[Une philosophie plus compréhensive]

A l'instant où on le voudra, et bien que la pédantesque fatuité des historiens de la philosophie, des Brucke, des Tiedemann et des Tennemann, daigne à peine les honorer d'un regard, parce qu'ils sont en dehors de la grande route des bancs scholastiques, on trouvera dans les gnostiques, cabalistes et néoplatoniciens de l'école d'Alexandrie, et dans les écoles modernes Martinistes et Swedenborgistes, une philosophie plus compréhensive que ne l'ont pu faire les plus puissants efforts tentés de nos jours en Allemagne. Cette philosophie couronnera magnifiquement ces efforts, et légitimera toutes les tendances de la science nouvelle, tendances faibles encore et obscures, parce qu'elles sont inconscientes d'elles-mêmes, de leur vrai caractère et de leur destination. On verra avec admiration cet esprit philosophique agrandir et assurer le cercle de la connaissance ; l’agrandir par le principe de l'unité et de l'analogie, en ralliant toutes les sphères à l'histoire de l'homme, et en l'étudiant tout entier, c'est-à-dire autant dans son appareil passionnel que dans son appareil intellectuel ; l'assurer, en donnant à la science des critérium nouveaux, d'une importance infinie : 1° dans le point de vue téléologique, critérium pris de la nature même du vrai, qui n'est que la forme ou la manifestation du bien, toujours relatif à la réceptivité de l'être sentant et agissant ; 2° dans le principe de la vérité composée, qui fournit des contre-preuves, au moyen desquelles la certitude morale s'élève jusqu'au degré d'évidence qu'on ne croyait pouvoir atteindre que par le procédé mathématique. Lorsqu'une immense série de faits se coordonne en faisceaux se liant et se soutenant les uns les autres, et qu'on trouve en même temps l'empreinte de ces faits exprimés avec tous leurs détails, dans trois autres livres, tels que la Nature, l’Histoire et les Traditions, quand les rayons de la connaissance jusque-là en hostilité dans l'homme, [page 422] et qui faisaient de lui un royaume divisé avec lui-même, émanant majestueusement d'une même source, se rallient à un même foyer, l'homme en paix avec lui-même goûte le sublime repos qui résulte de l'harmonie active de toutes ses facultés, sorti pour jamais de la torpeur où le jetait le désespoir d'une connaissance incomplète et antinomique, il ne doute plus, il ne peut plus douter, il a reconnu qu'il portait à son doigt cet anneau e Gygès qu'il avait si vainement cherché partout. Suprême hiéroglyphe, auquel tous les autres se rapportent, ce que l'homme lit en lui, il le voit confirmé au dehors; clé universelle, sa parole ouvre tous les domaines ; ils lui apportent tous leur tribut ; ils viennent tous lui rendre hommage.