Calendrier perpetuel 1834Année 1834

- Ph. Hauger - Philosophie religieuse. Examen de la doctrine de J. Bœhme et de Saint-Martin.
- Revue de Paris (Bruxelles) – T 7 - Balzac – Étude philosophique - Séraphita
- Nouvelle revue germanique – T1 - Bulletin bibliographique – T2 - Études biographiques : chap.IV. Madame Varnhagen von Ense
- Molitor – Philosophie de la Tradition
- Mazure – Spiritualisme et progrès social : Chapitre II. Une théorie spiritualiste – II. De Ballanche
- Dictionnaire biographique universel : Article Saint-Martin
- Catalogue de la Bibliothèque publique de Genève
- Biographie universelle et portative des contemporains - Article Sainnt-Martin
- Bibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts
- Damiron - Essai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle – 3ème édition T. 1 et 2 : Garat, J. de Maîstre, etc.
- Éphémérides universelles : Mort de Saint-Martin, philosophe français
- Revue du progrès social - Nécrologie : Garat - Richer
- Sainte-Beuve – Poètes et Philosophes modernes de la France – XV – M. Ballanche
- Villeneuve-Bargemont - Économie politique chrétienne 

1834 – Bibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts

1834 bibliotheque universelleBibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts
Rédigée à Genève
1834 – Tome I. - Littérature
Genève. Imprimerie de la Bibliothèque universelle
Parisn Anselin (successeur de Magimel), libraire, rue Dauphine, n° 9
Bruxelles, L. Haumann et Compe libraires, rue Neuve, n° 103
1834 - Bibliothèque universelle des sciences, belles-lettres, et arts

Ethnographie. Géométrie intellectuelle et morale de la France. Extrait, pages 347-348

… « D'abord tout près du Dauphiné, la grande et aimable ville de Lyon, avec son génie éminemment sociable, unissant les peuples comme les fleuves. Lyon fut le siège de l'administration romaine, puis de l'autorité ecclésiastique pour toute la Celtique. Dans les terribles bouleversements du moyen âge, cette grande ville ecclésiastique ouvrit son sein à une foule de fugitifs, et se peupla de la dépopulation générale, à peu près comme Constantinople concentra peu à peu sur elle tout l'Empire grec, qui reculait devant les Arabes ou les Turcs. Cette population n'avait ni champs, ni terres, rien que ses bras et son Rhône ; elle fut industrielle et commerçante. L'industrie y avait commencé dès les Romains. Nous avons des inscriptions tumulaires : A la mémoire d'un vitrier africain, habitant de Lyon ; A la mémoire d'un vétéran des légions, marchand de papier. Cette fourmilière laborieuse, enfermée entre les rochers et la rivière, entassée dans les rues sombres qui y descendent, sous la pluie et l'éternel brouillard, elle eut sa vie morale pourtant et sa poésie. Ainsi notre maître Adam, le menuisier de Nevers, ainsi les Maistersœnger de Nuremberg et de Francfort, tonneliers, serruriers, forgerons, aujourd'hui encore le ferblantier de Nuremberg. Ils rêvèrent, dans leurs cités obscures, la nature qu'ils ne voyaient pas, et ce beau soleil qui leur était envié. Ils martelèrent dans leurs noirs ateliers des idylles sur les champs, les oiseaux et les fleurs. A Lyon, l'inspiration poétique ne fut point la nature, mais l'amour. Plus d'une jeune marchande, pensive dans le demi-jour d'une arrière-boutique, écrivait, comme Louise Labbé, comme Pernette Guillet, des vers pleins de tristesse et de passion, qui n'étaient pas pour leurs époux. L'amour de Dieu, il faut le dire, et le plus doux mysticisme fut encore un caractère lyonnais. L'église de Lyon fut fondée par l'homme du désir (Saint-Pathin [sic]), et c'est à Lyon que, dans les derniers temps, Saint-Martin, l'homme du désir, établit son école. Notre Ballanche y est né. L'auteur de l'Imitation, Jean Gerson voulut y mourir. »

1834 – Biographie universelle et portative des contemporains

1834 biobraphie contemporainsBiographie universelle et portative des contemporains, ou, Dictionnaire historique des hommes vivants, et des hommes morts depuis 1788 jusqu'à nos jours, qui se sont fait remarquer chez la plupart des peuples, et particulièrement en France, par leurs écrits, leurs actions, leurs talents, leurs vertus ou leurs crimes.
Ouvrage entièrement neuf, contenant un grand nombre de notices qui se trouvent dans aucune biographie déjà publiées, et rédigé d’après les documents les plus authentiques ; orné d’un bel atlas renfermant 100 portraits gravés avec un grand soin par Montaut
Publié sous la direction de MM. [Alphonse] Rabbe, [Claude Augustin] Vieilh de Boisjolin et [Claude Binet de] Sainte-Preuve
Tome quatrième.
Paris, chez F. G. Levrault, libraire, rue de la Harpe, n° 81, et - Strasbourg, rue des Juifs, n° 33.
1834

=> Voir sur le siteBiographie universelle et portative des contemporains

1834 - Catalogue de la Bibliothèque publique de Genève

1834 catalogue

Catalogue de la Bibliothèque publique de Genève
Rédigé par Louis Vaucher, docteur ès lettres et bibliothécaire honoraire
Ière partie
Bibliothèque Publique (Genève, Bibliothèque publique et universitaire (Genève)
Genève, se vend chez les principaux libraires
1834
Notes sur l'article: [VOL.1] Catalogue de la Bibliothèque publique de Genève

Page 124

Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l’homme et l’univers, Edimbourg, 1782, 2 vol. 8°.


1834 revue progres social1834 - Philippe Hauger (1798-1838) - Philosophie religieuse.

Examen de la doctrine de J. Bœhme et de Saint-Martin.

Revue du progrès social

Recueil mensuel politique, philosophique et littéraire publié par M. Jules Lechevalier

Année 1834 - I - 4e livraison - Avril 1834
Paris, au bureau du Journal, rue de Provence, 8, et chez Bachelier, libraire, quai des Augustins, 55.

Voir l'article sur le siteExamen de la doctrine de J. Bœhme et de Saint-Martin

1834 - Revue de Paris (Bruxelles) – T 7

1834 revue de paris T7Revue de Paris,
Seconde édition
Juillet 1834 – Tome septième
Bruxelles ; H. Dumont, libraire éditeur
1834 - Balzac – Étude philosophique - Séraphita

Article : Balzac – Étude philosophique - Séraphita

IV. Séraphîta-Séraphîtus (extrait, p.160)

… L’Agneau est la grande figure des Anges méconnus et persécutés ici-bas. Aussi Christ a-t-il dit : Heureux ceux qui souffrent ! Heureux les simples ! Heureux ceux qui aiment ! Tout Swedenborg est là : Souffrir, Croire, Aimer. Pour bien aimer, ne faut-il pas avoir souffert, et ne faut-il pas croire ? L’Amour engendre la Force, et la Force donne la Sagesse ; de là, l’Intelligence; car la Force et la Sagesse comportent la Volonté. Être intelligent, n’est-ce pas Savoir, Vouloir et Pouvoir, les trois attributs de l’Esprit Angélique ? — Si l’univers a un sens, voilà le plus digne de Dieu ! me disait monsieur Saint-Martin que je [le] vis pendant le voyage qu’il fit en Suède.

1834 – Nouvelle revue germanique – T 1

1834 revue germanique T1Nouvelle revue germanique
Recueil littéraire et scientifique par une société d’hommes de lettres français et étrangers
Deuxième série - Tome premier
Paris. Chez F. G. Levrault, éditeur, rue de la Harpe, n° 81.
Même maison, rue des Juifs, n° 33 à Strasbourg
A Bruxelles, à la Librairie Parisienne
1834 - 1834 – Nouvelle revue germanique – T 1 - Bulletin bibliographique

Bulletin bibliographique (extrait, p.381)

Philosophie : Le Mensonge, pour servir à la science des maladies de l'âme, par J. Ch. A. Heinroth), professeur de médecine psychique à Leipzig (un volume de 500 pages grand in-8.°); — l'Idée de la liberté dans l'individu, dans l'État et dans l'Église, par le Dr Matthias, professeur à Marbourg, disciple de Hegel, qui se propose de rendre la doctrine de son maître plus généralement intelligible; — le Livre de la liberté, ou l'Esprit du dix-neuvième siècle, par un Autrichien émigré, ouvrage dédié à O-Connel ; — une troisième édition de l'Introduction à la philosophie, de Herbart, professeur à Gœttingue, et une seconde édition de sa Psychologie; —la Religion et la-Philosophie dans leurs rapports actuels, par J. H. Fichte (extrait des Annales de Heidelberg, critique de plusieurs ouvrages contemporains sur la philosophie religieuse); — Angelus Silesius et Saint-Martin (extraits, faits et annotés par Mme Varnhagen von Ense); —l'Arithmétique du langage, ou l'Orateur par lui-même, par Langenschwarz (connu comme improvisateur).

1834 – Nouvelle revue germanique – T 2

1834 revue germanique T2Nouvelle revue germanique
Recueil littéraire et scientifique par une société d’hommes de lettres français et étrangers
Deuxième série - Tome second
Paris. Chez F. G. Levrault, éditeur, rue de la Harpe, n° 81.
Même maison, rue des Juifs, n° 33 à Strasbourg
A Bruxelles, à la Librairie Parisienne
1834 - http://books.google.fr/books?id=5e0EAAAAQAAJ

Mai 1834 — Études biographiques — IV. Madame Rahel-Frédérique Varnhagen von Ense [1771-1833], par X. Marmier

[p.10] Mme Rahel-Frédérique Varnhagen von Ense naquit à Berlin le jour de la Pentecôte 1771. Son nom de fille était Levin-Robert. Sa famille était riche, et ne négligea rien pour lui donner une complète éducation ; mais les dispositions naturelles qu'elle possédait et le goût excessif qu'elle avait pour l'étude, contribuèrent encore plus que tous les soins des maîtres à développer son esprit. Elle grandit avec cette époque de gloire pour la littérature allemande, avec ce siècle fécond, qui, après avoir donné à la poésie Klopstock, à la critique et à la philosophie Lessing et Mendelssohn, produisit encore dans son généreux enfantement Wieland, Herder, Gœthe, Schiller, Fichte, les grands maîtres de l'art, les grands réformateurs de la marche intellectuelle de leur nation. Gœthe devint son idole, elle lut avec transport tout ce qu'il écrivait, elle exprima hautement son enthousiasme pour lui; elle eut ainsi le mérite de reconnaître le génie du poète, à une [p.11] époque où beaucoup de critiques puissants s'efforçaient encore de le renier. Elle suivit assidument les cours de Fichte, et se dévoua aussi à cette noble philosophie qui élève si haut la dignité de l'homme. Plus tard elle passa outre pour revivre dans le mysticisme de Saint-Martin, mais non toutefois sans que des traces saillantes de ses premières études se retrouvent çà et là dans ce qu'elle écrit. [...]
[p14] … De son côté M. de Varnhagen n'était pas de nature à ne jouer qu'un rôle de contemplation passive dans cette activité littéraire. C'est un homme d'une grande portée d'esprit, d'une grande profondeur de conception, un homme qui a sérieusement étudié et beaucoup réfléchi; ses articles de critique sont mentionnés avec éloges dans toute l'Allemagne ; ses ouvrages de biographie, notamment celle de Zinzendorf, indiquent un caractère philosophique bien marqué et une érudition peu ordinaire; et quant à la forme, les connaisseurs s'accordent à le nommer comme un de ceux qui aujourd'hui manient avec le plus de grâce et de souplesse cette riche et difficile langue allemande.
Rahel mourut le 7 Mars 1833. Sur la fin de sa vie elle faisait sa lecture habituelle des poésies d'Angelus Silesius et des Œuvres de Saint-Martin, dont elle a publié quelques extraits, avec des notes qui sont une preuve manifeste de l'attention sérieuse qu'elle portait à ces ouvrages, et de l'aptitude qu'elle avait acquise à les bien juger.

Molitor – Philosophie de la Tradition – 1834

1834 MolitorPhilosophie de la Tradition
Par J.-F. Molitor
Traduit de l’allemand par Xavier Quris
Paris
Gaume frères, rue du pot de Fer Saint Sulpice, n°5
Prosper Dondey-Dupré, rue de Richelieu, n°47 bis.
1834 - Molitor – Philosophie de la Tradition

Extrait, p. 221-222

La création renferme trois mondes : 1° le monde supérieur, c'est-à-dire des êtres purement intelligents, qui correspond à la pensée ; 2° le monde moyen ou des attributs spirituels, figuré par la parole; 3° enfin le monde extérieur ou visible, qui représente l'œuvre. Mais comme dans cette échelle merveilleuse, chaque degré inférieur est le relief d'un degré supérieur, il s'en suit que les formes des choses terrestres sont l'expression des vertus spirituelles, l'émanation des principes sublimes.

On donne en général le nom d'écriture à l'empreinte de l'idée sous la figure extérieure. C'est en ce sens que les formes différentes que nous apercevons dans la nature visible, sont autant de caractères sacrés. Aussi les Cabalistes, plusieurs Pères de l'Église et quelques Mystiques chrétiens parlent-ils de ce grand alphabet divin. Saint Ambroise et saint Prosper, par exemple, appellent le ciel un livre sacré qui contient de belles pages et des instructions merveilleuses. Saint Augustin le compare au visage de l'homme dont les traits nous dévoilent ce qui se passe au fond de l'âme, de même qu'au moyen de la lumière des corps célestes, nous pouvons encore découvrir [p.221] beaucoup de choses au firmament. L'homme, devenu incapable par sa chute de comprendre le langage intérieur de Dieu, perdit dès lors la clef du livre de la nature, dont il ne reste plus aujourd'hui que quelques consonnes sans voyelles (1).

Note

(l) La merveilleuse nature, semblable au Protée de la Fable, fuit, pour ainsi parler, sous la main de l'homme, lorsqu'il cherche à saisir le fil de son histoire intérieure et à dévoiler le mystère de sa vie première. C'est toujours comme les Feuilles Sybillines qu'il lui faut recueillir au milieu de ces immenses catacombes. Voila ce qui a fait dire à saint Martin « que l'univers est sur son lit de mort, et que c'est à nous à compatir à ses douleurs. » L'ancien Testament s'exprime avec la plus grande réserve chaque fois qu'il est question de la nature. Moïse craignait de fournir un prétexte aux erreurs du paganisme. Le Nouveau est plus précis sur ce point : il y a quelque chose de tendre et de mystérieux dans ces gémissements des créatures dont parle l'Apôtre. Jésus-Christ, qui représente l'Adam sacerdotal, est comme le centre universel vers lequel convergent toutes les sphères de la création. C'est à l'époque de sa naissance que s'accomplit la grande révolution planétaire, phénomène unique dans l'histoire du ciel. L'étoile que virent les Mages, au rapport de plusieurs astronomes, et surtout d'après le plus célèbre d'entre les Juifs, Abarbanel, n'était rien autre chose que la conjonction de Jupiter et de Saturne dans le signe du poisson (20 mai). Keppler et Munter expliquent ce fait de la même manière. Sur le Golgotha, il suffit de la voix défaillante de l'Homme-Dieu pour que le voile du temple se déchire, que la terre tremble et que les morts ressuscitent. Jésus-Christ est en rapport avec le monde social; il apparaît dans la grande année jubilaire, où tous ceux qui avaient des dettes étaient acquittés, et les captifs affranchis ; image symbolique de cette autre coulpe qui devait être remise au monde entier au moment où le Christ lui criait du haut de la croix : Vous êtes libres, car je vous ai rachetés à grand prix. La révélation est donc comme le point départ de la philosophie de la nature dont l'histoire ne saurait mieux commencer que par ce beau vers de Virgile, quand Enée raconte à Didon les malheurs de sa patrie.
Infandum regina jubes renovare dolorem... (N.duTrad.) 

1834 – Mazure – Spiritualisme et progrès social

1834 MazureSpiritualisme et progrès social, esquisses du temps présent.
Par Adolphe Mazure
Paris. Chez Delloye, libraire, rue des Filles Saint-Thomas, n° 5
Octobre 1834 - Mazure – Spiritualisme et progrès social

Chapitre II. Une théorie spiritualiste – II. De Ballanche 

II. De Ballanche, pour l’époque présente ; exposition de la manière et des idées de ce théosophe (extrait, p.84-86)

Le point de départ de M. Ballanche est autrement pur que celui de Herder : il a rompu tout-à-fait avec le naturalisme antique ; et, bien que son imagination fertile emprunte à [p.85] cette nature de brillantes couleurs, l'homme qu'il envisage, ce n'est pas l'homme sortant par l'art et la puissance des siècles d'une nature inférieure, mais jaillissant à la parole de Dieu, son corps du limon, son âme du souffle divin. Ballanche s'est donc placé dans le centre vivant des antiques traditions chrétiennes.

Ce qui distingue surtout notre philosophe de Herder, c'est la pensée beaucoup plus religieuse et plus élevée qui semble le rapprocher de l'illuminisme de Saint-Martin, à part des ténèbres mystiques qui altèrent ce dernier théosophe ; c'est la base chrétienne qui supporte toutes ses théories idéales, cette loi première, universelle, de l'initiation douloureuse par laquelle chaque homme, chaque peuple, le monde entier ont passé, passeront dans leurs phases de renouvellement ; c'est l'idée primitive de L'Épreuve et de L'expiation, idée sainte qui a sa racine dans celle de la chute et de la réintégration de l'homme, et qui forme le double tissu de la vie de l'homme ici-bas, jusqu'à ce que, la [p.86] dernière épreuve étant consommée, l'humanité subisse sa définitive transformation, pour être de là tout entière transfigurée et renouvelée dans le ciel. 

1834 – Dictionnaire biographique universel et pittoresque

1834 dictionnaire biographiqueDictionnaire biographique universel et pittoresque contenant 3000 articles environ de plus que la complète des biographies publiées jusqu'à ce jour, suivi de cent vingt portraits, imprimé dans le texte.
Tome troisième. PAL – ZYR.
Paris. Aimé André, Libraire éditeur, quai Malaquais, n° 4.
1834 - Dictionnaire biographique universel

Article Saint-Martin, pages 197-198

SAINT-MARTIN (Louis-Claude De), né à Amboise, 1743, fut légiste puis militaire, devint un des disciples du mystique Martinez Pasqualis. Philanthrope et spiritualiste, il fut lié peu de temps avec l'astronome Lalande, eut des rapports avec Rousseau et fit de grands voyages. Lors de la révolution dans laquelle il reconnut les desseins terribles de la Providence, il n’émigra pas, et fut détenu qqs. temps comme complice de Catherine Théos, puis il vécut retiré, s'occupant de ses publications. M. 1810. On a de lui des Erreurs et de la vérité, ou les hommes rappelés au principe universel de la science, 1775, in-8; Tableau de l'ordre naturel, 1 v. in-8; Eclaircissem. sur l’associat. humaine ; le [p.198] Livre rouge ; Ecce homo ; le Crocodile, ou la guerre du bien et du mal sous Louis XV, poème. Il a traduit aussi les Ouvr. de Boehm.


1834 – Damiron - Essai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle – 3ème édition – Tome 1er

1834 Damiron t1aEssai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle
Par M. Philibert Damiron (1794-1862), Professeur de philosophie à l’École Normale et au Collège royal de Louis Le Grand.
Troisième édition, revue et augmentée d’un supplément
Tome premier
Paris, Librairie classique et élémentaire de L. Hachette, ancien élève de l’Ecole Normale, rue Pierre Sarrazin, n° 12.
1834 - Essai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle

Nous ne reproduisons que les éléments nouveaux que Damiron a ajouté dans cette 3e édition, dans l'introduction, sur l'école sensualiste et Garat, sur Joseph de Maistre.
Rappelons que c'est lors de la 2e édition, parue en 1828, que Damiron parle pour la première fois du Philosophe inconnu dans un article important. Dans cette édition Damiron reproduit à l'identique cet article :

Article : SAINT-MARTIN, (Le Philosophe inconnu) - Né en 1743, et mort en 1803.

Introduction – Extrait, page 46

Si , dans la période que nous venons de parcourir, c'est-à-dire de 1795 à 1803 et 1804, il se manifesta quelque opposition à la philosophie sensualiste, elle fut plus indirecte que directe, plus littéraire que scientifique. Elle aurait eu peine à compter quelques métaphysiciens dans ses rangs ; ce ne serait pas Saint-Martin, le philosophe inconnu, qui pût bien aux écoles normales, sur le terrain de la critique, combattre avec succès le principe de la sensation, mais qui, dans ses dogmes positifs, obscur, bizarre et enveloppé, affecta le mysticisme, et écrivit pour les initiés et nullement pour le public. Son spiritualisme singulier ne sortit pas de l'arcane où il se plut à le renfermer. M. de Maistre, à cette époque, quoiqu'il eût déjà dans quelques écrits déposé le germe de son système, n'avait encore, dans le monde savant, ni nom, ni rôle de chef d'école : retiré en Russie, où il vécut, jusqu'au moment de la restauration, il était ignoré du plus grand nombre.

École sensualiste - Garat – Extrait, page 134-135

… Ainsi, Garât, quoi qu'il fasse, est mis de force hors du doute dans lequel il prétend se renfermer : ou il faut qu'il renonce au pur système de la sensation, et que, comme M. la Romiguière, il en vienne au sens [135] moral ; ou il faut qu'avec Cabanis, Volney et M. de Tracy, il accepte en psychologie l'explication du sensualisme. S'il balance à l'accepter, c'est faute de conséquence ; c'est que l'opinion qu'il professe n'est pas seule dans sa pensée, et qu'à côté il y en a une autre, moins formelle et moins saillante, qu'il ne s'avoue pas si haut, mais qu'il ne sent pas moins ; et cette opinion est celle qui, fondée sur la conscience , lui fait voir obscurément, mais constamment, qu'il y a pour la science d'autres attributs que ceux qui sont connus par la sensation : voilà pourquoi il ne se prononce pas, nous le supposons, du moins ; car, du reste, il raisonne trop bien pour ne pas tirer avec rigueur la conclusion matérialiste contenue dans le système dont il embrasse la doctrine (1).

Note
(1) Il ne serait pas sans intérêt de lire, dans le Recueil des écoles normales, les discussions auxquelles donnaient lieu les leçons de Garat; on y remarquerait surtout une réponse de Saint-Martin sur le sens moral, qui mérite attention.

École théologique. Monsieur le comte Joseph de Maistre. Extrait, pages 224-225

L'objet de notre Essai est uniquement métaphysique. S'il était quelque chose de plus, s'il était politique, religieux, esthétique, s'il nous fallait embrasser et juger tous les systèmes qui sont sous ces noms, ce ne serait plus une critique de la philosophie proprement dite, mais une histoire générale des opinions de notre temps, que nous serions tenu de présenter. Tel n'a point été notre dessein : il est plus borné et moins haut ; il ne regarde que cette partie des opinions qui est simplement spéculative. Cependant, comme la spéculation n'est pas si séparée de la pratique, et la pure philosophie de ses applications positives, qu'on n'aille bien des unes aux autres, nous ne pouvons guère nous refuser de suivre, au moins dans de courtes excursions, les penseurs qui, au bout de [225] leurs théories, rencontrent l'art, la religion ou la politique et sortent alors de la métaphysique pour entrer dans des questions d'un ordre moins abstrait. Ainsi, après avoir considéré dans notre examen de M. de Maistre surtout les Soirées de Saint-Pétersbourg, nous allons jeter un coup d'œil sur son ouvrage du Pape, quoiqu'il soit plus politique que philosophique. Nous en indiquerons seulement la doctrine générale (1).

Ce qui rend la souveraineté possible et nécessaire dans la société, c'est que l'homme est à la fois bon et méchant, moral et corrompu (2). Elle est donc par le fait seul de la nature humaine, et non par la grâce des peuples.

Notes
(1) Nous aurons l'occasion d'y revenir au chapitre de M. de Lamennais, et alors nous rapporterons une discussion très nette et très ferme de ces idées. Nous l'emprunterons à M. Ch. de Rémusat, qui l'a écrite dans le Globe, avec beaucoup d'autres excellents articles.
(2) Saint-Martin dit à peu près la même chose.

1834 – Damiron - Essai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle – 3ème édition – Tome second

1834 Damiron t2Essai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle
Par M. Philibert Damiron (1794-1862), Professeur de philosophie à l’École Normale et au Collège royal de Louis Le Grand.
Troisième édition, revue et augmentée d’un supplément
Tome second
Paris, Librairie classique et élémentaire de L. Hachette, ancien élève de l’Ecole Normale, rue Pierre Sarrazin, n° 12.
1834 - Essai sur l’histoire de la philosophie en France au XIXe siècle T.2

Supplément

Retour sur quelques auteurs déjà examinés ; revue de quelques auteurs non encore examinés, dans les précédentes éditions.

Extrait, pages 291-292

Quant à l’école théologique, il n'y a pas même unité entre les écrivains que j'ai rapprochés sous ce titre commun. En effet, MM. de Maistre, de Lamennais et de Bonald, sont des philosophes catholiques, des penseurs orthodoxes, et on ne pourrait en dire autant de quelques-uns de ceux que je leur ai adjoints, de Saint-Martin en particulier; sous ce rapport la dénomination par laquelle je les désigne n'est pas sans doute très exacte ; elle ne l'est pas non plus en ce sens que ceux-là seuls auxquels elle s'applique, [292] traitent des questions religieuses et ne traitent que ces questions; je n'ai pas besoin de le démontrer. Mais comme tous ont une tendance à tirer la philosophie d'une faculté qui n'est ni la sensation, ni la conscience , et qui sous le nom de religion, de foi et d'inspiration est directement ou indirectement, immédiatement ou par tradition, une manière de s'éclairer qui n'a en quelque sorte rien d'humain et qui vient de Dieu seul, j'en fais, d'après cette circonstance, une école particulière, que d'après cette circonstance aussi j'appelle théologique, ayant soin d'ailleurs de noter toutes les nuances qui la distinguent.

Extrait, pages 305-306

M. Sainte-Beuve, que je ne puis m'empêcher dans ma mémoire, et ma faiblesse de professeur déjà un peu vieux, de compter parmi les élèves qui ont honoré mes leçons, je lui emprunte un morceau dans lequel il exprime son opinion, d'après la lecture qui lui en a été faite, du livre de philosophie de M. de Lamennais.

« Pendant les intervalles de la controverse vigoureuse, à laquelle on l'aurait cru tout employé, serein et libre, retiré de ce monde politique, où le Conservateur l'avait vu un instant mêlé, et d'où tant d'intrigues hideuses l'avaient fait fuir, entouré de quelques pieux disciples, sous les chênes druidiques de la Chesnaye, seul débris d'une fortune en ruines, il composait les premières parties d'un grand ouvrage de philosophie religieuse, qui n'est pas fini, mais qui promet d'embrasser par une méthode toute rationnelle l'ordre entier des connaissances humaines, à partir de la plus simple notion de l'être. Le but dernier de l'auteur, dans cette conception encyclopédique, est de rejoindre d'aussi près que possible les [306] vérités primordiales d'ailleurs imposées, et de prouver à l'orgueilleuse raison elle-même qu'en poussant avec ses seules ressources, elle n'a rien de mieux à faire que d'y aboutir : la logique la plus exacte, jointe à un fonds d'orthodoxie rigoureuse, s'y fraie une place entre Saint-Martin et Baader. Nous avons été assez favorisé pour entendre, durant plusieurs jours de suite, les premiers développements de cette forte recherche : ce n'était pas à la Chesnaye, mais plus récemment à Juilly, dans une de ces anciennes chambres d'oratoriens, où bien des hôtes s'étaient assis sans doute depuis Malebranche jusqu'à Fouché. Pendant que lisait l'auteur, bien souvent distrait des paroles, n'écoutant que sa voix, occupé à son accent insolite et à sa face qui s'éclairait du dedans, j'ai subi sur l'intimité de son être des révélations d'âme à âme, qui m'ont fait voir clair en une bien pure essence. Si quelques enchaînements du livre me sont ainsi échappés, j'y ai gagné d'emporter avec moi le plus vif de l'homme. »


1834 – Éphémérides universelles

1834 ephemeridesÉphémérides universelles ou Tableau religieux, politique, littéraire, scientifique et anecdotique, présentant un extrait des annales de toutes les nations et de tous les siècles, par A. V. Arnault [and others] mises en ordre et publiées par Édouard Monnais
Par Éphémérides, Antoine Vincent Arnault, Guillaume Édouard D. Monnais
Octobre - Deuxième édition – Tome Dixième
Paris. Corby, libraire éditeur, rue Macon saint André des Arcs, 8
1834 Mort de Saint-Martin, philosophe français

1803. Mort de Saint-Martin, philosophe français

Extrait, p.224-225)

Il faut se féliciter pour l'humanité que Saint-Martin n'ait pas été contemporain des Jean Huss et des Jérôme de Prague. Innocent à la fin du dix-huitième siècle, il eût été dangereux trois cents ans auparavant, et il aurait, certainement, entraîné, après lui, au bûcher des milliers de fous, qui l'eussent érigé en chef de secte. Il y avait du moins en lui tout ce qu'il fallait pour saisir des esprits malades et appauvris par la science des écoles ; obscurité impénétrable de pensée et de style, spiritualisme volatilisé, pour ainsi dire, langage sacramentel et inintelligible, substitution, dans les mots, d'une valeur conventionnelle à la signification vulgaire, profusion de symboles, de paraboles et d'allégories. Au temps dus Réalistes et des Nominaux, Saint-Martin aurait eu affaire à la Sorbonne, et son nom serait devenu drapeau ; aux jours de la révolution française, ses œuvres trouvèrent à peine quelques rares lecteurs, et ce n'était guère qu'à titre de phénomène et d'anachronisme intellectuel qu'il occupait passagèrement l'attention ; c'est encore aujourd'hui son seul droit à une notice biographique. Une humeur rêveuse et mélancolique le livra, dès sa jeunesse, à une piété doucement exaltée ; cette piété le porta aux études psycologiques [sic], ces études le plongèrent dans les profondeurs mystérieuses du spiritualisme, et il n'en sortit plus. Les doctrines de Martin Pasqualis, les jongleries de Mesmer, la science des nombres l'absorbèrent et lui mirent la plume à la main. Tout entier à ses rêveries et à ses visions, il peignit parfaitement lui-même sa condition dans le monde, en s'appelant le Robinson Crusoé de la spiritualité. Absolument détaché des intérêts matériels de la vie privée, on croira sans peine qu'il resta plus étranger et plus indifférent encore à la politique. Un seul incident du drame révolutionnaire, qui se jouait sous ses yeux errants, put l'intéresser vivement ; il se mêla à la ridicule conjuration de la Mère de Dieu, Catherine Théos ; quoique ce fût pitié [p.225] de faire jouer à un pareil homme le rôle de conspirateur et de perturbateur, le Philosophe inconnu (surnom mérité de Saint-Martin) n'en aurait pas moins expié sur l'échafaud sa prétendue complicité avec la mère de Dieu, si le 9 thermidor ne lui eût rendu la liberté. Bien que sa pensée fût dans les espaces, Saint- Martin, en chair et en os, appartenait à la révolution ; elle l'obligea à remplir quelques fonctions civiques, et l'envoya même monter la garde à la porte du Temple. Ce devait être chose plaisante de voir le Robinson spirituel, un fusil à la main, comme aussi d'apercevoir à sa boutonnière le ruban de Saint-Louis, qui avait payé ses services en garnison [1]: Saint-Martin, pour satisfaire au vœu de ses parents par l'exercice d'une profession, et, en même temps, pour trouver le loisir d'étudier et de méditer, s'était fait militaire, en temps de paix. Cet habitant des nuages, si singulièrement placé dans la société actuelle, désarmait le sourire qu'excitaient ses folies, par sa bienveillance générale et son inépuisable charité, car la pratique active de toutes les vertus était, selon lui, la preuve la plus authentique de la spiritualité de l'homme. Saint-Martin, inconnu en France, fit presque école en Allemagne, où ses œuvres obtinrent les honneurs d'une traduction, peut-être en reconnaissance de ce qu'il avait traduit lui-même l'ouvrage d'un des plus obscurs visionnaires allemands, Jacob Bœhm. — Auguste Descroizilles.

1. Saint-Martin n’a jamais été décoré du « ruban de Saint-Louis ». Il expose dans Mon Portrait (153), ce qui s’est passé (orthographe originale) :

« Pendant le ministere de Mr de Montbarey il m’eut eté très aisé d’avoir la croix de St-Louis, si j'avois sçu profiter de la bonne volonté qu’avoient pour moi sa femme, sa fille la princesse de Nassau, et sa soeur, la comtesse de Coaslin ; mais au premier refus qu’il fit de me faire avoir un relief pour l’interruption de mes services, je m’en tins là ; quand il fut sorti du ministere je luy reparlai de cela, et il me tint un langage tout différent. Quand j’ay eté dans l’humain j’ay quelquefois regretté cette bagatelle ; parce que je sçais qu’elle n'est rien quand on l’a, et qu’elle est tout quand on ne l’a pas (ce qui est commun à toutes les choses de ce monde) mais quand j’ay eté raisonnable je n’y ay pas seulement pensé ; et quand j’ay eté juste je me serois blamé de l’avoir acceptée puisque je ne l’avois pas gagnée ».


Revue du progrès social - Nécrologie 

1834 revue progres socialRevue du progrès social
Recueil mensuel politique, philosophique et littéraire publié par M. Jules Lechevalier
Année 1834 - I
Paris, au bureau du Journal, rue de Provence, 8, et chez Bachelier, libraire, quai des Augustins, 55.

Articles : Nécrologie : Garat - Richer

http://books.google.fr/books?id=ReQWAAAAYAAJ

Nécrologie – Dominique-Joseph Garat (pages 118-119)

GARAT (Dominique-Joseph), né à Uslaritz, près Bayonne, mort le 9 décembre 1833. – Il fut successivement avocat au parlement, député à l'assemblée nationale, ministre de la justice et de l'intérieur, sénateur sous l'empire. – Sa carrière scientifique et littéraire le conduisit à l'Institut et à la chaire d'Entendement humain, lors de la fondation de l'école normale.

C'est particulièrement sous ce dernier rapport que nous avons à réclamer pour Garat une place distinguée parmi les contemporains. Ses travaux philosophiques sont cependant peu nombreux, et écrits dans un ordre d'idées qui paraîtrait aujourd'hui bien superficiel, soit aux philosophes de l'école psychologique, soit même aux partisans de l'idéologie physiologique et de la philosophie positive, école dont le professeur d'Entendement humain se rapproche pourtant sur les points principaux de son système. Nous aurions tort, au reste, de prendre pour un système quelques leçons brillantes prononcées à l'ancienne école normale à côté de Monge et de Laplace. Le théosophe Saint-Martin combattit énergiquement la tendance matérialiste du professeur.

Un titre fort honorable dans la carrière scientifique de Garat, c'est la part active qu'il a prise avec M. de Tracy aux travaux du Conseil d'instruction publique, pour le perfectionnement du système des écoles centrales. Nous aurons bientôt à parler des travaux de ce conseil où siégeaient Lagrange, Palissot, Ginguené, Darcet, etc. Dans sa vie politique, Garat s'est élevé à des fonctions éminentes ; [119] mais il a fallu que la révolution usât bien des capacités plus compétentes, avant d'appeler au ministère de la justice et de l'intérieur un homme que ses goûts, ses habitudes et son talent destinaient de préférence à la philosophie et surtout aux lettres. L'amitié de Condorcet et les hautes relations sociales qu'il entretint des son arrivée à Paris, contribuèrent beaucoup à l'élévation rapide de Garat; mais on reconnut toujours en lui l'homme d'esprit et de goût plutôt que l'homme d'état. Le sénat en le choisissant plusieurs fois pour interprète, lorsqu'il s'agissait de célébrer les grandes victoires du Consulat et de l'Empire, se ressouvint qu'il avait commence sa carrière par des Eloges académiques.

Voici la liste des principaux ouvrages de D.-J. Garat.

Plusieurs Eloges académiques.
Considérations sur la révolution française et sur la conjuration des puissances de l'Europe contre la liberté et contre les droits des hommes ; un Examen de la proclamation du gouvernement des Pays-Bas.
Mémoires sur la révolution, ou Exposé de ma conduite dans les affaires et dans les fonctions publiques. – Paris, an III.
Plusieurs Discours politiques.
Leçons prononcées à l'école normale et recueillies par la sténographie.
Mémoire sur la Hollande, sur sa population, son commerce, son esprit public et sur les moyens, soit de la maintenir dans son indépendance comme état, soit de lui rendre ses anciennes prospérités comme nation commerçante.
Mémoires sur le dix-huitième siècle et sur la vie de M. Suard.

Nécrologie – Edouard Richer (pages 119-120)

Richer (Edouard), né à Noirmoutier, département de la Vendée, le 12 juin 1792, mort à Nantes, le 21 janvier 1834. — C'était un de ces hommes, de conscience et d'enthousiasme qui dévouent leur vie à la recherche de la vérité.— Son père, François Richer, commandant de la garde nationale, fut tué l'année suivante, lors de la prise de cette île par l'armée de Charrette. Cette circonstance valut à l'enfant une place gratuite au Prytanée militaire établi à Saint- [120] Cyr. Ce fut dans cette école que M. Edouard Richer fit ses études. Il les acheva à Paris en 1808. A cette époque, il se retira dans son pays, où il se livra à l'étude de l'histoire naturelle et de la littérature. Sa faible santé l'ayant toujours éloigne de quelque fonction et de quelque état que ce soit, l’étude a pris tous ses instants. A la littérature ont succédé la philosophie et la religion qui l'occupèrent exclusivement jusqu'au moment de sa mort.

Les principaux ouvrages de M. Richer ont été écrits sous l'influence de la doctrine de Swedenborg. Son dernier travail, de la Nouvelle Jérusalem, doit se composer de six ou huit volumes in-8°. Cet ouvrage est encore manuscrit ; il n'en a encore été publié qu'un volume. Nous avons lieu d'espérer que M. de Tollenare, ami et collaborateur de M. Richer, ne nous laissera rien perdre des idées d'un homme dont toute la pensée était de rendre aux idées religieuses, par la science et la raison, une influence supérieure à celle qu'elles obtinrent naguère par le despotisme de la foi.


Sainte-Beuve – Poètes et Philosophes modernes de la France – XV – M. Ballanche

1834 revue des deux mondesRevue des Deux Mondes
Tome troisième
Troisième série
Paris, au bureau de la Revue des Deux Mondes, rue des Beaux Arts, 6.
Londres, chez Baillière, 219, Regent Street
1834 

 Poètes et Philosophes modernes de la France – XV

Extrait, pages 712-713

[p.712]

… L'influence des écrits de M. Ballanche a été lente, mais réelle, croissante, et très active même dans une certaine classe d'esprits distingués. Pour n'en citer que le plus remarquable exemple, la lecture de ses Prolégomènes, vers 1828, contribua fortement à inspirer le souffle religieux à l'école, encore matérialiste alors, de Saint-Simon. Témoin de l'effet produit par cette lecture sur quelques-uns des plus vigoureux esprits de l'école, je puis affirmer combien cela fut direct et prompt. L'influence, du reste, n'alla pas au-delà de cette espèce d'insufflation religieuse. Historiquement, l'école saint-simonienne partit toujours de ce que M. Ballanche appelle l'erreur du XVIIIe siècle, erreur admise par Benjamin Constant lui-même ; elle persista à voir le commencement de la société dans le sauvagisme, comme lui, Benjamin Constant, commençait la religion par le fétichisme.

M. Ballanche est peut-être l'homme de ce temps-ci qui a eu à la fois le plus d'unité et de spontanéité dans son développement. Sans varier jamais autrement que pour s'élargir autour du même centre, il a touché de côté beaucoup de systèmes contemporains et, pour ainsi dire, collatéraux du sien; il en a été informé plutôt qu'affecté, il a continué de tirer tout de lui-même. La doctrine de Saint-Martin semble assurément très voisine de lui, et pourtant, au lieu d'en être aussi imbu qu'on pourrait croire, il ne l'a que peu [p.713] goûtée et connue. Je remarque seulement dans les Prolégomènes le magisme de la parole, le magisme de l'homme sur la nature, expressions qui doivent être empruntées du mystérieux théosophe. M. Ballanche connut de bonne heure à Lyon Fourier, auteur des Quatre Mouvements ; mais il entra peu dans les théories et les promesses de ce singulier ouvrage publié en 1808; aujourd'hui il se contente d'accorder à l'auteur une grande importance critique en économie industrielle. Il lut les Neuf Livres de Coëssin dès 1809, et dans un voyage qu'il fit à Paris, il visita ce prophète d'une époque pontificale ; mais l'esprit envahissant du sectaire le mit d'abord sur ses gardes, M. Ballanche voulait avant tout rester lui-même. Il vit une fois Hoëné Wronski, lequel, dans son Prodrome, revendique l'honneur d'avoir le premier émis en 1818 une vue politique que l'Essai sur les Institutions exprimait en même temps que lui. M. Ballanche vit plus d'une fois, bien que rarement, Fabre d'Olivet dont les idées l'attiraient assez, s'il ne les avait senties toujours retranchées derrière une science peu vérifiable et gardées par une morgue qui ne livre jamais son dernier mot. Il a profité pourtant des écrits originaux de ce philosophe qui aurait pu se passer d'être charlatan ; l'idée d'Adam, l'homme universel, et d'Eve qui est la faculté volitive d'Adam, lui a probablement été suggérée par Fabre. Les hommes qui ont le plus agi sur M. Ballanche, mais par contradiction surtout, sont MM. de Bonald, de Maistre et de La Mennais. Ce dernier, ainsi que l'abbé Gerbet, est devenu son ami, et la contradiction première a cessé bientôt dans une conciliation que le christianisme qui leur est commun rend solide et naturelle.

Pour nous qui n'approchons qu'avec respect de tous ces noms, et qui ne les quittons qu'à regret, il faut nous arrêter pourtant. Heureux si, à défaut d'une exposition complète de système, cette étude de biographie psychologique a insinué à quelques-uns la connaissance, ou du moins l'avant-goût, d'un homme dont la noble ingénuité égale la profondeur, et si cette explication intérieure et continue que nous avons cherché à démêler en lui peut servir de prolégomènes en quelque sorte à ses prolégomènes ! Préparer à la lecture de notre auteur, c'est là en général dans les essais que nous esquissons, et ce serait dans celui-ci en particulier, notre plus entière récompense. SAINTE-BEUVE.

Josef Hoëné-Wronski (1776-1853), philosophe, mathématicien et scientifique polonais

« Certains de ses ouvrages appelaient à la formation d’une école, ou plutôt d’une « Union Antinomienne » qui servirait à la connaissance et l’application de l’Absolu dans la vie. Le maître eut des disciples plus ou moins fidèles, dont Antoine Bukaty, et ses écrits suscitèrent de l’intérêt chez les penseurs utopistes de l’époque. C’est d'ailleurs au titre d'"auteur utopiste" qu’il fut mentionné par Sainte-Beuve et Balzac. Ses écrits auront une grande influence sur les occultistes du XIX° siècle, tels Éliphas Lévi, Saint-Yves d'Alveydre ou Papus ». Wikipédia

Au sujet du « magisme » chez Ballanche.

Pierre Simon Ballanche (1776-1847), Œuvres, Volume 5, (1833, 2e édition), Premières additions aux Prolégomènes, p.23 :

« Le règne de l'humanité, c'est l'homme se détachant du tout panthéistique. Les statues à gaines sont remplacées par les statues avec l'attitude de la faculté locomotrice. Le progrès de l'art de Dédale est l'emblème du progrès du libre arbitre. Certaines affections pathologiques, certaines impressionnabilités, certains modes accidentels de nos perceptions, ne nous donnent-ils pas une idée de cette confusion de l'être dans le tout, de ce magisme de la nature [c’est nous qui soulignons], qui sont une des explications du paganisme ? Dans une sphère, les influences de l'air et du sol; dans une autre sphère, les sentiments généraux se personnifiant, ne conduisent-ils pas à la même idée ?
Le christianisme pouvait donc seul nous sauver des superstitions naturelles comme des superstitions théurgiques ».

Ballanche, Œuvres, tome III. Essais de palingénésie sociale, tome 1er, Prolégomènes (1830),  p.179.

« Jusqu'à quel point est-il donné à l'homme d'entraîner la nature extérieure dans la sphère de la liberté humaine, d'assujettir cette nature extérieure, de l'ennoblir en la domptant, en la subjuguant, en la transformant ? Nous pénétrons de nos facultés assimilatrices le règne animal, le règne végétal, le règne minéral. Évidemment notre sphère d'activité étend son domaine. Jusqu'à quel point l'affranchissement des formes pour l'univers et pour l'homme peut-il être l'ouvrage de l'homme même ? Jusqu'à quel point pouvons-nous espérer d'arriver à l'ancien magisme, en le sanctifiant ? ».

Œuvres de M. Ballanche, tome VI : Orphée, Réflexions diverses (1833), p.165

« La création fut pour moi l’acte d’un magisme divin ; et cet acte, je sentais intuitivement qu’il était un acte continu, éternel ».

Ballanche, Vision d’Hébal, chef d'un clan Ecossais. Episode tiré de la ville des expiations (1831) :

« Le globe de la terre est donc livré à l'homme, pour qu'il le modifie par la culture, pour qu'il en fasse le tour, pour qu'il en étudie les lois générales et particulières, pour qu'il exerce sur lui le magisme intellectuel qui tend à spiritualiser la matière, pour qu'il étudie ses rapports avec les phénomènes de ce monde, avec les merveilles mystérieuses du monde des intelligences pures, pour qu'il cherche la place qu’occupe la pauvre planète, lieu de son exil, parmi les corps célestes, objets d'une contemplation sans fin » (p.35).

« Et dans le point le plus reculé de l'avenir, sur la limite du dernier horizon de l'humanité, l'homme achève de compléter la création de la terre. Par un magisme nouveau il spiritualise la matière » (p.103).


1834 - Villeneuve-Bargemont - Économie politique chrétienne

1834 bibliotheque universelleÉconomie politique chrétienne ou recherches sur la nature et les causes du paupérisme en France et en Europe et sur les moyens de le soulager et de le prévenir
M. le Ve Alban de Villeneuve-Bargemont, ancien conseiller d’état, préfet du nord, ancien député, etc.
Tome premier - Paris. Paulin, libraire éditeur, place de la Bourse, n° 31. – 1834 - Économie politique chrétienne

Chapitre III – Des deux théories de la civilisation (pages 138-141)

[p.138] Madame de Staël, dans son admirable ouvrage sur l'Allemagne, peint à grands traits les principaux caractères des deux sectes philosophiques.

« C'est en vain, dit-elle, qu'on veut se réduire aux jouissances matérielles ; l'âme revient de toutes parts. »

« Tout ce qui est visible parle en nous de commencement et de fin, de décadence et de destruction; une étincelle divine est seule en nous l'indice de l'immortalité. »

« Il n'y a plus de nature spirituelle dès qu'on l'unit tellement à la nature physique que ce n'est plus que par respect humain qu'on les distingue encore. Cette métaphysique n'est conséquente que lorsqu'on en fait dériver, comme en France, le matérialisme fondé sur les sensations, ou la morale fondée sur l'intérêt. La théorie abstraite de ce système est née en Angleterre. Les métaphysiciens français avaient établi que les objets extérieurs étaient le mobile de toutes les impressions. D'après cette doctrine rien ne devait être plus doux que de se livrer au monde physique et de l'inviter comme un convive à la fête de la nature. Mais, par degrés, la source intérieure s'est tarie, et jusqu'à l'imagination, qu'il faut pour le luxe et pour les plaisirs, va se flétrissant à tel point qu'on n'aura plus bientôt assez d'âme pour goûter un bonheur quelconque, si matériel qu'il soit. »

« Un abîme sépare ceux qui se conduisent par le calcul, de ceux qui sont guidés par le sentiment. »

« Quand on veut s'en tenir aux intérêts, aux convenances, aux lois du monde, le génie, la sensibilité, l'enthousiasme agitent péniblement notre âme. »

« Ce n'est pas assurément pour les avantages de cette vie, pour assurer quelques jouissances de plus à quelques jours d'existence, et retarder un peu la mort de quelques moments, que la conscience et la religion nous ont été données. C'est pour que les créatures en possession du [p.139] libre arbitre choisissent ce qui est juste, en sacrifiant ce qui est probable, préfèrent l'avenir au présent, conservation même des individus. »

« La morale fondée sur l'intérêt serait aussi évidente qu'une vérité mathématique, qu'elle n'exercerait pas plus d'empire sur les passions qui foulent aux pieds tous les calculs. Il n'y a qu'un sentiment qui puisse juger d'un sentiment. Quand l'homme se plaît à dégrader la nature humaine, qui donc en profitera? »

« Quelque effort que l'on fasse, il faut en revenir par reconnaître que la religion est le véritable fondement de la morale. C'est l'objet sensible et réel au dedans de nous qui seul peut détourner nos regards des objets extérieurs. »

Un philosophe spiritualiste, moins connu qu'il ne mériterait de l'être (1), a, ce semble, jeté à son tour de [p.140] grandes lumières sur ces hautes questions qui intéressent si vivement l'ordre social.

« Il y a des êtres, dit-il, qui ne sont qu'intelligents ; il y en a qui ne sont que sensibles. L'homme est à la fois l'un et l'autre : voilà le mot de l'énigme. Ces différentes classes ont chacune un principe d'action différent. L'homme seul les réunit tous les deux, et quiconque voudra ne les pas confondre sera sûr de trouver la solution de toutes les difficultés. » [Des Erreurs et de la Vérité, 1775, p.49]
« Depuis la dégradation primitive, l'homme s'est trouvé revêtu d'une enveloppe corruptible, parce qu'étant composée, elle est sujette aux différentes actions du sensible qui n'opère que sensiblement, et qui, par conséquent, se détruisent les unes les autres. Mais, par cet assujettissement au sensible, il n'a point perdu sa qualité d'être intelligent ; en sorte qu'il est à la fois grand et petit, mortel et immortel. Toujours libre dans l'intellectuel, mais lié dans le corporel par des circonstances indépendantes de sa volonté, en un mot, étant un assemblage de deux natures diamétralement opposées, il en démontre alternativement les effets d'une manière si distincte, qu'il est impossible de s'y tromper. Si l'homme actuel n'avait que des sens, ainsi que des systèmes humains le voudraient établir, on verrait toujours le même caractère dans toutes ses actions, et ce serait celui des sens, c'est-à-dire qu'a l'égal de la bête, toutes les fois qu'il serait excité par ses besoins corporels, il tendrait avec effort à les satisfaire, sans jamais résister à aucune de leurs impulsions, si ce n'est pour céder à une impulsion plus forte provenant d'une source analogue. » [Idem, p.50]

[p.141] Pourquoi donc l'homme peut-il s'écarter de la loi des sens ? Pourquoi peut-il se refuser à ce qu'ils lui demandent ? Pourquoi, pressé par la faim, est-il néanmoins le maître de refuser les mets les plus exquis qu'on lui présente ? de se laisser tourmenter, dévorer, anéantir même par le besoin, et cela, à la vue de ce qui serait le plus propre à le calmer ? Pourquoi, dis-je, y a-t-il dans l'homme une volonté qu'il peut mettre en opposition avec nos sens, s'il n'y a pas en lui plus d'un être? Et deux actions si contraires peuvent-elles tenir à la même source ? »

« En vain on m'objecterait à présent que quand la volonté agit ainsi, c'est qu'elle est déterminée par quelque motif. J'ai assez fait entendre, en parlant de liberté, que la volonté de l'homme étant cause elle-même, devait avoir le privilège de se déterminer seule et sans motif, autrement elle ne devrait pas prendre le nom de volonté. Mais en supposant que, dans le cas où il s'agit, sa volonté se déterminât en effet par un motif, l'existence des deux natures de l'homme n'en serait pas moins évidente, car il faudrait toujours chercher ce motif ailleurs que dans l'action de ses sens, puisque sa volonté la contrarie ; puisque lors même que son corps cherche toujours à exister et à vivre, il peut vouloir le laisser souffrir, s'épuiser et s'éteindre. Cette double action de l'homme est donc une preuve convaincante qu'il y a en lui plus d'un principe. » [Idem, p.51]

Note

1. S. Martin, auteur des Erreurs et de la Vérité, ou les hommes rappelés au principe universel de la science, par un philosophe inconnu ; de l’Ecce homo ; du Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l'homme et l'univers ; de l'Homme de désir, etc.
S. Martin pensait que les hommes sont naturellement bons ; mais il entendait, par la nature, celle qu'ils avaient originairement perdue, et qu'ils pouvaient recouvrer par leur bonne volonté ; car il les jugeait, dans le monde, plutôt entraînés par l'habitude vicieuse que par la méchanceté.
Ce philosophe reconnut les desseins terribles de la Providence dans la révolution française, et crut voir un grand instrument temporel dans l'homme qui vint plus tard la comprimer. Il prit la défense de la cause, du sens moral contre Garat, professeur de la doctrine du sens physique, ou de l'analyse de l'entendement humain. Son but était d'expliquer la nature par l'homme, et de ramener toutes nos connaissances au principe dont l'esprit humain peut être le centre. « La nature actuelle, dit-il, déchue et divisée d'avec elle-même, et d'avec l'homme, conserve dans ses lois comme dans plusieurs de ses facultés, une disposition à rentrer dans l'unité originelle. Par ce double rapport, la nature se met en harmonie avec l'homme, de même que la nature se coordonne à son principe. » Il pensait qu'il y a une raison à tout ce qui existe, et que l'œil interne de l'observateur en est le juge ; il considérait l'homme comme ayant en lui un miroir vivant qui lui réfléchit tous les objets, et qui le porte à tout voir et à tout connaître. Mais ce miroir vivant étant lui-même un reflet de la Divinité, c'est par cette lumière que l’homme acquiert des idées saines, et découvre l’éternelle lumière dont parle Jacob Bœham [sic].
L'objet de son ouvrage intitulé Ecce homo, est de montrer à quel degré d'abaissement l'homme infirme est déchu. On y trouve cette belle expression : « l'âme de l'homme est primitivement une pensée de Dieu. »