment de Foix, naquit à Amboise d’une famille noble, le18 janvier 1743 ; son titre de philosophe inconnu annonce que nous ne devons point l’envisager dans sa vie politique, militaire ou civile, qui d’ailleurs ne fournit [456] aucun renseignement. Disciple de Martinez Pasqualis, il est le chef d’une maçonnerie mystique introduite dans la franc-maçonnerie de 1a secte du martinisme, créée par son maître, et dont les principes autorisent les croyances les plus bizarres et les superstitions les plus absurdes (voy. Martinez Pasqualis). Saint -Martin prétend que la maçonnerie est une émanation de la divinité et qu’elle remonte à l’origine du monde ; nous voyons là une opinion et non une extravagance. Mais où Saint Martin nous parait avoir outre passé le droit d’un sage réformateur, c’est lorsqu’il substitue aux choses les plus simples une doctrine qui ne peut satisfaire le bon sens et qu’il présente ses idées dans un style que Voltaire qualifiait d’archigalimatias. Il divise la franc-maçonnerie en dix grades et les distribue en deux temples. Le premier temple renferme l’explication de sept grades : apprenti, compagnon, maître, ancien maître, élu, grand architecte, maçon secret. Dans le second temple ou grades supérieurs, il développe le système de martinisme : ce sont le prince de Jérusalem, le chevalier de la Palestine et le chevalier Kadosh ou homme saint. Tout cela est développé dans un manuscrit en 2 vol. in-4° l’Ecossisme réformé, dont aucun libraire n’a voulu entreprendre l’impression, [257] et qu’aucun maçon instruit n’a eu le courage de mettre en lumière.

Saint-Martin a fait peu de prosélytes, et a été obligé de se renfermer dans la maçonnerie qu’il traitait de vulgaire, et Dia ; et où néanmoins il était accueilli avec distinction non à cause de ses idées étranges , mais parce qu’on lui reconnaissait du mérite et qu’il était un honnête homme. Il fut convoqué au couvent philosophique que les Philalètes ou chercheurs de la vérité établirent en 1785 et 1787, et où furent appelés toue les maçons distingués et les maçons sectaires, entre autres le comte de Cagliostro (voy. Savalette de Langris, Court de Gébelin [sic], Cagliostro). Saint-Martin refusa d’assister au couvent et de prendre part à ses opérations. La philosophie mystique de Saint-Martin se trouve dans le livre des erreurs et de la vérité, et dans les autres ouvrages du Philosophe inconnu. On lui doit la traduction d’une partie des œuvres de Bœhm, philosophe allemand. Saint-Martin mourut à Aulnay près Paris, le 13 octobre 1803.


Réflexions sur la philosophie de M. Cousin

Réflexions sur la philosophie de M. Cousin en 1828 et 1829.
Seconde partie pour servir à la réfutation de l’introduction à son cours ?
Suivies de quelques observations sur les fondements de la philosophie
[par un élève des cours de M. Cousin] - Paris. Gauthier frères, libraires, rue Serpente, n° 16 - Lyon, Maire, grande rue Mercière, n° 21 – 1829, http://books.google.fr/books?id=4PAGAAAAcAAJ

1829 reflexions philo cousinL’école théologique, pages 30-35

Et d'abord, on a soumis à une classification bien peu exacte ceux qui, de notre temps, se sont adonnés à des recherches ou à des considérations philosophiques ; et on n'a pas remarqué que les erreurs qu'il était impossible de ne pas commettre dans la désignation précise de l'école à laquelle on voulait que tel ou tel métaphysicien appartînt, tendaient à introduire de la confusion dans l'étude de la science, et mettaient obstacle à ses progrès. Ainsi l'on a inventé une école théologique, dans laquelle se sont trouvés placés M. de Maistre et M. Ballanche, malgré les différences essentielles qui les caractérisent (1) ; on y a fait entrer Saint-Martin, qui, chef avéré d'une secte d'illuminés, en contradiction ouverte avec la théologie comme avec la raison, ne veut pas qu'il y ait des mystères [31] pour l'intelligence humaine ; et l'on n'a pas pensé qu'alors M. Cousin aurait autant de droits, et peut-être plus de droits, à occuper une place dans cette prétendue école théologique, puisqu'en acceptant l'accusation de vouloir pénétrer dans la profondeur de l’essence divine, il a encore la prétention (que du moins n'a jamais eue Saint-Martin ) de parler du haut de l'orthodoxie chrétienne, et de ne faire que répéter ce qu'ont dit, bien avant lui, les plus grands docteurs de l’Eglise (2).

Saint-Martin, dit M. Damiron, est à peine un philosophe ; « ce n'est surtout pas un Philosophe d'une école ou même d'une secte ; il y a quelque chose en lui de singulier, de retiré, de bizarre qui l'isole et le sépare de tous; s'il appartient à quelque centre, c'est plutôt à une initiation, à une société secrète de métaphysique, qu'à une philosophie publique (3). »

Mais, si Saint-Martin est à peine un philosophe , s'il n'est pas surtout un philosophe d'une école, s'il y a quelque chose en lui qui l'isole et le sépare de tous, il ne saurait exister aucune raison qui puisse autoriser à le placer dans [32] l’école théologique, à moins que cette école ne soit une sorte de lieu de dépôt, où l'on relègue, pour s'en débarrasser, certains écrivains à qui on ne sait pas, ou à qui on ne veut pas assigner un autre rang, et dont on a seulement pris le soin de parcourir les écrits pour savoir s'ils ont admis la Providence, et s'ils en ont parlé bien ou mal.

Quoique cet illuminé ait en lui quelque chose de singulier, de retiré et de bizarre, je ne prétends pas néanmoins l'isoler de tous ceux à qui M. Damiron a assigné des rangs ; et c'est lui-même qui va m'aider à lui fixer une place honorable pour le dédommager de la perte de celle que je crois devoir lui être enlevée :

Car si nous remarquons que, selon M. Damiron (4), Saint-Martin n'est ni catholique, ni même précisément un chrétien, dans le sens vulgaire du mot (ce qui n'empêchait pas, comme on a vu, qu'il n'appartînt à l'école théologique) ; qu'il se rattache à une de ces religions philosophiques qui, préparées et venues en même temps que le christianisme, sans se confondre avec lui, eurent pourtant de son esprit, et en ont retenu jusqu'à nos jours quelques traits et [33] quelques principes ; que peut-être, en remontant le passé, on arriverait au gnosticisme ou à quelque doctrine du même genre ;.... si nous remarquons aussi que M. de Maistre, cité par M. Damiron, nous dit que la doctrine des illuminés et de Saint-Martin (en supposant toutefois que l'on puisse appeler cet ordre d'idées une doctrine) est un mélange de platonisme, d'origénianisme, et de philosophie hermétique sur une base chrétienne (5), nous conclurons que Saint-Martin appartiendrait bien plutôt à l'école éclectique qu'à l'école théologique.

Il lui appartient encore plus par un autre point auquel nous n'avons pas pris garde :

M. Cousin, qui est le chef parmi nous de l'école éclectique, nous a dit que la philosophie tend doucement la main à l'homme pour l’élever au-dessus du christianisme ;

Et M. de Maistre, qui autant que personne devait connaître les illuminés, nous dit, dans les lignes rapportées par M. Damiron, que le dogme principal des illuminés et de Saint-Martin est, que le christianisme, tel que nous le connaissons aujourd'hui n'est qu'une véritable loge bleue faite pour le vulgaire, mais qu'il [34]dépend de L'homme De Désir de s’élever de grade en grade jusqu'aux connaissances les plus sublimes(6).

Concluons donc que Saint-Martin et ses illuminés, au lieu de devoir être rangés dans l'école théologique, sont des éclectiques ; ou bien, que M. Cousin et ses éclectiques sont de véritables illuminés.

Laissons cependant ces vaines classifications, dont le premier défaut est de ne pouvoir être entièrement exactes, et reconnaissons plutôt qu'il n'y a en philosophie qu'une grande division, ou, si l'on veut, deux écoles : l'école matérialiste, et l'école spiritualiste. Celui qui s'attache à la première, qui en professe vraiment les doctrines, est presque toujours coupable ; et son crime est grand, puisqu'il outrage à la fois Dieu et l'homme : Dieu, dont il méconnaît les dons ; l'homme, qu'il dégrade.

Le spiritualiste peut aussi se tromper ; il pèche alors par excès, il extravague selon le sens grammatical de l'expression, vagatur extra; il s'égare hors des limites que lui prescrivait la considération de la nature humaine ; comme [35] M. de Maistre, lorsque , sous le nom de son sénateur russe, il se plaint que l'on veuille lui barrer la route des découvertes (7), et que, proclamant un absolu dédain pour les méthodes scientifiques, il s'élance vers ces espaces où le génie se trouble, et où, en croyant courir après la vérité, on ne saisit presque toujours que des chimères. Il extravague, vagatur extra, comme Saint-Martin (si l'on veut obstinément lui assigner un rang dans la philosophie), lorsqu'avant M. de Maistre, à qui il a servi de guide, il prétend (8) que c est rendre inutiles les plus belles facultés de l'être pensant, de lui annoncer qu'il y a un ordre de vérités qu'il ne lui est pas donné de comprendre ici-bas. Il extravague enfin, vagatur extra, comme M. Cousin, quand il veut pénétrer dans la profondeur de l'essence divine, et soutient (9) qu'un Dieu qui nous est absolument incompréhensible est un Dieu qui n'existe pas pour nous (10).

Notes

(1) Serait-ce que, étrangers aux doctrines qui sont proprement du ressort de la théologie, et les confondant avec les simples principes de toute philosophie raisonnable, les auteurs de cette classification auraient placé certains écrivains dans l'école théologique, pour cela seul que ces écrivains reconnaissent une Providence ? Mais les plus grands philosophes des temps qui ont précédé le Christianisme, appuyés sur la raison et le consentement des âges, ont proclamé le gouvernement d'une providence, sans que cependant on puisse, je pense, leur assigner un rang dans l'école théologique.
(2) 5e Leçon du cours de 1828, pages 16 et suiv.
(3) Essai sur l'histoire de la philosophie en France, au 19e siècle.
(4) Essai sur l'histoire de la philosophie en France, au 19e  siècle, art. Saint-Martin.
(5) Essai sur l'histoire de la philosophie en France, au 19e siècle, art. Saint-Martin.
(6) Soirées de St.-Pétersbourg, tome 2, page 552.
(7) Dixième entretien des Soirées de St.-Pétersbourg.
(8) Des erreurs et de la vérité, pages 225 et suiv.
(9) 5e Leçon du cours de 1828, page 17.
(10) C'est une grande faute, même en philosophie, de borner sa vue à ce monde ; car il est impossible de rien dire de raisonnable, ni sur la providence, ni sur l'homme, sans tenir compte d'une autre vie destinée à être le complément de celle-ci. Ce n'est pas qu'il appartienne à la philosophie de disserter sur l'ordre des choses futures, ni qu'il ne faille se garder de suivre quelques illuminés qui confondent, dans leurs élans spirituels, deux états différents. Je veux seulement faire observer que la créature, qui doit avoir une existence après celle-ci, ne s'explique pas de la même manière que celle dont la destinée serait accomplie ici-bas ; qu'ainsi M. de Maistre aurait évité plusieurs méprises, s'il ne se fût obstiné à ne considérer la providence que dans l'ordre présent ; et M. Cousin, s'il eût pensé à notre seconde et éternelle vie, n'aurait point dit que la philosophie ne peut être accusée de témérité quand elle aspire à comprendre l'essence divine. Car, s'il était donné à l'homme de s'élever, pendant cette vie mortelle, à de si grandes hauteurs, quel terme plus reculé pourrait être promis et assigné à son intelligence dans la vie future ?
Il est un petit livre qui, en même temps qu'il nous enseigne nos devoirs par rapport à Dieu et par rapport aux hommes, renferme un fonds de vérités philosophiques que souvent l'on cherche en vain dans de grands livres ; et c'est toujours pour ne l'avoir pas étudié, ou pour l'avoir oublié, que nous nous trompons, même en philosophie. M. Damiron (dans son Essai sur l'histoire de la philosophe en France, pages 52 et 53), désire sinon que l'on réforme ce petit livre, du moins qu'on le transforme, et qu'on lui donne un caractère plus philosophique, plus savant, plus rationnel pour des intelligences chez lesquelles domine le raisonnement. Mais M. Damiron oublie que le catéchisme (mot formé de deux mots grecs qui signifient institution, doctrine fondamentale) ne peut être, quelque perfection qu'on lui donne, qu'un sommaire, un abrégé nécessairement sec et aride que doit ensuite développer l'enseignement oral ou écrit ; et il me semble que la partie des œuvres de Bossuet, par exemple, qui est spécialement consacrée à la doctrine, les essais de Nicole, les sermons de Massillon, et une foule d'autres ouvrages, sont une explication des vérités du christianisme, assez rationnelle pour satisfaire les intelligences chez lesquelles domine le raisonnement.

Le spiritualisme (pages 41-43)

J’ai dit que le spiritualisme a aussi ses excès, et que l'esprit s'égare par une vaine complaisance dans la vue de ses propres dons. Ainsi l'esprit humain poursuit sa carrière d'activité entre deux écueils : l'avilissement et la présomption. C'est bien sa faute s'il va se perdre contre l'un ou l'autre ; car la route qui lui est laissée est assez large ; et la philosophie, qui est une de ces sciences auxquelles le monde a été livré dès le commencement, n'a pas à se plaindre qu'on ait trop resserré sa voie. Elle ne se [42] plaindrait pas avec plus de raison que l'on veuille l'arrêter dans son essor, et lui montrer des limites qu'elle ne saurait franchir sans s'égarer. Le livre de Saint-Martin est rempli de doléances sur les entraves que, suivant cet illuminé, on a imposées à l'intelligence humaine ; mais la philosophie ne peut reconnaître Saint-Martin pour son organe. M. de Maistre a répété les mêmes déclamations ; et M. Cousin, plus hardi encore que le premier, n'a pas craint de déclarer que la philosophie acceptait l'accusation de vouloir pénétrer dans la profondeur de l'essence divine. Cependant le célèbre professeur nous a mis lui-même en état d'apprécier ces imprudentes paroles échappées dans un de ces mouvements irréfléchis d'une ambition vaste comme la vérité, qui prétend à tout, s’applique à tout, à l'infini comme au fini (1), quand, ailleurs, il a reconnu que l'intelligence humaine est limitée, et a reproché à un métaphysicien d'avoir paru l'oublier ; quand encore, dans sa deuxième leçon du cours de 1829, page 62, il nous a dit que l'autorité a sa place légitime dans les matières de la foi et dans le domaine de la théologie, de même que la libre réflexion doit régner dans [43] le domaine de la philosophie. Or, de quoi servirait l'autorité, et où sa place serait-elle légitime, si la philosophie pouvait atteindre à tout, si elle ne devait reconnaître des limites dans lesquelles elle doit se renfermer ? et je crois avoir eu raison de dire que celui qui les franchit n'est plus l'homme dont l'intelligence use de ses droits ; c'est 1’homme qui extravague (vagatur extra limites).

Le matérialiste ne niera pas ces limites, lui qui, bien loin d'en approcher, se cherche au contraire une place dans un rang bien inférieur à celui qu'il est appelé à occuper. Dira-t-il qu'il n'y a rien au-dessus de ce que ses sens aperçoivent ? mais le témoignage de sa propre conscience le convainc de mensonge; il faudrait qu'il niât Dieu même ; et l'usage de ses propres facultés intellectuelles déposerait encore contre lui.

(1) Expressions empruntées à l'auteur de l'Essai sur l'histoire de la philosophie en France, page 261.


Schlegel - Histoire de la littérature ancienne et moderne

1829 SchlegelF. Schlegel - Histoire de la littérature ancienne et moderne. Louvain, chez F. Michel, imprimeur libraire de l’Université - Librairie encyclopédique, De Perichon, rue des Alexiens, n° 25, à Bruxelles. - Tome second, 1829, http://books.google.fr/books?id=iMwTAAAAQAAJ - Traduite de l’allemand, sur la deuxième édition, par William Duckett (1768-1841). 

Une autre édition, la même année a été imprimée à Paris, Th. Ballimore, libraire, rue de Seine Saint Germain, n° 48 et à Genève, Cherbuliez, libraire : http://books.google.fr/books?id=n7cPAAAAQAAJ On trouvera ce texte pages 274-279. Voir également :  http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k113525c

Ce document se trouve également dans les Cahiers de Saint-Martin, n° 1, Nice Belisane 1978, in « B) Documents sur Saint-Martin dans l’entourage de Mme de Staël et de Baader », par Nicole Jacques-Chaquin et Stéphane Michaud pp. 88-90.

Chapitre XIV, extrait pages 185-190

Ce qu'il y a donc, suivant moi, de plus important et de plus essentiel dans la littérature française des temps récents, c'est le retour à la philosophie morale plus élevée, épurée, platonique et chrétienne, telle qu'on l'a vue sortir quelquefois en France de l'abîme le plus profond de l'athéisme dominant. On peut dire à certains égards que cette philosophie date de quelque temps avant la révolution, d'une époque où la corruption était à son comble. Mais cet heureux commencement n'a produit et ne pouvait [186] produire de résultats complets, qu'après le retour général à cette haute philosophie. Il y a toujours eu des philosophes entièrement séparés de leur siècle, et animés des meilleures intentions, encore que l'esprit dominant de leur époque ait été excessivement corrompu. Je nommerai ici en premier lieu [Tiberius] Hemsterhuys, [philologue hollandais, né à Groningue le 1ᵉʳ février 1685 et mort à Leyde le 7 avril 1766] qui, bien qu'il ne fût point Français d'origine, écrivait cependant dans cette langue avec la grâce des anciens, d'une manière si belle et si harmonieuse, avec si peu de contrainte et si peu d'efforts, que sous ce rapport ses dialogues de Socrate répondent parfaitement au noble esprit platonique et philosophique chrétien qui en forme le contenu. Mais ce retour est principalement signalé par l’apparition de deux philosophes éminemment remarquables par leur système tout à fait chrétien. Saint-Martin, l’un d’eux, avait exposé, avant la révolution et sous le nom du Philosophe inconnu, dans une série d’ouvrages demeurés inconnus à la foule, mais qui n’en agissaient que plus puissamment sur le petit nombre, cet antique système de spiritualisme qui paraît nouveau de notre temps, parce que l’idée de l’éternité nous est demeurée étrangère. L’autre, Bonald, est devenu, depuis la révolution qu’il a incessamment combattue, le défenseur le plus dévoué et le plus profond de l’ancienne constitution monarchique française, et a cherché à en établir les qualités et les principes essentiels dans une théorie politique toute chrétienne ; de même que plus tard, dans un essai de philosophie chrétienne, il s’est élevé avec assez de clarté à l’idée du Verbe éternel et intercesseur comme fondement de ce système. Les ouvrages de ces deux écrivains contiennent cependant encore à côté de beaucoup de bonnes et excellentes choses, beaucoup d’erreurs graves et essentielles ; ces erreurs ont en partie leur source dans quelques préjugés français, et proviennent de ce que, quoique luttant contre leur siècle, ces [187] écrivains en sont cependant encore trop fiers, et qu’ils sont surtout trop épris de leur nation, ce qui leur fait émettre des idées fausses ou incomplètes au sujet d’autres peuples ou d’autres époques, et quelquefois trahit leur ignorance à cet égard. Le préjugé qui domine chez Bonald, c’est celui de la nationalité : il rapetisse singulièrement ses vues. Celles de Saint- Martin au contraire étaient souvent obscurcies, non pas, il est vrai, dans le système même qui était hors de tout contact avec la misérable réalité de notre époque ; mais dans l’application, par ce qu’il y avait de décourageant dans ce qu’il apercevait autour de lui. Au reste, ce reproche d’un esprit d’opposition tacite contre la constitution actuelle de l’Église, qu’on lui fait comme catholique, est, en ce qui le concerne, plus apparent que fondé. Et s’il s'applique avec plus de justesse à quelques-uns de ses partisans en France et en Russie, il ne faut pas tant en être surpris, puisque les successeurs et les disciples d’un grand homme, de quelque genre que ce soit, ont coutume d’adopter de leur maître tout autre chose que les bornes d’une sage modération. Que si Saint -Martin n’approuvait point l’état actuel de l’Église et s’il déplorait surtout hautement la décadence de la science catholique, il se peut qu’il en ait trouvé les motifs pendant la révolution dans la sombre époque qui l’avait précédée, et cette circonstance doit lui servir d’excuse ; mais ce malentendu n’en reste pas moins blâmable et contraire au but grand et noble qu’il se proposait, pour lequel il employait toutes les forces de son esprit ; parce que l’on pourrait en déduire la fausse conséquence que la connaissance de ce qui est de Dieu est exclusivement fondée sur l’intention et la manifestation intérieure, et peut être séparée complètement, ou du moins éloignée, de la tradition positive ou de l’Église intérieure qui en est la base naturelle et la forme essentielle. Mais Saint -Martin n’a [188] attaqué nulle part la véritable science de la religion, ni ne s’est jamais élevé contre elle. Il exprime en toute occasion le désir que les connaissances plus élevées en soient une propriété et un instrument, et soient de nouveau unies au sacerdoce. On doit y voir plutôt un hommage à la destination de la religion, qu’une dépréciation de sa dignité d’après la mesure commune de l’esprit dominant et d’une philosophie commune et sensuelle qu’il combattit au contraire sans relâche pendant toute sa vie. Aussi bien, tout ceci ne s’applique encore qu’aux circonstances extérieures ; car Saint-Martin n’est jamais en opposition avec le système de la foi catholique, et sa philosophie n’est pas seulement mosaïque, mais encore véritablement chrétienne. Par son origine et par sa forme, elle appartient à cette philosophie platonicienne orientale qui, bien qu’après la réforme elle ait été, comme je l’ai déjà remarqué, bannie de toutes les chaires et de toutes les écoles, subsista néanmoins en secret et se maintint par une tradition mystérieuse. Les écrits en sont, pour la France du moins et la littérature du siècle, l’exposition la plus claire, la plus complète et la plus parfaite. Quoique l’écrivain dont je parle en ce moment n’ait aucunement le mérite de l’invention pour la philosophie qu’il adopta, et qui est mêlée de beaucoup d’erreurs et de lacunes; toujours est-il remarquable cependant qu’au milieu de l’athéisme qui régnait à cette époque en France, un inconnu, un philosophe isolé ait apparu qui se soit exclusivement consacré à réfuter cette philosophie athée, en annonçant aux hommes une philosophie mosaïque et chrétienne révélée par Dieu, fondée sur de vieilles et saintes traditions. Et l’on doit se réjouir de voir que parmi tant d’apologistes du catholicisme le comte de Maistre fit enfin apercevoir quel riche trésor d’esprit et de connaissances, si on avait su l’employer convenablement, était resté jusqu’alors inutile pour le but de la religion ! [189]

C’est une chose également remarquable qu’au commencement de notre siècle, tandis qu’une foule d’hommes n’avaient et n’eurent en vue, lors du rétablissement de la religion, que la nécessité politique et le maintien des croyances extérieures fondées sur la coutume, un savant jurisconsulte, un profond politique comme Bonald ait paru sur la scène et ait essayé sérieusement, avec une conviction pleine et entière, de baser la théorie de la justice uniquement sur Dieu, et la théorie de l’État sur les doctrines morales du christianisme. Sous le rapport philosophique, on ne pourrait lui adresser d’autre reproche que d’avoir trop mêlé et même presque identifié la raison et la révélation, par conséquent de n’avoir point apprécié cette dernière ainsi qu’il convenait de le faire. Toutefois en France, jusqu’à cette époque, on n’avait pas seulement scindé et opposé la raison et la révélation ; mais on les avait même mises tout à fait hors de contact. Un grand nombre de défenseurs des doctrines religieuses ont moins heureusement atteint leur but, précisément parce qu’ils rejetaient indistinctement toute philosophie, tandis que la raison dialectique et la fausse philosophie; une fois nées avec l’homme, ne sauraient être extirpées et anéanties que par une philosophie vraie. Bonald tombe dans l’extrême contraire; il veut trop rationaliser le christianisme et même le réduire à l’état d’idée rationnelle. La vérité même, lorsqu’elle veut renverser l’erreur, se jette avec trop de force et trop d’abandon dans le point de vue opposé. Après des erreurs telles que celles que vit naître le dix-huitième siècle, il n’est point étonnant que l’esprit, d’abord incertain et chancelant, marchât avec hésitation même dans une meilleure voie, ainsi qu’il arriva d’une manière différente à Saint-Martin et à Bonald, les deux écrivains français les plus distingués de cette époque et auxquels se rattache le comte de Maistre, plus [190] satisfaisant, plus croyable dans sa doctrine, et traitant son sujet de plus haut.